Secteurs public et privé réclament leur dû - Objectif Soins & Management n° 0298 du 12/03/2024 | Espace Infirmier
 

OBJECTIF SOINS n° 0298 du 12/03/2024

 

financement des établissements

ACTUALITÉS

Claire Pourprix

  

À quelques semaines des arbitrages tarifaires pour 2024, les représentants hospitaliers ont alerté le gouvernement sur l’ampleur des déficits des établissements et leurs attentes pour faire face à des situations économiques très dégradées.

Un déficit cumulé de 1,2 milliard d’euros fin 2023, soit trois fois plus que celui constaté en 2022 – qui pourrait atteindre 2 à 3 milliards pour l’ensemble des hôpitaux publics. Et une capacité d’autofinancement des CHU qui a chuté de 86 % : les conférences des directeurs généraux de CHU, des doyens des facultés de médecine et des présidents de commission médicale d’établissement de CHU se sont unies pour « alerter solennellement les pouvoirs publics sur la situation financière des 32 établissements hospitalo-universitaires ». Ils estiment dans un communiqué que « ces difficultés financières, peut-être les plus graves depuis la création des CHU en 1958, sont liées à des facteurs externes, qui viennent mettre en péril l’embellie constatée aujourd’hui sur le plan de l’attractivité et de la fidélisation des personnels soignants ou encore la baisse de l’absentéisme », et appellent à des « mesures d’urgence pour l’exécution 2023 et la mise en place d’une stratégie de financement à long terme pour continuer à investir, innover et éviter ainsi des conséquences très négatives sur les territoires desservis par les CHU ». Parmi les facteurs externes figurent : l’envolée des dépenses dues à l’inflation, un manque de financement de mesures du Ségur de la santé et la baisse des recettes consécutive à des fermetures de lits post-covid. Les conférences demandent donc la compensation de l’inflation et la restitution aux hôpitaux publics de la non-réalisation des dépenses votées par le Parlement à leur intention, estimée à 800 millions d’euros.

L’Ondam au cœur des calculs

Pour sa part, la Fédération hospitalière de France (FHF) a renouvelé sa « demande de restitution intégrale de la sous-exécution de l'Ondam aux hôpitaux publics dans le respect du principe de responsabilité financière ». Elle explique que les hôpitaux publics n’ont pas consommé l’intégralité de leur enveloppe de l’Objectif national de dépenses d'assurance maladie parce que « les tarifs d’hospitalisation complète, et notamment ceux de médecine et des prises en charge les plus lourdes ne sont plus adaptés à la réalité des prises en charge et des coûts. Ces hospitalisations complètes sont pourtant prioritaires en termes de santé publique, en particulier en vue de réduire la dette de santé publique cumulée pendant la crise sanitaire ». Un montant qui s’élève à 800 millions d’euros, dont 700 millions pour les hôpitaux publics « alors même que l’augmentation significative de l'activité s’accompagne d’une forte hausse des charges des établissements publics », déplore la FHF. Elle souligne par ailleurs qu’« une ponction de ces crédits d’une sous-exécution exclusivement constituée de crédits destinés aux établissements de service public au profit des établissements à but lucratif, qui ont déjà dépassé leur enveloppe de 400 M€, susciterait également l’incompréhension totale des équipes hospitalières publiques, fortement mobilisées pendant la crise sanitaire et les périodes de triple épidémie (…) et assumant l’essentiel des sujétions de la permanence des soins (…) ».

Quant à la Fédération de l’hospitalisation privée (FHP), elle rappelle dans un communiqué adressé au Premier ministre, à sa nomination, qu’« alors que la situation financière des établissements était déjà fragile, 2023 s’est caractérisée par une forte dégradation de celle-ci. 40 % des cliniques et hôpitaux privés ont été déficitaires en 2023, conséquence directe d’une construction de l’Ondam qui a sous-évalué la réalité de l’augmentation des prix à laquelle sont confrontés les établissements, particulièrement sur les coûts de l’énergie, et les projections 2024 sont préoccupantes, avec 1 établissement sur 2 qui serait déficitaire en l’absence de compensation financière à la hauteur des enjeux ».

Les fédérations hospitalières ont renouvelé leur demande de 1,5 milliard d’euro dans l’Ondam hospitalier, dont 1 milliard pour les hôpitaux publics selon la FHF et 669 millions pour le secteur privé selon la FHP. Dans l’attente des arbitrages financiers à venir, elles ont exprimé leur déception à l’issue du discours de politique générale du Premier ministre Gabriel Attal, le 30 janvier. Qui, bien qu’ayant fait de la santé un sujet prioritaire, n’a pas apporté de réponse à la question budgétaire.