Autour de l’annonce - Objectif Soins & Management n° 241 du 01/12/2015 | Espace Infirmier
 

Objectif Soins n° 241 du 01/12/2015

 

Actualités

Olivier Blanchard  

Congrès Lors du deuxième congrès de la médecine de la personne, organisé par l’Observatoire francophone de la médecine de la personne, qui s’est tenu à Poitiers (Vienne) les 20 et 21 novembre, des soignants ont croisé leur vécu sur le moment singulier de “l’annonce” au patient.

Pendant une pathologie, les annonces sont multiples, note en premier le médecin généraliste Eloi Piketty. En prenant l’exemple d’un de ses patients qui découvre qu’il est atteint du VIH, il décompte ainsi sept annonces qui se sont succédé depuis celle de la pathologie au patient, celle de la pathologie à ses proches… jusqu’à l’annonce des conséquences de cette pathologie dans la vie privée du patient. L’annonce circule donc dans les deux sens : du soignant au patient (le diagnostic…) ou du patient au soignant (un choix thérapeutique ou un changement de vie personnelle). Mais le Dr Piketty note aussi que la plupart de ces annonces n’en sont pas vraiment. Pour illustrer son propos, il passe alors une série de photos, prises dans les hôpitaux ou dans des salles d’attente, qui montrent que l’espace où se retrouve le patient, par son simple balisage (“oncologie”, “hématologie”…) ou par les messages de prévention et de conseil qui y sont exposés (“vivre avec un cancer”…), est déjà en soi extrêmement clair. Au risque même de faire l’humour noir comme lorsqu’un panneau indique dans la même direction la pharmacie… et les chambres mortuaires.

Se taire pour annoncer

Le Dr Laurent Montaz, chef du service de soins palliatifs au CHU de Poitiers, se demande, lui, si “parler” est suffisant pour “annoncer”. Car, en plus de parler, cela demande de réconforter, d’écouter, d’échanger et donc paradoxalement… de savoir se taire. Il conseille aussi de faire les annonces avec plusieurs professionnels pour éviter de répéter un diagnostic plusieurs fois mais aussi pour qu’un consensus se fasse autour de ce qui a été dit et de quelle manière. Annoncer est donc primordial car c’est commencer à traiter, à dire au patient qu’on ne l’abandonne pas. Ce serait comme transformer le soignant en guide de haute montagne pour aider le patient à passer les étapes périlleuses de sa pathologie, mais un guide qui collabore et accepte que ce soit aussi le patient qui choisisse parfois son chemin.

Fin de vie

Lors de ce congrès, le député-maire de Poitiers, Alain Claeys, est venu présenter le projet de loi sur la fin de vie qu’il a écrit avec Jean Leonetti et qu’il défend actuellement au parlement. Lors des consultations qui ont précédé le travail sur cette loi, le député dit avoir vu émerger deux questions prioritaires de la part du grand public : il veut être entendu sur le choix de sa fin de vie et il souhaite une fin de vie apaisée. La loi a donc été rédigée dans ce sens, pour donner de nouveaux droits aux patients, mais sans priver les médecins de leurs prérogatives. Le texte de loi s’articulerait donc autour de deux idées essentielles : la première est de donner un cadre légal à des directives anticipées contraignantes, formulées soit par le patient, soit par une personne de confiance. La deuxième est de rendre possible la sédation profonde et continue jusqu’au décès, sur demande du patient, lorsque le pronostic vital est engagé, que la prolongation de la vie est inutile ou que la douleur est réfractaire au traitement. Cette mesure pourra s’accompagner aussi d’un arrêt de tout traitement de survie en accord avec les précédentes lois Kouchner de 2002. « Ce texte est à la fois simple et compliqué, et je sais aussi qu’il ne va pas clore le débat entre faire mourir et laisser mourir. Mais je pense qu’il faut franchir cette étape », conclut Alain Claeys.