Repenser la formation infirmière : oui, mais comment ? - Objectif Soins & Management n° 0296 du 14/12/2023 | Espace Infirmier
 

OBJECTIF SOINS n° 0296 du 14/12/2023

 

réforme des études

ACTUALITÉS

Claire Pourprix

  

Le ministre de la Santé François Braun l’avait annoncée pour la rentrée 2024, son successeur Aurélien Rousseau semble moins pressé et n’a pas encore complètement communiqué sa feuille de route, même si la mise en place de ce nouveau référentiel est désormais prévue pour septembre 2025. La refonte de la formation infirmière est pourtant une préoccupation majeure pour les professionnels. L’enjeu est de taille : offrir aux nouvelles générations d’infirmiers un apprentissage dans les meilleures conditions, qui soit adapté aux réalités de terrain et aux besoins de santé à venir.

Le 12 mai dernier, lors de la Journée internationale des infirmières et des infirmiers, François Braun, alors ministre de la Santé et de la Prévention, annonçait le lancement d’une concertation pour aboutir à la rentrée 2024 à une refonte complète de la formation infirmière. La première réunion d’un groupe de travail dédié à ce sujet au ministère ayant été programmée mi-novembre 2023, cette réforme sera en toute logique reportée. Toutefois, sans attendre d’être conviées à ces réflexions, les organisations professionnelles et des experts se sont mobilisés sur cette question et ont commencé à émettre des propositions. Dans un contexte de démographie infirmière alarmante et de besoins croissants, il y a en effet urgence à repenser la valorisation du métier et son organisation. Cela se joue tant au niveau des missions des infirmiers – la révision du décret d’actes sur les activités et compétences infirmières est en cours – que de de l’apprentissage du métier.

Priorité à la qualité plutôt qu’à la quantité

En février dernier, le Comité d’entente des formations infirmières et cadres (Cefiec) communiquait les résultats de son suivi de cohorte et de promotion d'étudiants en soins infirmiers (ESI), réalisé auprès de 155 instituts de formation en soins infirmiers (Ifsi) et 44 745 étudiants. L’enquête révélait que « pour la cohorte 2019/2022, c’est-à-dire l’ensemble des ESI entrés en formation en 2019, 60,90 % ont été diplômés en juillet 2022. » En ajoutant les 2,32 % d’étudiants issus de cohortes précédentes (suite à un redoublement, une césure…), le taux de réussite au jury final en juillet 2022 était de 63,21 %. Cette enquête mettait aussi en avant, pour la cohorte 2021/2024, une déperdition d’étudiants, entre la première et la deuxième année, de 18,15 %.

Pour sa part, en juillet dernier, la Direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (Drees) révélait dans un rapport que 46 % des infirmières avaient quitté leur poste hospitalier après 10 ans d’exercice (entre 1989 et 2019), alors qu’on manquerait actuellement de 15 000 infirmières. Parallèlement, l’Inspection générale des affaires sociales (Igas) et l’Inspection générale de l’éducation, du sport et de la recherche (IGESR) indiquaient dans un rapport d’octobre 2022 « une forte déperdition entre le nombre d’étudiants commençant la formation et le nombre de diplômés trois années plus tard », soit environ 17 % des étudiants.

Pour remédier au manque de personnel, le gouvernement a fortement augmenté les quotas d’étudiants admis en Ifsi. « Ces quotas ont été stables autour d’environ 31 000 places par an au cours de la période 2010 à 2019. Dans le cadre du Ségur de la santé et du plan France Relance, il a été décidé de les augmenter de 6 600 places supplémentaires en Ifsi entre 2020 et 2022 pour répondre aux besoins d’infirmiers : 32 069 places pour 2020-2021 (soit + 1 149 places par rapport à l’année précédente) ; 34 037 en 2021-2022 et 36 144 en 2022-2023 », rappelle le rapport de l’Igas.

Pour autant, les augmentations d’effectifs étudiants ne sont pas une solution miracle. Dès avril 2023, la Fédération nationale des étudiant.e.s en sciences infirmières (Fnesi) et le Cefiec ont ainsi alerté l’opinion dans un communiqué commun : « Les établissements ne peuvent pas pousser les murs ! ». Ils ont évoqué les étudiants « assis par terre » faute de place, des « cadres formateurs épuisés d’encadrer toujours plus d’étudiants sans moyens supplémentaires », « des centaines d’étudiants sans terrains de stages ». Pour ces organisations professionnelles, l’enjeu n’est pas de jouer sur le quantitatif, mais sur le quantitatif : essayer de fidéliser les étudiants admis plutôt que vouloir en attirer toujours plus. Cela passe notamment par « une réingénierie de la formation socle aux besoins de santé de la population, afin d’avoir une formation adaptée à la réalité de terrain »

La Fnesi alerte sur le contenu de la formation. Elle évoque des enseignements qui ne sont plus d’actualité, avec par exemple, dans certains Ifsi, des anciens protocoles qui ne correspondent donc ni aux attentes du terrain, ni à celles des étudiants ; un manque de lien entre les unités d’enseignement, beaucoup trop nombreuses, mais aussi des « heures d’enseignements qui ne servent à rien », comme l’explique sa présidente, Pauline Bourdin : « Pour chacune de nos 59 unités il y a une heure de présentation pendant laquelle les formateurs lisent une fiche que les étudiants pourraient lire chez eux. Ces 59 h pourraient être utilisées autrement ! » La fédération propose donc d’optimiser les enseignements et d’en créer de nouveaux : introduire des thématiques comme le bien-être des soignants, la transition écologique, le numérique en santé, un apprentissage des langues plus efficient et plus large que le seul enseignement de l’anglais, avec par exemple la langue des signes, ou encore une organisation permettant de favoriser la mobilité internationale.

Les organisations professionnelles sont surtout vigilantes à ne pas dégrader la formation infirmière dans le seul but de permettre à un plus grand nombre d’infirmiers d’arriver sur le marché du travail. Comme en témoignent les vives réactions déclenchées par l’instauration en juillet dernier d’un Parcours spécifique aide-soignant d'accès au diplôme d'infirmier, offrant la possibilité aux aides-soignants expérimentés d’intégrer la 2e année de formation socle infirmière en trois mois au lieu d’un an de formation. « Nos adhérents sont assez partagés entre le fait de ne pas dévaloriser le métier avec une formation tronquée et le fait que chaque professionnel ait le droit d’être encouragé, accompagné dans la montée en compétences. Le parcours de formation doit être valorisant et synonyme de réussite », témoigne Dominique Combarnous, présidente de l’Association nationale des cadres de santé (Ancim). Elle souligne par ailleurs le rôle crucial joué par les cadres de santé dans la sélection des candidats : « Il faudra une sélection sévère des établissements sur les candidats, avec des critères objectifs nationaux et non pas établissement-dépendant, car les professionnels bougent beaucoup, ils vont d’une région à l’autre, ce qui induit un besoin d’uniformité. Les cadres de santé vont donc avoir un rôle important pour déterminer qui peut aller en formation, détecter les talents, valoriser les compétences. Beaucoup d’aides-soignants talentueux méritent d’intégrer la formation infirmière mais il faut faire attention : 3 mois sont-ils suffisants pour acquérir les connaissances de la 1re année ? Cela pose aussi la question des tuteurs de stage, des lieux de stages, des dispositifs d’encadrement et de la charge pour les cadres de santé. »

Actes compétences

Reste qu’il faudra bien trouver une solution pour former les professionnels de demain en nombre suffisant – sans impacter la qualité. D’après les données de l’Ordre national des infirmiers (ONI), qui a procédé à des projections démographiques de la population infirmière dans les prochaines années, « La population infirmière va croître entre 37,5 % et 61,7 % d’ici à 2040 face à des besoins qui eux vont augmenter a minima de 54 % ». L’augmentation des besoins fait référence essentiellement au vieillissement de la population. Face à ce constat, l’ONI formule des propositions pour « anticiper le choc démographique à venir et les besoins de santé » : établir des données statistiques fiables pour piloter les politiques publiques, créer des places d’Ifsi selon les besoins de la population, instaurer un système de tutorat pour accompagner les jeunes étudiants en soins infirmiers, de leur formation aux premières années d’exercice, et enfin travailler à l’attractivité du métier pour attirer des professionnels et les maintenir en activité.
La révision du décret infirmier, évoquée dès le début 2022 par l’ancien ministre de la Santé Olivier Véran, est très attendue pour améliorer la reconnaissance et l’attrait du métier. D’après une consultation effectuée par l’ONI en novembre 2022, 96 % des infirmiers estiment que plus de reconnaissance et d’autonomie de la profession infirmière rendrait le métier plus attractif. Ils sont 94 % à être favorables à une actualisation urgente du décret infirmier, qui date de 2004. Cette volonté de révision a ouvert la voie à un débat : s’agit-il d’une réingénierie des actes infirmiers ou d’une nouvelle définition du métier par grandes missions ? De même, concernant la formation : doit-on procéder à une réingénierie du référentiel de formation ou envisager un nouveau modèle par blocs de compétences ? Les deux chantiers de réformes sont évidemment intimement liés.

Pour Dominique Combarnous, « Les actes nous enferment. La tendance est bien de s’intéresser aux compétences plutôt qu’aux actes. Nous le voyons avec les IPA [infirmiers en pratique avancée] : leur métier est défini par une liste d’actes car c’est un nouveau métier, mais cela les restreint. Il faut sans arrêt remettre l’ouvrage sur la table ! De même, le métier des infirmières est décrit par le décret d’actes mais finalement, elles font parfois des actes qui ne sont pas dans le décret. Il en a toujours été ainsi, et puis on légifère après… Mais ce n’est pas normal car cela pose la question des responsabilités en cas de problème ». Si la définition du métier par actes n’est plus dans l’air du temps, il ne s’agit pas pour autant de faire table rase. « Les compétences devraient être redéfinies et elles prendront peut-être la forme de blocs de compétences. Dans tous les cas, il est important de voir ce qui, dans le référentiel actuel, serait intéressant de conserver. Si on ne fait pas de bilan, on a tendance à rajouter des choses et on se retrouve avec un millefeuilles », explique pour sa part Florence Girard, présidente de l’Association nationale des directeurs d’écoles paramédicales (ANdEP).

Le Cefiec est favorable à une redéfinition de la profession infirmière en missions. Il propose des lignes directrices de la refonte de la formation infirmière qui sont « encore susceptibles d’évoluer », précise sa présidente, Michèle Appelshaeuser. La formation devrait viser des « compétences métier incontournables » : ancrage dans la discipline des sciences infirmières, primauté du raisonnement clinique, pertinence du projet de soins/de santé, approche fondée  sur des données probantes, mise en œuvre du projet de soins en intégrant la coordination du parcours patient. Mais aussi porter sur des « compétences à développer » : leadership clinique infirmier, besoins de santé populationnels, enseignements sur la psychiatrie et prise en soins des enfants, développement de la prévention et de l’éducation thérapeutique, vaccination, numérique et gestion de crise. À cela s’ajoutent des « compétences à développer en interprofessionnalité » afin de développer une stratégie territoriale pour la formation initiale, continue et la recherche en santé, promouvoir l’exercice pluriprofessionnel coordonné et renforcer une culture commune entre les filières de santé.

De son côté, Stéphane Le Bouler, président du think tank Laboratoire d’idées santé autonomie (Lisa)*, est formel : parler de réingénierie de la formation infirmière est une vision du passé. « Je refuse de parler de réingénierie de la formation infirmière. Cela ancre le processus à conduire dans le modèle utilisé à l’origine en 2009 pour les infirmières et les différentes professions à la suite. C’est peut-être le modèle que certains représentants de la profession ou du ministère ont en tête, mais cela nous conduit à ce qu’était le référentiel de formation et ses annexes, à des processus très lourds et peu flexibles dans le temps, et c’est de cela qu’il faut se détacher. Je préfère parler de refonte. » Dans un rapport intitulé « Refonte de la formation infirmière : et si on passait directement aux travaux pratiques ? », le Lisa appuie ses réflexions sur les constats de la mission Igas-IGESR : « L’exercice professionnel des infirmiers est fondé aujourd’hui sur un décret d’actes qui constitue, par son degré de précision, une spécificité française. Dans la plupart des pays, la profession infirmière est généralement définie par grandes missions. Ce système du décret d’actes entre en tension avec l’évolution continuelle des besoins de santé, qui appelle au développement de missions plus globales comme la coordination du parcours ou la prévention, pour lesquelles les infirmiers jouent d’ores et déjà un rôle important. En outre, l’évolution de la démographie médicale oblige à repenser l’organisation et la répartition des compétences entre professionnels de santé. » Cette définition de la profession a un impact direct sur le contenu de la formation infirmière tel que le promeut le Lisa : « Le référentiel de formation de 2009, prescriptif et excessivement détaillé, n’est plus adapté aux évolutions du métier. Il doit être révisé en tenant compte des arbitrages relatifs à l’exercice de la profession infirmière, organisé en blocs de compétences et en respectant trois grands principes : la délivrance du diplôme de licence, un caractère moins prescriptif et une évaluation par le Haut Conseil de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur (HCERES). »

Pour Stéphane Le Bouler, « On ne peut pas rester éternellement au milieu du gué » : il faut d’abord faire des choix de modèle, de doctrine, puis prendre le temps de bâtir un système qui tienne la route. « Soit on reste dans le modèle ancien, et il va falloir arrêter de parler d’intégration universitaire, soit on s’oriente vers un modèle de rehaussement de la formation en lien avec l’Université et alors on doit parler d’accréditation, du rôle des universités, de diplomation universitaire et d’évaluation. »

En piste pour l’universitarisation

La voie d’une universitarisation construite est en cours avec des expérimentations menées à Toulouse, Rennes ou Caen, par exemple. Pour le reste, « Les universités montrent un enthousiasme limité à délivrer quelques enseignements dans des maquettes qui leur sont imposées de l’extérieur. Pour le moment, elles ne diplôment pas les étudiants à l’enseignement desquels elles participent. Elles sont invitées à travailler dans un registre qui n’est pas le leur, hyper détaillé, elles n’ont pas de marge de manœuvre dans cette affaire. Sur tous ces sujets, nous ne sommes pas du tout sur les standards universitaires », déplore Stéphane Le Bouler.

La Fnesi, qui participe à un groupe de travail de la mission sur l’universitarisation des formations paramédicales menée par Christine Ammirati, espère obtenir l’inscription du diplôme d’État infirmier sur la liste des diplômes nationaux de licence (DNL). L’objectif est d’ouvrir aux étudiants en soins infirmiers l’accès à la poursuite d’études dans le cursus universitaire et la reconnaissance à l’international. « Le fait d’avoir un grade licence et non une licence est un frein pour les étudiants, souligne Pauline Bourdin. Nous avons des difficultés à intégrer certains masters comme le master santé publique, par exemple, car on nous reproche de manquer de connaissances académiques. »

Autre frein : pour être en accord avec la directive européenne, le dispositif de formation en soins infirmiers devra comporter 4 600 heures contre 4 200 aujourd’hui. Où trouver ces heures, quand on sait que le programme est déjà décrié pour sa lourdeur ? Pour la Fnesi, une piste serait de comptabiliser le temps de travail personnel prévu dans les plannings de formation, comme cela se fait dans d’autres cursus. Florence Girard, elle aussi impliquée dans un groupe de travail de la mission sur l’universitarisation des formations paramédicales, ajoute qu’en « licence, les heures de travail planifiées sont faites sous forme de TD [travaux dirigés] et de temps de travail personnel. À un ECTS [European Credit Transfer and Accumulation System] ne correspond pas un volume horaire précis. 20 à 25 heures est une orientation car on tient à laisser le temps aux étudiants d’acquérir de la méthodologie, de l’autonomie, de comprendre ce qu’ils font, ce qu’ils vont devoir faire pour intégrer toutes ces connaissances. L’enjeu est aussi d’éviter des abandons d’étude ou des interruptions qui peuvent aussi démotiver les formateurs. La maquette universitaire laissera cette flexibilité possible. Il faut laisser des temps de respiration aux étudiants pour tout acquérir, prendre du temps pour eux, d’autant que beaucoup travaillent à côté. » Et, s’il fallait rajouter des heures de formation au cursus infirmier, il faudrait déplacer les temps de stage pendant l’été… Une période déjà très tendue dans les hôpitaux pour l’encadrement. Dans ses lignes directrices sur la refonte de la formation infirmière, le Cefiec préconise de prévoir au minimum 10 heures de travail personnel inclus dans le temps dévolu à la formation par semaine, mais aussi la « création de passerelles pour favoriser la réorientation des étudiants et leur réussite avec la capitalisation des ECTS acquis », ainsi qu’un « accompagnement soutenu par la mise en œuvre du mentorat, du tutorat valorisé avec un temps dédié et d’un suivi pédagogique intensifié ».

Si les acteurs s’accordent pour dire que la formation infirmière doit rester une formation professionnalisante et académique, certains sont aussi demandeurs de moins de rigidité dans le programme pour aller vers une maquette souple au niveau local, dans le respect d’un cadre réglementaire national. « Dans l’enseignement supérieur, la maquette de formation ne peut plus être bâtie sur un référentiel précis et prescriptif. Il faut une orientation nationale, mais avec des adaptations locales par exemple pour tenir compte des orientations en santé publique données par l’ARS [agence régionale de santé] sur le territoire », analyse Florence Girard. Le laboratoire Lisa exprime lui aussi cette nécessité de flexibilité, comme l’explique Stéphane Le Bouler : « Le milieu a l’habitude de raisonner sur des textes réglementaires très détaillés. Mais si on veut conduire la pédagogie adaptée aux ressources sur les territoires, tout en gardant un objectif de qualité, il faut de la souplesse. Les IPA, par exemple, se plaignent de la diversité entre les universités. Il faut s’adapter aux ressources et aux caractéristiques des territoires et à leur évolution. Mais cette souplesse, ce rôle donné à l’Université en termes de construction des maquettes, ont pour contrepartie l’évaluation. »

Et la réforme de la formation cadre ?

Définir les contours et les modalités de la nouvelle formation infirmière est un vaste chantier et accompagner les cadres formateurs dans le développement de leurs compétences est essentiel dans le cadre de la refonte de cette formation. Les travaux pourront vraisemblablement aboutir au ministère lorsque la mission sur l’universitarisation des formations paramédicales et le groupe de travail sur la révision du décret d’actes infirmiers auront suffisamment avancé leurs réflexions, voire rendu leurs conclusions. Quant à une refonte de la formation des cadres de santé… « Il y aurait peut-être une réingénierie qui se profilerait… mais il n’y a encore rien d’officiel, confie Dominique Combarnous. Il y a déjà beaucoup à faire avec les infirmières, mais il ne faudrait pas qu’on nous oublie encore une fois… » Pour la présidente de l’Ancim, une réactualisation est nécessaire, plutôt qu’un véritable changement : « Depuis 2012, de nombreux projets de loi ont changé l’environnement des cadres, nos contextes de travail, mais la plupart des IFCS [instituts de formation des cadres de santé] se sont mis au goût du jour par eux-mêmes. Finalement, il n’y a pas un gros écart entre la formation et le travail sur le terrain. En revanche, nous manquons d’uniformisation sur tout le territoire, nous observons des cultures différentes. Par exemple, des IFCS ont noué des partenariats avec des universités de gestion, de sciences de l’éduction, de management ou de sociologie. Ce n’est pas forcément mal car les cadres peuvent être complémentaires dans une équipe. Mais est-ce qu’on ne pourrait pas mettre un peu de tout cela dans une seule formation ? Faut-il encore un diplôme commun manager et formateur ? Quid des passerelles entre les deux métiers ? » Dominique Combarnous pointe aussi le cas des faisant fonction : est-ce qu’ils n’auraient pas droit à une validation des acquis professionnels (VAP) ?

Nul doute que la question de la réforme des formations paramédicales fera encore couler beaucoup d’encre…

Améliorer les conditions d’encadrement en stage

Quelles que soient les modalités de la refonte de la formation infirmière, les périodes de stage devraient rester un élément central de la formation. D’après la Fnesi, en 2022, 32 % des étudiants en soins infirmiers ont arrêté leur formation à cause d’un souci en stage. Plusieurs axes d’amélioration sont attendus : la formation et la rémunération des maîtres de stage, l’amélioration des conditions d’accueil des étudiants (facilités de logement, indemnités de transport…), une revalorisation des indemnités de stage à la hauteur de celles perçues par les étudiants de l’enseignement supérieur, ou encore, comme le demande la Fnesi depuis des années, une plateforme d’évaluation des stages pour avoir une vision nationale de la qualité des terrains de stage. Celle-ci semble actée au niveau de la Direction générale de l'offre de soins (DGOS). Une seule et même plateforme serait mise en œuvre pour l’ensemble des étudiants en santé, les défauts d’encadrement, les problèmes de maltraitance et de harcèlement étant communs à l’ensemble des étudiants en santé.

Le Lisa et l’ANdEP préconisent de revoir l’organisation des stages au long de la formation infirmière : moins de stages en 1re année, pour privilégier les travaux pratiques et de simulation, et une concentration des stages en 3e année. À leurs yeux, cette organisation faciliterait des pré-recrutements en 3e année sous forme d’apprentissage, ce qui permettrait de réduire le coût de la formation pour les étudiants, mais aussi d’améliorer la fidélisation des infirmiers à l’établissement d’accueil.

Mise en lumière du travail des cadres formateurs

Le Cefiec a publié en début d’année 2023 un livre blanc sur « L’activité des formateurs en instituts de formation » qui met en lumière la richesse du métier à l’heure de l’universitarisation. Il détaille cinq profils :

- mono-appartenant instituts de formation ;

- bi-appartenant instituts de formation/clinique ;

- bi-appartenant instituts de formation/université ;

- bi-appartenant université/clinique ;

- mono-appartenant universitaire.

Pour plus d’information, lire : « Un libre blanc pour valoriser le travail des cadres formateurs », Objectif Soins & Management n° 292, avril-mai 2023, p.11.

  • * Il est également Président par intérim du Haut Conseil de l'évaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur (HCERES) mais ne s’exprime pas à ce titre dans l’article.