La dégénérescence maculaire liée à l’âge - L'Infirmière Libérale Magazine n° 333 du 01/02/2017 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Libérale Magazine n° 333 du 01/02/2017

 

Ophtalmologie

Cahier de formation

Le point sur

Nathalie Belin  

La DMLA est la première cause de cécité après 65 ans dans les pays occidentaux. L’éducation du patient est indispensable dès les stades précoces de la maladie.

La dégénérescence maculaire liée à l’âge (DMLA) est une maladie dégénérative rétinienne chronique qui atteint la macula, région centrale de la rétine jouant un rôle dans la vision précise et celle des couleurs. Débutant après 50/55 ans, sa prévalence augmente avec l’âge pour atteindre environ 15 % de forme grave après 80 ans.

La maladie est multifactorielle. Une prédisposition génétique semble être au premier plan ; l’origine ethnique intervient également (prévalence plus forte chez les sujets de peau blanche). Le tabac est le principal facteur de risque environnemental.

Différentes formes cliniques

La maculopathie liée à l’âge (MLA) est la forme “précurseur” de la maladie, sans retentissement visuel, au cours de laquelle se constituent des drusen (dépôts de lipides et de protéines s’accumulant sous la rétine au niveau de la région maculaire), uniquement visibles au fond d’œil. L’évolution se fait ensuite lentement vers le stade de DMLA avéré dont il existe deux formes.

→ La forme sèche ou atrophique se traduit cliniquement par une perte très progressive de la vision (gêne dans la lecture, l’écriture…) à la suite de l’apparition d’un scotome central (tache noire au centre du champ visuel).

→ La forme néovasculaire (dite également “humide” ou “exsudative”) se caractérise par le développement de néovaisseaux choroïdiens sous la rétine. Elle peut induire une baisse très rapide de la vision en quelques semaines, avec déformation des images (métamorphosie) et apparition d’un scotome central.

Une DMLA atrophique peut évoluer vers une DMLA exsudative, et inversement.

Diagnostic

→ Le fond d’œil met en évidence les drusen (stade MLA), des zones d’atrophie (forme atrophique), ou des hémorragies et/ou exsudats (forme exsudative).

→ Outre la mesure de l’acuité visuelle, les métamorphosies (le patient voit des lignes déformées en regardant des lignes droites) sont évaluées à l’aide de la grille d’Amsler.

→ La tomographie en cohérence optique permet de mieux différencier les différentes formes cliniques : elle objective les phénomènes exsudatifs au niveau de la macula et, dans les formes atrophiques, met en évidence une épaisseur réduite de la macula. Elle ne requiert pas d’injection de colorant, à la différence de l’angiographie rétinienne (injection de fluorescéine ou de vert d’indocyanine dans une veine périphérique).

Selon les lésions, leur taille et leur nombre, on classe la maladie en différents stades.

Prise en charge

Stades précoces

→ L’arrêt du tabagisme est essentiel. La photoprotection est recommandée et des conseils diététiques visant à enrichir son alimentation en fruits et légumes sont formulés.

→ L’intérêt d’une supplémentation vitaminique renfermant de fortes doses d’antioxydants (vitamine C, zinc, vitamine E et caroténoïdes, lutéine et zéaxanthine) a été mis en évidence au stade de DMLA modérée : elle limite la progression de la maladie vers des formes avancées et, en cas d’atteinte unilatérale, limite le risque d’atteinte de l’autre œil. Le rôle protecteur des oméga 3 a aussi été mis en avant. Aucun des compléments alimentaires commercialisés ne renfermant les fortes doses d’antioxydants utilisées dans les études, le choix de la supplémentation doit être guidé par le médecin. Attention à l’automédication : certaines références, notamment vendues sur Internet, peuvent contenir du bêtacarotène, contre-indiqué chez les fumeurs ou anciens fumeurs (moins d’un an) en raison d’un risque accru de cancer du poumon.

→ L’éducation du patient est indispensable, avec notamment la nécessité d’une autosurveillance afin de dépister l’apparition ou la modification des métamorphosies.

Stades avancés

→ Forme atrophique : aucun traitement médicamenteux n’est disponible. Lorsque la baisse d’acuité visuelle devient importante, la prise en charge repose sur la rééducation basse vision et les systèmes optiques (systèmes grossissants…).

→ Forme néovasculaire : elle bénéficie d’un traitement reposant sur les injections intravitréennes d’anti-VEGF (facteur de croissance de l’endothélium vasculaire) : ranibizumab (Lucentis), aflibercept (Eylea) et bévacizumab (Avastin) en recommandation temporaire d’utilisation. Les injections sont mensuelles en début de traitement puis espacées en fonction de la réponse clinique. Dans tous les cas, le traitement est d’autant plus efficace qu’il est débuté précocement.

La photothérapie dynamique est réservée à certaines formes agressives de DMLA. Elle est parfois combinée à une injection d’anti-VEGF. Elle se pratique en deux étapes : injection en perfusion intraveineuse de dix minutes de vertéporfine (Visudyne), molécule photosensibilisante qui a une forte affinité pour les cellules à prolifération rapide, en particulier l’endothélium des néovaisseaux choroïdiens ; puis activation par un rayonnement laser infrarouge provoquant une réaction photochimique qui entraîne l’occlusion des néovaisseaux.

Conseils aux patients

Concernant les traitements

→ Injection d’anti-VEGF : une appréhension avant la première injection est fréquente. Rassurer en expliquant qu’il s’agit d’un geste courant, rapide et non douloureux car effectué sous anesthésie locale. Dans les jours suivant l’injection, l’apparition de douleurs ou d’une gêne oculaire, l’aggravation de la rougeur ou des troubles de la vision ou encore une augmentation de la sensibilité à la lumière doivent amener à consulter l’ophtalmologiste.

→ Après thérapie photodynamique : les patients restent photosensibles durant 48 heures et doivent, durant ce laps de temps, porter des vêtements protecteurs (les écrans UV ne sont pas suffisamment efficaces) et des lunettes de soleil haute protection. Les lumières de forte intensité (lampes halogènes très lumineuses…) doivent être évitées.

Hygiène de vie

→ Encourager l’arrêt du tabac, une alimentation équilibrée et une activité physique régulière pour lutter contre l’excès de poids et les dyslipidémies susceptibles de favoriser ou d’aggraver la DMLA. Une alimentation riche en oméga 3, notamment ceux présents dans les poissons gras (thon, maquereau, saumon, sardine…) et en caroténoïdes (choux, brocoli, épinard, courgette…), est recommandée.

→ Protéger ses yeux de tout éblouissement (lunettes de soleil, chapeau).

→ Réorganiser l’espace de vie pour éviter les chutes : enlever les tapis, rallonges électriques, etc.

Autosurveillance et signes d’alerte

En cas de DMLA exsudative, une autosurveillance hebdomadaire à l’aide de la grille d’Amsler (ou, à défaut, une grille de mots croisés ou une page d’un cahier) est recommandée. Elle est également conseillée de manière régulière chez les patients atteints d’une forme atrophique. Une baisse brutale de l’acuité visuelle, une déformation des lignes ou des images, l’apparition d’une tache dans le champ visuel doivent amener à consulter en urgence (ophtalmologiste ou service hospitalier d’urgence).

Prévention

Une visite de contrôle chez son ophtalmologiste vers 50, 55 ans, ou même avant en cas d’antécédents familiaux de DMLA, est recommandée.

Pour en savoir plus : www.association-dmla.com

L’auteur déclare ne pas avoir de lien d’intérêts.