Que devient la démocratie sanitaire ? - Objectif Soins & Management n° 244 du 01/03/2016 | Espace Infirmier
 

Objectif Soins n° 244 du 01/03/2016

 

Actualités

Véronique Hunsinger  

Fait divers C’est une démission qui a fait grand bruit dans le landerneau du monde de la santé et qui, au-delà d’un cas personnel, illustre sans doute aussi en partie les limites de la démocratie sanitaire.

Jeune haut fonctionnaire de 25 ans, Thomas Dietrich a démissionné avec fracas de son poste de secrétaire général de la Conférence nationale de santé (CNS), fin février.

Beaucoup de bruit

Une démission largement commentée dans la presse car le jeune homme a accompagné son geste de la mise en ligne d’une note d’une trentaine de pages, intitulée Démocratie en santé : les illusions perdues. Thomas Dietrich y dénonce l’interventionnisme du cabinet de la ministre dans les avis et propositions que doit rendre cet organisme consultatif indépendant. Ce baroud d’honneur contient donc des éléments qui mettent en lumière les ratés de l’exercice de la démocratie sanitaire.

L’indépendance de la CNS

Inconnue du grand public, la CNS est un organisme consultatif placé auprès de la ministre de la Santé pour lui soumettre avis et propositions et organiser des débats publics. Elle est composée de représentants des usagers, des partenaires sociaux, des collectivités territoriales et des offreurs de soins. Ainsi, dans ses derniers avis, la CNS s’est notamment opposée à un assouplissement de la publicité pour l’alcool. Or, selon Thomas Dietrich, elle subirait de fortes pressions. « Il fut exigé que je fasse relire les avis ou contributions par le cabinet de la ministre, préalablement à leur publication, dénonce-t-il dans sa note. Ainsi, le cabinet pourra expurger tous les passages qui lui sembleraient trop contestataires. »

Une démission au mauvais moment ?

Cette polémique intervient alors que la loi de santé prévoit la création d’une Union nationale des associations agréées d’usagers du système de santé ayant pour but de « donner des avis aux pouvoirs publics ». Les associations de consommateurs UFC-Que choisir et CLCV (Confédération de la consommation, du logement et du cadre de vie) ont déjà regretté le manque de pluralisme au sein du “comité technique” chargé de mettre en place cette nouvelle pièce du puzzle d’une démocratie sanitaire, de plus en plus complexe. « Blogosphère et presse écrite se relaient pour délivrer des analyses à l’emporte-pièce sur la démocratie sanitaire », a regretté pour sa part le Ciss.

Marisol Touraine a également mis sur rail un Institut pour la démocratie sanitaire, piloté par la Fédération hospitalière de France (FHF), le Ciss, collectif d’associations de patients, et l’École des hautes études en santé publique (Ehesp).