PUBLIC CONTRE PRIVÉ, DÉBUT DES HOSTILITÉS - L'Infirmière Magazine n° 295 du 15/02/2012 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Magazine n° 295 du 15/02/2012

 

PRÉSIDENTIELLE

ACTUALITÉ

La Fédération hospitalière de France et celle de l’hospitalisation privée s’affrontent à coups de déclarations chocs, dans l’espoir de se faire entendre par les candidats à la présidentielle.

À trois mois de l’élection présidentielle, la hache de guerre est déterrée entre hôpitaux publics et structures privées. Désireuses de se faire entendre sur la place publique, la Fédération hospitalière de France (FHF) et la Fédération de l’hospitalisation privée (FHP) ont présenté leurs propositions respectives en matière de santé. Petit florilège de campagne…

« Les pieds dans le plat »

La première à avoir dégainé a été la FHF. Le 11 janvier dernier, en présentant sa plate-forme de propositions, elle a, selon son délégué général, Gérard Vincent, « décidé de mettre les pieds dans le plat ». En matière de lutte contre les déserts médicaux, la FHF propose ainsi « qu’en cas de carence constatée », les hôpitaux soient « autorisés à organiser (…) le maintien d’une offre de soins ambulatoires » – bref, que l’hôpital gère cabinets de ville et maisons de santé désaffectés – et que les libéraux s’installant en zone excédentaire « ne bénéficient, au mieux, que d’un conventionnement en secteur 1 ». Des suggestions qui ont fait bondir les médecins libéraux. Mais ceux-ci ne sont pas les seuls dans le viseur de la FHF, qui propose aussi de rompre avec l’objectif de convergence tarifaire avec les cliniques privées prévu pour 2018, au motif qu’elle est « dangereuse pour le service public ». « La moitié du chiffre d’affaires des cliniques est réalisé avec 17 tarifs (…) les plus rentables, sur un total de 2 300 », a avancé Gérard Vincent, arguant que missions du public et du privé n’étaient « pas comparables ». La FHF milite, qui plus est, pour la réforme du financement des hôpitaux, via l’assouplissement de la T2A. Après avoir défendu sa mise en place, la FHF juge, en effet, que la T2A « ne peut plus servir de socle principal de financement » parce qu’elle incite à multiplier les actes pas toujours pertinents, et qu’elle n’est « plus adaptée aux exigences de santé publique : prise en charge des malades chroniques, des précaires… »

Contre « le gaspillage »

Pas en reste de petites phrases assassines, la FHP a répondu, le 26 janvier, par une conférence de presse décriant « les gaspillages et la gabegie » des hôpitaux publics. Rapports de la Cour des comptes à l’appui, la fédération a dénoncé le manque d’ambitions réformatrices du secteur public « plongé dans une culture de déficit », relevant que 41 % des hôpitaux publics étaient déficitaires en 2010, sans oublier de souligner l’absentéisme des personnels hospitaliers publics (24 jours par an selon la FHP, un chiffre réfuté par Gérard Vincent, pour qui ces 24 jours incluent, notamment, les arrêts maternité). Très remonté, le président de la FHP, Jean-Loup Durousset, a dénoncé l’écart de traitement entre hôpitaux publics et établissements privés : « Nous, nous sommes mortels, alors que dans le public, il y a toujours l’État pour combler le déficit. » « Pour une même prestation, les cliniques continuent d’être remboursées 22 % de moins, en moyenne, que les hôpitaux publics », a-t-il avancé (17 % selon la FHF), avant de demander, en guise de mesure choc, la mise sous tutelle des hôpitaux publics déficitaires, proposant même que les cliniques privées assurent leur gestion.

Le soir même, la FHF réagissait, dénonçant « les attaques indécentes et provocatrices de la FHP ». La bataille fait rage. Mais les candidats à la présidentielle l’entendent-ils ? Pas sûr, car, pour le moment, la santé est peu présente dans leurs ébauches de programme.