Jamais loin de l’école grâce à Nao le robot - L'Infirmière Magazine n° 387 du 01/11/2017 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Magazine n° 387 du 01/11/2017

 

CANCER PÉDIATRIQUE

SUR LE TERRAIN

INITIATIVE

Géraldine Langlois  

Au centre Oscar-Lambret de Lille, les jeunes patients peuvent rester en contact avec leurs camarades et leur enseignant grâce à Nao, un robot humanoïde. Une évaluation est en cours depuis la rentrée 2017.

Nao mesure 58 cm et pèse 4,8 kg : c’est donc un petit bonhomme, blanc et rouge, au regard étrange. Il est arrivé dans le service d’oncologie pédiatrique du centre de lutte contre le cancer lillois Oscar-Lambret il y a peu de temps. Selon le Dr Anne-Sophie Defachelles, chef de l’unité d’oncologie pédiatrique, son utilisation est surtout pertinente lorsque les patients sont hospitalisés pour une longue durée, pour une autogreffe de cellules souches périphériques ou certains protocoles de chimiothérapie, longs ou qui contre-indiquent l’école pendant une période. Et plutôt pour ceux scolarisés en maternelle ou en élémentaire. Soit potentiellement une quinzaine d’enfants chaque année.

«  Nous nous préoccupons beaucoup de la situation scolaire des jeunes patients, indique le Dr Defachelles. Nous devons parfois lutter pour qu’ils continuent d’aller à l’école et observons un fort taux d’année sabbatique. » Car certains parents pensent protéger leur progéniture en ne les y envoyant pas et certaines écoles craignent parfois d’accueillir des enfants à la santé fragile.

Quand la société ERM Robotique a lancé un appel aux établissements sanitaires pour tester son robot humanoïde, le médecin a immédiatement proposé de l’accueillir dans son service. Le centre Oscar-Lambret est ainsi le seul établissement sanitaire en France à posséder le robot et à l’utiliser.

L’équipe a testé l’androïde pour la première fois début septembre, avec un des patients du service, Sacha, âgé de 5 ans et en grande section de maternelle. L’équipe a soigneusement préparé cette première utilisation (et fera de même à chaque fois). Elle a d’abord identifié le patient et demandé l’autorisation de ses parents avant de lui proposer.

Phase de préparation

Il a ensuite fallu obtenir l’accord de l’enseignante ainsi que toutes les autorisations nécessaires au près de l’Éducation nationale. Puis, «  accompagnée de l’enseignante spécialisée du service et la psychologue, je suis allée préparer la venue du robot dans la classe », raconte Sylvie Mercier, cadre de l’unité. Une étape très importante pour contextualiser la présence de la machine et préparer les élèves à voir leur camarade par le biais de l’écran fixé sur la tête de Nao. Elles ont parlé de l’hôpital, du cancer, des changements physiques que les traitements pouvaient provoquer… Elles ont montré «  un diaporama de Sacha à l’hôpital et avec Bill, notre poupée ventriloque, ajoute la cadre. Il a une perfusion et porte une perruque. Nous avons raconté son histoire aux enfants. » Les réactions et les questions des élèves ont été «  extraordinaires, très clairvoyantes », témoigne-t-elle. La psychologue les a aidés à exprimer leurs émotions au fur et à mesure… L’enseignante de l’école de Sacha (comme celle du centre Oscar-Lambret) a par ailleurs été formée à l’utilisation du robot par ERM Robotique. Avant l’utilisation, «  l’enseignante spécialisée de l’hôpital contacte l’institutrice de l’enfant, explique Sylvie Mercier. En fonction de son état, elles vont déterminer le moment où elles pourront connecter le robot. Cela ne peut pas durer une journée : une heure, c’est déjà beaucoup pour un enfant de 5 ans  », plus fatigable du fait de son traitement.

En direct de l’école

Une fois le robot connecté via le réseau 4G, il se lève de son siège et s’anime. Le téléphone fixé sur sa tête diffuse en direct un flux vidéo de Sacha dans la salle de classe de l’hôpital. Ses camarades se placent devant Nao, dont les yeux-caméras diffusent les images vers la tablette de Sacha, et lui disent bonjour. «  Si Sacha a envie de poser une question, il active le robot via sa tablette et lui fait lever la main », ajoute la cadre de santé. Il peut également exprimer des émotions en cliquant sur des émoticones.

Pour Anne-Sophie Defachelles, l’intérêt de Nao réside davantage dans le maintien du lien avec l’école que dans la participation aux apprentissages pédagogiques. Selon elle, «  il n’aide pas à guérir mais à mieux guérir, dans le sens où il permet aux enfants de se sentir mieux pendant le traitement et de retourner à l’école tout de suite après ».