En quête d’un bail qui m’aille - L'Infirmière Libérale Magazine n° 299 du 01/01/2014 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Libérale Magazine n° 299 du 01/01/2014

 

LOCAL PROFESSIONNEL

Votre cabinet

GENEVIÈVE BELTRAN*   VÉRONIQUE SOKOLOFF**  

Depuis le décret du 16 février 1993 – vingt ans déjà –, l’infirmière libérale doit obligatoirement disposer d’un cabinet professionnel. Mais avant de s’engager, notamment dans une location, quelques rappels s’imposent.

Affecter le bien à l’exercice d’une activité professionnelle

Avant même de penser au bail et de s’installer dans un appartement, il convient de s’assurer que l’exercice d’une profession libérale y est administrativement possible. Le bien doit être affecté à l’exercice d’une activité professionnelle. S’il ne l’est pas, il est possible de demander un changement d’usage des locaux à usage d’habitation pour en faire un usage professionnel. Dans les communes de plus de 200 000 habitants et dans les départements des Hauts-de-Seine, du Val-de-Marne et de la Seine-Saint-Denis, ce changement est soumis à l’autorisation préalable de la mairie de la commune où est situé l’immeuble. Cette autorisation n’est pas requise dans les zones franches urbaines.

Le maire peut autoriser soit un changement total d’usage des locaux d’habitation, soit un changement partiel d’usage des locaux pour permettre l’exercice de la profession dans le local d’habitation. Le maire qui donne son autorisation peut imposer en parallèle, par compensation, la transformation en locaux d’habitation de locaux affectés à l’origine à un autre usage.

À Paris, aucune compensation n’est exigée pour le changement d’usage de locaux en rez-de-chaussée, ou de locaux d’une surface inférieure à la moitié des locaux d’habitation. La demande est faite par le propriétaire ou par le locataire après obtention de l’accord de son propriétaire. En cas de refus, le maire doit motiver sa décision. Mais, attention : l’autorisation est donnée à la personne qui exerce et non au local. Elle doit être renouvelée en cas de changement de locataire ou de propriétaire.

Vérifier le contenu du règlement de copropriété

Le règlement de copropriété peut interdire la commercialité ou l’usage professionnel dans l’immeuble. En pratique, il contient souvent une clause d’habitation bourgeoise. Dans ce cas, les tribunaux considèrent que l’exercice d’une profession libérale n’est pas interdite. Dès lors que le règlement de copropriété autorise les activités professionnelles, il doit aussi autoriser l’apposition de plaques. Toutefois, a été reconnue licite par la jurisprudence la clause qui, sans interdire l’apposition de plaques, détermine l’endroit où elles pourraient être placées.

Parfois, le règlement de copropriété ne permet l’exercice d’une profession que dans certaines parties de l’immeuble (locaux du rez-de-chaussée, par exemple) ou impose une autorisation préalable de l’assemblée générale des copropriétaires.

Par ailleurs, la fermeture de la porte d’entrée tend à se généraliser. Si l’assemblée générale des copropriétaires refuse de laisser l’immeuble ouvert aux jours et heures de l’exercice professionnel, le copropriétaire concerné peut saisir le tribunal de grande instance du lieu de situation de l’immeuble dans un délai de deux mois à compter de la notification de la décision refusant de laisser la porte d’entrée de l’immeuble ouverte.

Soigner le contenu du bail professionnel

Le bail professionnel est régi par l’article 57 A de la loi n°86-1290 du 23 décembre 1986, et à titre supplétif par les dispositions du Code civil. Le statut des baux professionnels s’applique aux locaux dans lesquels sont exercées des activités de nature exclusivement professionnelle.

→ Clauses obligatoires

Un bail professionnel est obligatoirement écrit. Il est impérativement conclu pour une durée au moins égale à six ans. Le propriétaire ne peut pas le résilier avant son terme. En revanche, le locataire peut, à tout moment en cours de bail, notifier au bailleur son intention de quitter les locaux en respectant un délai de préavis de six mois, par lettre recommandée avec accusé réception (AR) ou par acte d’huissier. Au terme du contrat, le bail est reconduit tacitement pour la même durée. Cependant, si le bailleur souhaite reprendre le local, il doit notifier au locataire, par lettre recommandée avec AR, ou par exploit d’huissier, son intention de ne pas renouveler le bail. Le locataire ne peut pas se prévaloir d’un droit au renouvellement. En cas de non-renouvellement du bail par le bailleur, le locataire n’a droit à aucune indemnité. De plus, le bailleur peut relouer son local à qui bon lui semble, et notamment à un professionnel exerçant également l’activité d’infirmière. Certes, il peut être tentant de faire insérer une clause l’interdisant au bailleur, mais il y a peu de chance que ce dernier soit d’accord pour restreindre ainsi sa liberté. Il est également recommandé d’obtenir la précision, dans le bail, que, lors du départ du professionnel, une plaque de transfert indiquant les nouvelles coordonnées pourra être installée, et ce, pendant une durée qu’il conviendra de fixer au préalable.

→ Clauses à négocier

Le loyer est déterminé librement par les parties lors de la conclusion du bail. Il peut être indexé. Le dépôt de garantie est également librement fixé par les parties.

Attention : il est préférable d’éviter de ne pas payer les derniers loyers pour récupérer la caution ! Rien n’empêcherait le propriétaire d’utiliser le dépôt de garantie pour financer les travaux de remise en état et d’intenter une action en justice pour exiger les loyers impayés, voire davantage si le montant des travaux dépasse celui du dépôt de garantie.

Pour les charges et les réparations, il est suggéré de se référer aux listes fixées par les décrets du 26 août 1987 qui énumèrent les charges et réparations récupérables par le propriétaire sur son locataire et normalement applicables aux locaux utilisés à usage d’habitation.

En principe, le locataire peut sous-louer, sauf si une clause du bail le lui interdit. En cas de sous-location, le locataire principal demeure tenu envers le bailleur de l’exécution des obligations dérivant du bail, comme s’il occupait lui-même les locaux. Cependant, pour éviter tout litige ultérieur, il est préférable de s’assurer que la sous-location est autorisée par le bailleur et sous quelles conditions. De même, le professionnel peut céder son bail si aucune clause ne l’interdit. Une clause du bail peut prévoir des conditions particulières comme l’agrément préalable du successeur par le bailleur ou la rédaction d’un acte authentique.

Depuis le 1er janvier 2010, les conflits portant sur un bail professionnel sont soumis au tribunal de grande instance.

AU CHOIX Le bail commercial

La loi de modernisation de l’économie du 4 août 2008 a autorisé les parties qui relèvent en principe des baux professionnels à se placer conventionnellement sous le régime des baux commerciaux, sous réserve de le mentionner explicitement dans le contrat. Il en résulte que le preneur ne pourra pas donner congé à tout moment avec un préavis de six mois, comme cela est la règle pour les baux professionnels. Toutefois, cette possibilité ne semble pas vraiment attirer les propriétaires, tant le régime des baux commerciaux reste par bien des aspects dissuasif.