RÉFORME DE LA FORMATION, UN CASSE-TÊTE - L'Infirmière Magazine n° 367 du 01/01/2016 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Magazine n° 367 du 01/01/2016

 

BELGIQUE

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Clarisse Briot  

Priée de mettre sa formation en soins infirmiers en conformité avec les exigences européennes au plus tard le 18 janvier, la Belgique a pris du retard. Attendue pour la prochaine rentrée universitaire, la réforme patine.

Comment seront formées les infirmières en Belgique demain ? La réponse se fait attendre. Et pourtant, à compter du 18 janvier 2016, le cursus belge doit respecter les règles de la nouvelle directive européenne adoptée en 2013. Elle définit pour tous les pays de l’Union européenne un volume horaire minimal de formation(1) ainsi qu’un corpus de huit compétences à acquérir. Autant de critères que le cursus belge actuel ne remplit pas. Sous peine de payer des pénalités et que ses infirmières soient privées de la reconnaissance de leur qualification dans le reste de l’UE, le pays a donc entamé une réforme, qui peine à se finaliser.

Double voie

« Nous sommes dans le flou, constate Alda Dalla Valle, présidente de l’Union générale des infirmiers de Belgique, qui réclame de longue date cette refonte. Tout le monde semblait d’accord pour aller vers un cursus unique effectué en Haute école et rallongé à quatre ans [contre trois actuellement], afin de garantir la qualité des soins et le respect des prescrits européens. Jusqu’à ce que la ministre de la Santé se prononce en faveur du maintien de la double voie, avec des compléments de formation. » En effet, aujourd’hui, deux cursus coexistent : le brevet d’infirmier hospitalier, dispensé dans l’enseignement professionnel secondaire et très axé sur la pratique, et le bachelier en soins infirmiers, dispensé dans l’enseignement supérieur (dans les Hautes écoles) et plus exigeant. Pour les professionnels, la réforme était l’occasion de simplifier ce système et de rehausser le niveau de formation.

Si le cursus unique a du plomb dans l’aile, l’allongement d’un an du bachelier paraît, lui, incontournable. Les Hautes écoles ont ainsi travaillé sur un nouveau programme. « Nous devons renforcer l’apprentissage de certaines compétences – par exemple la communication au sein d’équipes pluriprofessionnelles, l’autoévaluation des pratiques ou encore l’aide à l’autonomisation du patient – et surtout, passer de 1 500 heures de stages cliniques à 2 300 heures », précise Isabelle Houssiau, la directrice adjointe de l’Institut supérieur d’enseignement infirmier de la Haute école Vinci (agglomération bruxelloise). Mais des questions demeurent sur le contenu et l’organisation de ces stages ou encore sur l’absence de nouveaux diplômés sur le marché du travail pendant un an. « Nous sommes inquiets du timing, confie Hubert Remy, directeur de la catégorie paramédicale de la Haute école provinciale de Hainaut-Condorcet. Il faut que l’on puisse avoir des certitudes – notamment budgétaires – assez vite, à la fois pour mettre en œuvre les nouveaux programmes dans de bonnes conditions et pour pouvoir communiquer clairement aux étudiants. »

Fin d’exercice en France ?

Pour les écoles qui forment au brevet, l’incertitude est encore plus grande : c’est l’existence même de la filière qui est en jeu. Dans le cadre d’un passage à un cursus unique en Haute école, les associations professionnelles ont proposé une alternative : que l’enseignement secondaire forme à un diplôme intermédiaire d’assistant-infirmier en deux ans. Mais la ministre de la Santé a écarté cette option. Problème : il paraît difficile que le brevet puisse remplir les exigences européennes. Dans ce cas, les infirmières brevetées seraient privées de la mobilité européenne. Un vrai danger pour la survie de la filière, du moins côté francophone, puisque la moitié des élèves qui la composent sont des non-résidents, en grande majorité des Françaises qui repartent exercer de l’autre côté de la frontière.

1- Soit 4 600 heures d’enseignement, dont 2 300 heures au moins de formation clinique.

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