L'infirmière Magazine n° 346 du 01/06/2014

 

BASSE-NORMANDIE

ACTUALITÉ

RÉGIONS

SOPHIE KOMAROFF  

Depuis novembre dernier, trois IDE expérimentent un dispositif d’appui à la coordination des soins, financé par l’Agence régionale de santé (ARS).

À la croisée des secteurs médical et social, trois infirmiers mènent, depuis quelques mois, une mission de coordination d’appui de proximité, destinée aux patients en situation complexe ou perdus dans le parcours de soins. L’expérimentation, prévue pour durer un an, est portée par le Réseau de santé du Bessin, à Bayeux, et par les associations Revivre, dans l’agglomération de Caen, et l’Adseam dans la communauté de communes de Cherbourg. Chaque projet est financé à hauteur de 75 000 euros par l’ARS de Basse-Normandie.

Légitimité

Le rôle de ce trio de choc consiste à accompagner les personnes dont la situation est complexe au plan médical – avec l’association de plusieurs maladies non équilibrées depuis plusieurs mois –, ou sur le plan médico-psycho-social : isolement, précarité, difficulté à recourir aux soins, etc.

Ces IDE apportent un appui au médecin généraliste, ainsi qu’aux différents intervenants. « En ville, le centre de coordination est, en principe, le médecin traitant. Or, celui-ci n’a pas forcément le temps ni la connaissance nécessaire du réseau, indique Anne Kamel, médecin à la direction de la santé publique de l’ARS de Basse-Normandie. Le coordinateur accompagne physiquement et psychologiquement le patient et le met en relation avec les travailleurs sociaux. »

La coordination d’appui n’a pas vocation à se substituer aux dispositifs existants. Les trois infirmiers effectuent surtout un important travail d’orientation. « Ils ont été choisis pour leur bonne connaissance du territoire et de ses acteurs, leurs qualités relationnelles et leur pragmatisme, poursuit Anne Kamel. Leur formation initiale leur confère, en outre, une légitimité auprès des professionnels de santé. »

En pratique, les demandes adressées à la coordination d’appui aux soins émanent des médecins traitants ou des travailleurs sociaux. L’IDE évalue la situation du patient sur son lieu de vie (domicile, foyer, rue, etc.) et recense les aides techniques et financières auxquelles celui-ci peut prétendre. « Cette étape, qui dure deux mois environ, est indispensable pour mettre en place un projet réaliste et réalisable, qui suscite l’adhésion du patient, explique Laurent Denans qui, en six mois, comptabilise 52 demandes et 33 patients suivis. Ces semaines permettent aussi de tisser des liens de confiance. »

La plupart des patients suivis par Laurent Denans sont sans domicile fixe. Un milieu que ce dernier a appris à connaître en tant qu’infimier de la maraude du Samu social de Caen, de 2009 à 2013. C’est d’ailleurs lui qui a été à l’origine de la mise en place d’un poste dédié à la coordination. « Les sans-abri n’ont généralement pas de médecin, souligne-t-il. Je prends donc rendez-vous avec un praticien et j’assiste aux consultations. Cela me permet d’expliquer ce que dit le médecin à la personne et de mettre en place la prescription. »

Le retour à l’autonomie

L’infirmier-coordinateur intervient à plusieurs niveaux : observance du traitement, accompagnement des patients angoissés par les examens ou lors de l’établissement du diagnostic, introduction des intervenants auprès du bénéficiaire des soins… « À moins qu’un acte ne permette de tisser un lien difficile à instaurer, ces infirmiers n’effectuent pas de soins techniques », précise Anne Kamel.

Une fois le plan personnalisé de santé établi, l’IDE accompagne le patient jusqu’à son autonomie dans la prise en charge, ou passe le relais à un dispositif existant (secteur psychiatrique, Conseil général, hôpital, etc.). « Le rapprochement du social et du médical est au cœur de ce travail, ce qui le rend enrichissant », conclut Laurent Denans.