Une erreur d’identité en cardio - L'Infirmière Magazine n° 370 du 01/04/2016 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Magazine n° 370 du 01/04/2016

 

FORMATION

CAS CLINIQUE

CLARISSE BRIOT  

L’identitovigilance est un des verrous garantissant la sécurité des soins à l’hôpital. En la matière, le transport interne des patients d’un service à l’autre est un maillon à risque. D’où la nécessité de respecter les barrières pour limiter les erreurs.

L’HISTOIRE

→ Vendredi, 8 h : un brancardier vient chercher Monsieur C. dans le service de cardiologie. Il doit le descendre au bloc opératoire pour la pose d’un pacemaker. Le brancardier demande le numéro de la chambre de Monsieur C. Dans le service, trois binômes infirmière/aide-soignante gèrent 36 lits répartis en quatre secteurs. L’infirmière et l’aide-soignante qui s’occupent de préparer les patients programmés pour le bloc, indiquent à l’agent le numéro de chambre (334).

→ Le brancardier se rend dans la chambre 333. Il s’agit de la chambre de Monsieur P., dont l’intervention pour la pose d’un défibrillateur implanté est prévue en fin d’après-midi. Le patient n’est pas prêt. L’infirmière et l’aide-soignante rejoignent le brancardier, munies du dossier médical de Monsieur C. Elles préparent le patient à la hâte.

→ L’aide-soignante constate que le bracelet accroché au lit du patient est celui de Monsieur P. et non celui de Monsieur C. Interpellée, elle le coupe et le remplace par un bracelet au nom de Monsieur C. Une fois le patient prêt, les soignantes transmettent le dossier médical de Monsieur C. au brancardier qui le prend en charge et se met en route vers le bloc.

→ Le brancardier entame la conversation avec le patient alors qu’ils attendent l’ascenseur. Ayant en tête l’âge de Monsieur C., qu’il a lu dans le dossier médical, il lui fait remarquer qu’il ne fait pas son âge. Le patient lui rétorque qu’il est effectivement plus jeune, d’environ une dizaine d’années.

→ Le brancardier procède à la vérification de l’identité du patient : il lui demande de décliner son nom, son prénom et sa date de naissance. Il se rend alors compte qu’il ne transporte pas le bon patient.

→ Le brancardier fait aussitôt demi-tour et retourne dans le service pour ramener le patient dans sa chambre. Il alerte l’équipe soignante.

→ Les vérifications d’usage confirment l’erreur d’identité. Les soignantes et le brancardier se rendent auprès du patient pour présenter leurs excuses et le rassurer. Le brancardier prend ensuite en charge le bon patient, Monsieur C., qui est prêt, et le descend au bloc. Monsieur P., lui, aura son intervention à l’heure prévue.

ANALYSE

De la réclamation à la déclaration de l’événement indésirable

Quelques jours après la sortie de Monsieur P., le cadre de santé de cardiologie reçoit un appel téléphonique d’un parent du patient, qui se plaint de l’erreur survenue lors de l’hospitalisation de son proche. Le cadre l’engage à faire un courrier à la direction de l’établissement. La semaine suivante, le courrier de réclamation lui est transféré par le service qualité et gestion des risques de l’hôpital, accompagné d’une demande de rapport circonstancié. Parallèlement, il est demandé au cadre de procéder à la déclaration de l’événement indésirable (EI). Le cadre consulte le dossier du patient, qui ne comporte que peu d’informations, et se rapproche des professionnels impliqués dans l’erreur qui lui confirment l’événement. « Alors que la culture du risque et du signalement de l’EI ne semblait pas présente parmi les agents qui ne m’avaient pas informé de l’incident, j’ai constaté un vrai changement d’attitude lorsque je les ai reçus en entretien, leur ai montré la lettre de plainte et que l’on a rédigé ensemble la déclaration d’EI, se souvient le cadre. J’ai senti à ce moment-là qu’ils mesuraient la gravité de ce qui s’était passé. »

La déclaration est transmise au service qualité et gestion des risques de l’hôpital. Concomitamment, le rapport circonstancié est rédigé par le cadre. Le service qualité et gestion des risques décide alors de procéder à une analyse de l’EI avec la méthode Alarm(1). « L’identitovigilance est une problématique pour laquelle nous initions souvent une analyse des causes en cas d’EI, explique l’ingénieur en gestion des risques. D’une part parce que ce type d’erreur peut avoir des conséquences importantes. D’autre part, parce que dans ce cas précis, l’événement s’est produit lors d’une interface. Or, on sait qu’à ce niveau, il peut y avoir, au-delà du facteur humain, un contexte organisationnel qui entre en jeu et par là-même, des actions d’amélioration à mettre en place. » Le cadre de cardiologie demande à ce que les professionnels impliqués participent à la réunion d’analyse, car, selon lui, « les agents ne font pas forcément le lien entre un EI pour lequel ils peuvent éventuellement culpabiliser, et l’amélioration de la qualité des soins qui peut en résulter ». Animée par l’ingénieur en gestion des risques, cette réunion a lieu deux mois après l’événement ; le cadre de cardiologie, le responsable brancardage et l’aide-soignante impliquée s’y retrouvent (l’infirmière et le brancardier n’ont pu se libérer).

Des causes immédiates aux causes profondes

L’analyse des causes via la méthode Alarm s’est attachée à dépasser les causes immédiates, patentes, de l’erreur d’identité (la non-vérification de l’identité du patient) pour en rechercher les causes profondes (systémiques, organisationnelles). Elle a permis de questionner plusieurs facteurs, au niveau de l’individu, de l’équipe, des tâches et de l’organisation.

→ Individu : l’insuffisance des échanges d’informations entre les professionnels de santé et le patient. Aucun des professionnels ne s’est enquis directement auprès du patient de son identité.

→ Équipe : le manque de communication orale au sein de l’équipe soignante et avec le brancardage.

→ Tâches :

– le non-respect des protocoles d’identitovigilance : faire énoncer au patient son nom, prénom et date de naissance ; vérifier la concordance bracelets/dossier/patient ;

– le non-respect du référentiel de transport interne, selon lequel le brancardier doit récupérer auprès des soignants les informations sur le patient à transporter, se rendre dans la chambre si possible accompagné d’un soignant, se faire remettre le dossier médical et vérifier l’identité du patient là aussi en présence du soignant.

→ Organisation :

– une organisation du service non sécuritaire pour le parcours du patient avec trois infirmières et aides-soignantes en 12 heures pour quatre secteurs ; le 4e secteur (les hospitalisations programmées) étant absorbé, entre 10 h et 17 h, par une quatrième infirmière de journée. En dehors de ces horaires, ce sont les professionnels du 3e secteur qui s’occupent de ce secteur, dont elles ne connaissent pas bien les patients (arrivés la veille, alors qu’elles ne sont pas en charge du secteur, pour une descente au bloc le lendemain) ;

– un manque de coordination au sein du service (transmission des informations) et avec le brancardage.

Analyse de la récupération

→ L’analyse est également revenue sur la façon dont la situation a été détectée et rétablie. En l’occurrence, c’est le brancardier qui s’est rendu compte du problème au cours de son échange avec le patient avant même de monter dans l’ascenseur. Le patient a été immédiatement reconduit dans sa chambre et les professionnels se sont excusés auprès de lui. Son intervention s’est passée normalement.

→ L’analyse a pointé le dysfonctionnement de trois barrières : le non-accompagnement du brancardier dans la chambre du patient ; la non-vérification de l’identité auprès du patient ; la non-vérification de la concordance des différents éléments (patient/dossier/examen).

→ Les professionnels se sont aussi interrogés sur les actions qui auraient pu être conduites pour améliorer la situation. Il est apparu que la traçabilité de l’événement, des actions entreprises, des excuses et de l’état du patient a fait défaut. La déclaration de l’événement indésirable aurait pu être menée avant la réclamation de la famille du patient.

ACTIONS CORRECTIVES

Fonction brancardage

→ Rappel des règles d’identitovigilance. À la suite de la réunion d’analyse, le cadre du brancardage procède à un rappel des règles d’identitovigilance auprès de ses agents. Il le fait lors d’une réunion générale puis, pour les absents, lors d’entretiens individuels. « Il s’agissait de rappeler les différentes barrières mises en place au sein de l’hôpital et de ramener chacun à son rôle et à sa responsabilité. Même si les soignants peuvent connaître le patient, le brancardier doit faire sa part en s’assurant qu’il transporte le bon patient », détaille le cadre. Et de poursuivre : « À la suite decette sensibilisation, les agents ont pris conscience de l’importance de l’événement. Le fait qu’un brancardier soit en cause interpelle l’ensemble de l’équipe. Aujourd’hui, il ne se passe pas quinze jours sans que l’on parle d’identitovigilance à nos agents, même de façon rapide. C’est systématique et en continu. »

→ Réflexion sur l’instauration d’une feuille de route. Pour répondre au manque de coordination entre soignants et brancardage et au non-respect du référentiel de transport interne, l’idée est discutée d’instaurer une fiche de liaison entre soignants et brancardier, permettant, en outre, une traçabilité des tâches effectuées et des responsabilités. « Aujourd’hui, les brancardiers disposent d’une liste des patients qu’ils prennent en charge sur la journée, explique le cadre du brancardage. Il s’agirait d’ajouter deux items à cette matrice. L’un permettant de confirmer que le dossier médical a bien été remis par l’infirmière et l’autre, que l’identité du patient a été vérifiée en présence d’un soignant. Cette feuille présenterait l’intérêt d’obliger soignants et brancardiers à faire ces vérifications puisqu’ils devraient apposer leur signature. Ce projet, qui était déjà en discussion avant l’événement indésirable, a été remis sur la table et nous en étudions la faisabilité. Nous devons encore trouver la meilleure façon de le mettre en place. »

→ Une formation ? Il n’existe pas, au sein de l’établissement, de formation propre à l’identitovigilance à destination des brancardiers, en dehors de l’information donnée en continu et du référentiel de transport interne. À leur arrivée dans l’établissement, les agents suivent un parcours d’intégration classique : 15 jours en binôme pour découvrir l’établissement, le service et la prise en charge des patients. Le cadre du brancardage souhaite mettre en place une formation obligatoire, « visant à re-professionnaliser l’intégralité des agents du brancardage ». Celle-ci porterait notamment sur les aspects juridiques de la fonction, ainsi que sur le volet physique, l’hygiène et les secours. «  Aujourd’hui, les brancardiers n’ont pas forcément conscience de toutes les obligations qui sont liées à leur fonction », souligne-t-il.

Bilan du côté du service de cardiologie

→ Rappel des règles d’identitovigilance. Un rappel de la procédure de vérification de l’identité du patient (vérification du bracelet au poignet du patient, au lit du patient, concordance des différents éléments du dossier, bracelets, patient) a été conduit très vite après l’événement, lors de la réunion mensuelle du service animée par le cadre de santé.

→ La réorganisation de la sectorisation. En amont de l’analyse des causes, le cadre de santé a soulevé la question de la réorganisation du service, qui était déjà à l’ordre du jour avant la survenue de l’erreur. « L’EI a clairement mis en lumière que l’organisation du service n’était pas sécuritaire, indique-t-il. Nous en avons discuté au sein de l’équipe et avons décidé de changer cette organisation. La méthode Alarm m’a permis de formaliser ce changement. » Désormais, le service est organisé en trois secteurs, avec un binôme IDE/AS par secteur. La quatrième infirmière, sur la tranche 10 h-17 h, ne s’occupe plus d’un secteur, mais vient en renfort sur les trois secteurs en gérant les entrées. « Il n’y a donc plus de passage d’informations à faire, explique le cadre de santé. Les soignants connaissent tous les patients de leur secteur puisque les entrées sont ventilées dans ces trois secteurs. »

→ Mise en place d’un outil simple de centralisation et communication de l’information. Les entrées et sorties des patients du service de cardiologie étaient jusque là gérées au moyen d’un tableau à feutre, sur lequel les informations étaient inscrites (et effacées) à la main (nom des patients, numéros de chambres, etc.). À la suite de l’erreur d’identité, le cadre de santé introduit un nouvel outil, très simple : un tableau à double porte et fiches en T. « Désormais, tous les patients entrants sont matérialisés par une fiche, décrit le cadre, et chaque soignant se positionne sur son secteur au moyen d’une étiquette. Quand le brancardier vient chercher un patient, il consulte le tableau et sait à quel soignant s’adresser. C’est une manière de sécuriser l’identitovigilance, d’identifier les personnes ressources sur les secteurs, et d’obtenir d’autres informations utiles notamment au brancardage. Ce type d’outil nous permet d’être opérationnels et efficients et garantit la qualité et la sécurité des soins. »

→ Sensibilisation à la distance professionnelle et à la déclaration d’événement indésirable. Le cadre de santé estime que l’un des facteurs en jeu dans l’événement indésirable a été la perte de distance professionnelle des agents. « À force de travailler les uns avec les autres, la distance nécessaire s’est étiolée, développe-t-il. Une connivence et une certaine désinvolture s’est installée. S’il y avait eu cette distance, peut-être que les agents ne se seraient pas fait confiance mutuellement. J’ai donc sensibilisé les équipes à cette question de la distance professionnelle. C’est, à mon sens, l’un des maillons qui a dysfonctionné. » Le cadre de santé a en outre rappelé à son équipe, notamment lors des entretiens individuels, l’importance d’informer le cadre sur la survenue d’un événement indésirable : « Il y a un travail à faire sur le lien de confiance et de proximité avec le cadre de santé. Cela a été pointé comme objectif à poursuivre lors des entretiens individuels d’évaluation. »

1- La méthode Alarm (Association of litigation and risk management) consiste, lorsqu’un événement indésirable survient : à reconstituer la chronologie des faits ayant conduit à l’événement, identifier dans cette description les défauts de soin ; conduire pour chaque défaut de soin identifié une analyse des facteurs ayant favorisé sa survenue ; rédiger une première synthèse ; reprendre l’investigation si des zones d’ombre persistent ; rédiger un rapport final préconisant des actions correctives.

RÉFLEXION

Traçabilité et informatisation

→ L'événement indésirable d'identitovigilance soulève chez les professionnels une réflexion plus globale sur la traçabilité de l'identité patient au sein de l'établissement, notamment au niveau du transport interne. « L'identité du patient qui nous parvient lors d'une demande de transport par un service est rarement complète, pointe le cadre du brancardage. Nous avons un nom, mais rarement un prénom et une date de naissance, contrairement à ce qui devrait se faire. C'est un dysfonctionnement sur lequel il faudrait travailler, mais qui est transversal à l'ensemble des services. À mon niveau, mon objectif à court terme est que la liste du brancardier comporte à chaque fois les nom, prénom et date de naissance des patients à transporter. »

→ Autre piste de progrès souhaitée : l'informatisation de la gestion du transport. « Nous travaillons sur des listes manuscrites et une communication orale (appels téléphoniques) qui sont sources d'erreurs. Il faudrait informatiser cette gestion avec un logiciel métier. Le projet est attendu par le service depuis quelques années, mais sa budgétisation coince. » Le cadre du brancardage procède par ailleurs lui-même, quotidiennement, à la saisie informatique des données de transport recueillies à travers les listes de ses agents (nombre de brancardages service par service, et entre services), y compris les dysfonctionnements et anomalies (refus patient, patient pas prêt, transport annulé, patient inconnu, décédé ou sorti, etc., soit près de 400 anomalies sur un mois, correspondant à autant de plages d'examen non utilisées, car non libérées). « Nous sommes le seul service à pouvoir recueillir ces données, souligne le cadre. D'où notre place centrale : nous travaillons dans l'ombre, mais nous avons un rôle clé. »

L'informatisation permettrait, selon lui, un gain de temps dans la compilation de ces données qui sont par ailleurs précieuses pour le pilotage de l'activité brancardage et de l'ensemble des services.

TÉMOIGNAGES

« Nous avons, chacun, fait sauter une barrière »

Les professionnels impliqués dans l’erreur d’identité ont pris conscience de sa gravité potentielle. Ils reconnaissent l’importance d’en tirer un retour d’expérience au bénéfice de l’ensemble des équipes.

→ Le brancardier : « Ce jour-là, j’ai commis une erreur. Elle a pu heureusement être rattrapée. Mais cet incident m’a fait prendre conscience que même si l’on est dans une routine que l’on maîtrise, il faut redoubler d’attention. Il y a eu un enchaînement de circonstances : quand je suis arrivé dans la chambre, le patient n’était pas dans son lit, mais aux toilettes. Ensuite, la présence de l’aide-soignante et de l’infirmière pour préparer le patient a fait que je n’ai pas procédé aux habituelles vérifications. Chacun a une part de responsabilité dans ce qui s’est passé, et nous l’avons tous assumé. L’événement ne m’a pas traumatisé, mais m’a fait me remettre en question et réfléchir notamment sur la manière de mieux communiquer avec l’équipe soignante. »

→ L’aide-soignante : « Nous avons, chacun, fait sauter une barrière. Il y a d’abord eu un quiproquo sur le numéro de la chambre. Ensuite, avec l’infirmière, nous avons rejoint le brancardier dans la chambre où il se trouvait, sans faire attention que ce n’était pas la bonne. Le patient n’était pas prêt pour le bloc. Du coup, tout s’est fait dans la précipitation. Cet incident nous a perturbés toute la journée. C’était la première fois que cela nous arrivait. Mais lors de la réunion d’analyse des causes, on nous a fait ressentir qu’il ne s’agissait pas d’incriminer telle ou telle personne, mais de mettre des choses en place pour que cela ne se reproduise pas. C’est l’ensemble du service qui a été marqué par l’événement et sensibilisé. Et désormais, nous vérifions plutôt deux fois qu’une les bracelets des patients. »

→ L’infirmière : « Après l’incident, nous n’étions pas à l’aise. Pris de culpabilité, nous nous sommes excusés longuement auprès du patient qui s’est montré compréhensif. Nous n’en avons pas parlé à notre cadre, car nous étions surtout dans le soulagement que ça ne soit pas allé plus loin et que l’erreur aie été rattrapée avant la descente au bloc. Par la suite, nous avons beaucoup échangé avec le cadre. En tant que soignants, nous nous étions remis en question. L’erreur d’identité peut avoir de lourdes conséquences. Même dans un contexte de “rush”, il faut être très attentif. Aujourd’hui, j’ai changé de service. Mais avant de quitter la cardiologie, je m’étais mise à systématiquement accompagner le brancardier jusqu’à la chambre du patient. Ce qu’on ne fait pas toujours, car on est souvent en soins auprès d’un patient et il est compliqué de s’interrompre. L’important, c’est que notre erreur à tous les trois puisse, grâce à de nouveaux outils, permettre que ça ne se reproduise pas. »