LES INFIRMIÈRES À BOUT - L'Infirmière Magazine n° 346 du 01/06/2014 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Magazine n° 346 du 01/06/2014

 

RÉPUBLIQUE DÉMOCRATIQUE DU CONGO

ACTUALITÉ

ADRIEN RENAUD  

Réclamant le versement de leurs primes de risque, les infirmières du Nord-Kivu, en grève depuis 7 mois, refusent désormais de vacciner les enfants.

Les habitants de la province du Nord-Kivu, à l’est de la République démocratique du Congo, sont habitués à n’avoir accès aux soins que de manière épisodique : leur région est en guerre depuis le milieu des années 90. La défaite des rebelles, en octobre dernier, a fait naître l’espoir de retrouver un système de santé normal.

C’était sans compter la grève des infirmières des centres de santé publics qui, déclenchée un mois après, n’a toujours pas faibli. En cause, le non-paiement des primes dues au personnel paramédical.

D’après les acteurs du dossier interrogés par L’Infirmière Magazine, il s’agirait d’un détournement de fonds : versé par le ministère de la Santé aux autorités provinciales, l’argent n’est jamais arrivé dans l’escarcelle des soignants. Depuis novembre 2013, pour obtenir leur dû, ces derniers refusent donc d’être supervisés, ne transmettent plus les rapports et ne participent plus aux activités de formation. N’ayant pas été entendus, ils boycottent, depuis mars, les actions de prévention. Le Dr Dominique Baabo, médecin-inspecteur du Nord-Kivu, sonne l’alarme : « C’est vraiment dangereux pour les populations. » Ce haut responsable sanitaire pointe, notamment, les risques pour les enfants, qui ne sont plus vaccinés, et pour les femmes, dont les grossesses ne sont plus suivies.

Faible rémunération

Georges Kamala, du Syndicat national des cadres, agents et employés des secteurs des services, est conscient de tous ces problèmes et souligne que « la grève est une arme extrême que l’on utilise que quand on est face à des personnes qui n’écoutent pas ». La disparition de leurs primes n’est que la goutte d’eau faisant déborder le vase. Leur mécontentement est, avant tout, lié à leur faible niveau de rémunération. Ceux qui ont un salaire gagnent, en moyenne, 40 euros par mois, selon le Dr Baabo. Les autres doivent se contenter des primes (environ 5 euros). Il y a même une partie du personnel qui doit survivre avec les maigres sommes payées par les patients. Dans l’urgence, les autorités sanitaires ont tenté de monter des sites provisoires de vaccination, en mobilisant des médecins, des infirmières au chômage ou des employés du secteur privé. Mais, il s’agit d’actions ponctuelles qui ne peuvent être pérennisées. Pour le Dr Baabo, « il n’y a qu’une solution : il faut mobiliser l’argent pour payer ce qui n’est pas payé ».