CHU DE GRENOBLE : TRISTE GOUVERNANCE - L'Infirmière Magazine n° 390 du 01/02/2018 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Magazine n° 390 du 01/02/2018

 

CONDITIONS DE TRAVAIL

ACTUALITÉS

FOCUS

Carole Tymen  

Dépêché auprès des équipes au lendemain du suicide d’un neurochirurgien, Édouard Couty a livré, début janvier, son rapport sur les conditions d’exercice dans l’établissement.

Outre le profond traumatisme créé dans les équipes concernées, il apparaît que l’évènement dramatique survenu le 2 novembre a révélé des défauts dans la gouvernance de l’institution qu’il convient de corriger rapidement. » Dans son rapport livré le 8 janvier à Agnès Buzyn, Édouard Couty n’a pas mâché ses mots à propos des politiques managériales du CHU de Grenoble. Après avoir entendu plus de 30 personnes, le médiateur national pointe « le fonctionnement institutionnel et le mode de management ». Notamment, « un décalage trop im portant entre le discours institutionnel et la réalité du terrain », un « management très orienté vers les problématiques budgétaires » et « une organisation et un management très centralisés, laissant peu d’autonomie aux acteurs sur le terrain ».

Un système de veille

Pour « résoudre les crises au sein des services identifiés », il préconise des mutations et transferts de postes, et une aide extérieure pour élaborer des projets de services. Il invite aussi à « préparer la venue des nouveaux responsables de service », à travers un accompagnement à leur prise de fonction. Édouard Couty recommande qu’une plus grande attention soit portée aux signaux d’alerte, par un système de veille, « de manière à anticiper les conflits ». Il souhaite faire évoluer le « style » du management car l’actuel « maintient de manière permanente une certaine pression sur les équipes et priorise le résultat mesuré à l’aune d’indicateurs d’activité et d’indicateurs de consommation de moyens ». Il doit ainsi « s’infléchir, sans laisser de côté l’aspect économique et financier, vers un management plus orienté sur la confiance, la bientraitance et aboutir progressivement à un mode de management plus participatif ».

Définir un plan d’action

Dans un communiqué, le conseil de surveillance du CHU bat sa coulpe : « Le conseil de surveillance a exprimé sa volonté de se saisir de ces circonstances pour modifier profondément le mode de gouvernance et retrouver une cohésion d’établissement forte ». Il assure que « le CHU a entendu la volonté exprimée par tous les membres de la communauté hospitalière, de construire un projet collectif ambitieux, afin d’améliorer les conditions de travail de tous les corps de métier, au service des patients. Tous les membres du conseil de surveillance sont d’accord pour définir un plan d’action qui soit élaboré par les acteurs de terrain, médicaux et non médicaux (soignants, médico-techniques, techni ques et administratifs) et soumis à une très large concertation et accompagné par une aide extérieure. » En revanche, pour la CFDT, « on peut mettre tous les accompagnements du monde et tous les effectifs nécessaires, si les mentalités ne changent pas, on ne peut rien faire », note son secrétaire.

Au lendemain de la publication du rapport, l’idée d’une intersyndicale regroupant les six organisations présentes au CHU s’est mise en route. Elle réalise un tract qui appelle à un moment d’échanges entre les personnels du CHU. Et où il serait notamment question des conditions de travail dégradées, de l’augmentation de la charge de travail. Un rendez-vous devait être demandé, en janvier, à la direction pour aborder les pistes de travail. « Elle accepte ou elle n’accepte pas, anticipe le secrétaire de la CFDT. Mais ce premier contact ne sera pas négociable. »

Dates clés

→ 2 novembre 2017 : suicide d’un neuro-chirurgien dans un bloc du CHU de Grenoble.

→ 3 novembre : mission confiée à Édouard Couty, médiateur national, pour établir un diagnostic sur la situation.

→ 28 novembre : restitution orale des premiers constats.

→ 8 janvier 2018 : diffusion du rapport.