Glyphosate : interdit en France d’ici trois ans ? | Espace Infirmier
 

05/12/2017

Glyphosate : interdit en France d’ici trois ans ?

Les états membres de l'Union européenne ont voté, le 27 novembre, en faveur d'une nouvelle autorisation pour cinq ans du glyphosate. Une décision qui ne règle pas la question des effets sur la santé de cet herbicide, le plus vendu au monde.

Après deux années de débats et de revirements, les états membres de l'Union européenne, réunis au sein d'un comité d'appel, ont voté, le 27 novembre, en faveur d'une nouvelle autorisation pour cinq ans du glyphosate, herbicide très controversé et best-seller de la firme américaine Monsanto. La proposition de la Commission a obtenu de justesse la majorité requise, à savoir l’adhésion de 55 % des états-membres de l’UE représentant au moins 65 % de la population(1). Dans la foulée de l’annonce des résultats de ce vote, le président de la République a tweeté : « J’ai demandé au gouvernement de prendre les dispositions nécessaires pour que l’utilisation du glyphosate soit interdite en France dès que des alternatives auront été trouvées, et au plus tard dans 3 ans. » Reste à savoir comment tout cela va pouvoir se mettre en place... Car dans ce feuilleton politico-juridico-médiatique, la question centrale porte sur les impacts sur la santé de cette molécule. Mais là encore, scientifiques et agences européennes sont très loin de parler d’une même voix.

Distinguer le danger du risque

En mars 2015, le Centre international de recherche sur le cancer (Circ) a classé le glyphosate comme « cancérogène probable » pour l’homme. La même année, en novembre, l’Autorité européenne de sécurité des aliments (Efsa) a, elle, jugé « improbable » qu’il soit cancérogène. De son côté, l’Agence européenne des produits chimiques (Echa) a conclu au caractère « non cancérogène » du produit. Tout récemment, la publication d’une étude de cohorte menée sur plus de 50 000 agriculteurs volontaires recrutés dans le cadre de l’Agricultural Health Study (AHS) de Caroline du Nord et de l’Iowa par les instituts nationaux de la santé (NIH) conclut « qu’aucune association n’est apparente entre le glyphosate et l’apparition de tumeurs solides ou de lymphomes non hodgkiniens (LNH), un cancer du sang. » Pour Luc Multigner, directeur de recherche à l’Inserm (Institut de recherche sur la santé, l'environnement et le travail), « en l’état actuel des connaissances, sur la base du fait scientifique, il n’y a pas d’évidence entre les expositions professionnelles au glyphosate et la survenue de cancer. Cela ne veut pas dire que ce risque n’existe pas. Il faudrait voir cela sur des cohortes de 25-30 ans. Mais dans ce dossier, il y a une grande confusion. Il faut distinguer la question du danger et la question du risque. »

Toutefois, les auteurs de l’étude AHS ont noté chez les utilisateurs les plus exposés au glyphosate un risque de leucémie aiguë myéloïde multiplié par 2,44 comparé aux agriculteurs qui n’ont jamais été exposés. Pour François Veillerette, directeur et porte-parole de l’association Générations futures, l’étude AHS « n’apporte rien de nouveau et ne remet pas en cause l’avis du Circ de 2015 qui classe le glyphosate comme cancérogène probable. Plusieurs études cas/témoins montrent en effet un risque accru de LNH lié à l’exposition au glyphosate. »

La question est loin d’être tranchée. Au-delà du glyphosate, elle pose celle, plus générale, de l’impact des pesticides sur la santé humaine. D’ailleurs, une campagne exploratoire de mesure des pesticides (dont le glyphosate) dans l’air destinée à mieux évaluer l’exposition de la population va débuter au printemps prochain sur une cinquantaine de sites de mesure. Elle sera pilotée par l’Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses) en lien avec l’Institut national de l’environnement industriel et des risques (Ineris). Preuve que le sujet intéresse et pousse à l’action.

Isabel Soubelet

1. Les résultats du vote : 18 pays membres ont voté pour l'autorisation pour cinq ans : la Bulgarie, l'Allemagne, la République tchèque, le Danemark, l'Estonie, l'Irlande, l'Espagne, la Lettonie, la Lituanie, la Hongrie, les Pays-Bas, la Pologne, la Roumanie, la Slovaquie, la Slovénie, la Finlande, la Suède et le Royaume-Uni. La Belgique, la Grèce, la France, la Croatie, l'Italie, Chypre, le Luxembourg, Malte et l'Autriche ont voté contre. Le Portugal s'est abstenu.

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