L’esprit d’entreprendre pour réussir l’implantation des infirmiers en pratique avancée - Objectif Soins & Management n° 0295 du 12/10/2023 | Espace Infirmier
 

OBJECTIF SOINS n° 0295 du 12/10/2023

 

DOSSIER

Jean-Luc Denny  

Maître de conférences en sciences de l’éducation et de la formation, Laboratoire interuniversitaire des sciences de l’éducation et de la communication (Lisec), UR 2310, Université de Strasbourg

Si l’infirmier en pratique avancée bouscule l’écosystème de la santé, nous ne savons pas grand-chose du vécu éprouvé des acteurs. Que peuvent-ils dire d’eux-mêmes quand on regarde comment chacun fait usage de soi sous l’angle des normes et valeurs ? C’est l’enjeu de cet article dont les résultats bousculent nos représentations des compétences-clés à développer en formation.

La création en 2016 du diplôme d’infirmier en pratique avancée (IPA) s’inscrit dans le cadre plus général de la loi de modernisation du système de santé, et est accessible après une formation en deux ans, ponctuée par un master 2 « IPA ». Ce diplôme permet à des infirmiers diplômés d’État (IDE) d’élargir leur spectre de compétences, les autorisant à travailler en collaboration plus étroite avec les médecins, jusqu’à les suppléer pour certains actes. Un lien ombilical apparaît reliant les IPA aux IDE avec comme effet, en termes de professionnalité des premiers, une forme de « mobilité sur place [en tant qu’opère] un changement d’emploi sans changer de profession »(1). La finesse du distinguo qui enveloppe ce déplacement professionnel n’est pas sans conséquence sur le processus de professionnalisation des IPA. En effet, comment reconnaître la spécificité de l’IPA tout en maintenant une telle proximité avec l’IDE? L’accès à la diplomation est-il suffisant pour garantir un changement effectif dans les pratiques ? 

Alors que la quasi-totalité des recherches actuelles touche à l’étude de l'implantation et aux perceptions des parties prenantes à grand renfort de méthodes quantitatives(2, 3), la présente étude vise plutôt à appréhender l’activité du point de vue des professionnels par une logique située selon le paradigme ergologique. Fort d’une méthodologie qualitative, le travail de recherche rend compte d’une analyse de l’articulation entre formation et emploi par le prisme des normes et valeurs. Autrement dit : en quoi, du point de vue des IPA, l’entrée dans le métier réinterroge-t-elle la formation avec l’optique d’impulser un réel changement de posture professionnelle ? Les résultats de la présente recherche peuvent ainsi alimenter l’ingénierie pédagogique des masters IPA. Les données de recherche sont issues d’un partenariat entre les instituts de formation en santé du Centre hospitalier de Saverne, le Laboratoire interuniversitaire des sciences de l’éducation et de la communication Alsace (Lisec) et l’université de Strasbourg.

Après un rappel synthétique du contexte d’émergence du métier d’IPA, nous présenterons les options méthodologiques retenues en introduisant le concept organisateur de l’étude, « l’usage de soi ». Les principaux résultats seront exposés avant de conclure avec une courte discussion portant sur les remises en question que soulève l’étude.

Contexte et positionnement professionnel

La création du métier d’IPA constitue une tentative de réponse politique aux enjeux actuels de santé publique. Différents facteurs conjugués rendent compte de la nécessité de faire évoluer le service de soins pour répondre à des défis croissants en émergence régulière, comme le contexte de vieillissement de la population(4) qui s’accompagne d’une accentuation de maladies chroniques(5). Le rapport de la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees) de 2017(6) souligne la démographie vieillissante des médecins et une baisse des aspirations des jeunes générations à s’engager dans les métiers du soin, éléments qui participent de l’accentuation des déserts médicaux et des risques d’accroissement des inégalités territoriales d’accès aux soins. Le même rapport relève que 8 % de la population réside dans une commune sous-dense en médecins généralistes, au sens d’une accessibilité inférieure à 2,5 consultations par an et par habitant. Sur la période 2012-2015, est observée une légère augmentation de la population située en dessous de ce seuil, mais l’accessibilité des zones qui étaient en-dessous du seuil en 2012 s’est très légèrement améliorée. L’ambition des autorités de santé vise ainsi à améliorer l’accès aux soins et la qualité des parcours des patients, tout en libérant du temps pour les médecins sur des pathologies ciblées(7) (encadré 1).

Si l’IPA se glisse entre l’IDE et le médecin, le métier bouscule nécessairement la professionnalité de toutes les parties prenantes par la remise en cause des missions historiquement dédiées, donc des routines du métier. Les résultats des études traduisent un avis globalement favorable à ces changements du côté des IDE. En revanche, des réticences apparaissent notamment chez certains médecins, tant l’intégration d’un nouvel acteur de santé aux compétences augmentées bouscule leur propre pratique professionnelle(3). Pour se construire un périmètre, les IPA sont parfois obligés de « bricoler », de se livrer à des actes clandestins par petites touches pour trouver leur place(8). Leur positionnement professionnel devient particulièrement étroit entre « se distinguer des infirmiers qu’ils étaient, des cadres qu’ils ne veulent pas être, et tisser une collaboration avec des médecins dont ils se sont rapprochés, sans toutefois prendre leur place »(9). De manière plus globale, l’absence de rupture nette et la construction d’une professionnalité dans le prolongement de l’IDE interrogent voire bousculent fortement les normes professionnelles(8).

Les compétences professionnelles des IPA s’expriment fortement à travers l’appropriation et la mise en œuvre de connaissances issues de données probantes et principalement acquises dans la formation en sciences infirmières de niveau supérieur. Le conseil international des infirmières fait état d’une identité d’IPA par essence « généraliste » dont la formation plus poussée permet d’acquérir des compétences de « cliniciennes autonomes »(10). Est globalement escompté l’approfondissement du raisonnement clinique comme principale expertise pouvant servir de marqueur du métier. Présenté ainsi, nous pouvons dès lors nous demander si un effet d’entraînement de l’ensemble de la profession d’infirmier peut réellement émerger, ou si nous assistons plutôt à la segmentation de leur professionnalité sans bénéfice réciproque (encadré 2).

Options méthodologiques mobilisant « l’usage de soi »

L’étude mobilise six IPA issus de la première promotion d’un master IPA situé en région Grand-Est. L’échantillon est composé de quatre femmes et deux hommes, la moyenne d’âge est comprise entre 35 et 55 ans. Trois participants ont entre sept et neuf années d’expérience en tant qu’IDE, les trois autres entre 19 et 23 ans. Cinq exercent dans le cadre de la mention « Pathologie chronique stabilisée » et un en « Psychiatrie et santé mentale ». Deux exercent en libéral, trois en structure et un est salarié à 50 % en réseau et 50 % auprès d’un médecin généraliste.

La méthodologie retenue est de type qualitatif privilégiant une entrée par l’activité humaine par focus groups conjuguée à des entretiens individuels. Au total, deux focus groups sont situés aux extrémités de la démarche, et entrecoupés par des entretiens individuels (un par participant).

La mobilisation du concept d’usage de soi rend compte d’une méthodologie singulière car elle est alimentée par les ressorts théoriques de la démarche ergologique. Dans cette optique, l’intervention du chercheur vise à susciter des interactions afin de mettre en visibilité la façon dont chacun fait « usage de soi » en approchant les situations de travail en « micro », à la loupe. L’entrée par l’activité humaine amène le chercheur à situer l’attention des participants dans des actions précises. Il s’agit ainsi d’identifier des moments où les participants posent des actes hic et nunc (ici et maintenant), afin de rendre visibles les micro-choix par effort de renormalisation (encadré 3).

Résultats autour du développement de compétences en marketing

Étonnamment, les points saillants des résultats documentent un champ lexical qui ne relève pas du monde du soin. Les participants ont ainsi fait état de compétences à mobiliser qui concernent principalement le domaine du marketing. Amener les IPA à décrire ce que cela leur coûte d’entrer dans le métier compte tenu des résistances effectives de terrain a fait émerger des normes et valeurs a priori extérieures, pour une part, au champ de la formation dédiée. Ainsi ont été repérées des normes comme celles visant à démarcher les patients et médecins en élaborant une stratégie à renforts de manières de faire et de dire, le tout soutenu par des valeurs qui leur donnent sens et efficience par l’esprit marketing (efforts pour plaire et séduire, empathie et écoute, esprit de compétition, etc.). 

Les préoccupations premières sont très basiques : « Qu’on exerce en libéral ou en structure, il faut trouver du travail, les patients ne viennent pas tout seuls. Si le médecin ne me donne pas de patients, l’IPA ne bosse plus ». La forte dépendance de l’IPA au médecin se voit ainsi maintenue et même renforcée à distance de son « émancipation initialement voulue ». Ce vécu est inédit car « Il n’y a aucun besoin de cela en tant qu’IDE, le travail venait tout seul, et en abondance même ».

Ils se retrouvent ainsi à « démarcher [et même à] faire du télémarketing », situations où ils se ressentent régulièrement bousculés voire complètement désarçonnés. Des échecs surviennent, ainsi cet IPA qui indique « qu’on ne [leur] a pas appris à répondre au refus ».

Les situations se succèdent et témoignent d’un isolement des IPA. S’ils se retrouvent physiquement seuls pour démarcher les médecins, ils ne peuvent s’appuyer sur un héritage du métier comme ressources pour faire face à ce type de situation. Ainsi cette IPA qui propose ses services à un médecin en se rendant à son cabinet. Elle ne dispose que de « 15 minutes pour convaincre, et pas une minute de plus », le médecin est « formel au téléphone lors de la prise de rendez-vous ». La stratégie est anticipée, pour « être efficace », elle confectionne « un flyer, organisé en triptyque où sont décrits les textes de référence, les compétences ainsi que les missions de l’IPA ». À peine installée face au médecin, elle se retrouve très vite « mal à l’aise, le flyer il ne l’a même pas regardé ». Face au scepticisme de l’interlocuteur elle « perd [ses] moyens » jusqu’à ressentir « ses mains moites et énormément de stress. L’ambiance est froide, [elle a] l’impression d’être un marchand ambulant qui cherche à vendre une machine à coudre à quelqu’un qui n’en veut pas ». Après quelques minutes sans parler, le médecin lui coupe la parole en disant : « Et alors ? C’est quoi le problème ? ». Confrontée au verdict négatif et sans appel du médecin, elle déclare ne pas avoir été « préparée à ça, le médecin [lui] dit qu’il n’a aucun problème avec ses infirmières, tout va bien, elles font déjà tout ce [qu’elle] propose ». Alors qu’elle était portée par des valeurs ambitieuses acquises en formation, comme « investie d’une posture de sauveuse du système de soin en France », elle se retrouve « démunie » jusqu’à se dire qu’avant « elle était peut-être plus utile, nécessaire et en phase pour prendre soin des malades ».

Pour le chercheur, la focale sur l’usage de soi permet de faire émerger le rapport qu’entretient l’IPA à son métier, dynamique qui permet de mettre en visibilité ce qui est masqué habituellement par les tâches prescrites et réalisées par l’homme au travail. Aussi, interroger le rapport à soi dans l’exécution des tâches amène à faire découvrir au professionnel lui-même ce que recouvre son propre rapport au métier. Cette logique est possiblement absente des préoccupations de l’IPA, d’autant plus que la charge de travail tend à masquer le rapport aux normes et valeurs qui traverse l’activité. Cette dialectique rapport à soi et rapport au métier est très distinctement évoquée par l’un d’entre eux lorsqu’il indique qu’il passe de « vendre l’IPA à se vendre soi », disposition nouvelle qui « sort complètement de l’habitude ».

À l’épreuve des faits, l’IPA apprend « à user de la séduction, comme un commercial qui vend un service », s’en remettant à des « manières d’être qui permettent de se vendre ». Il se montre « sous [son] meilleur jour en étant proactif et en installant la discussion ». Créer « de la relation » est déclaré comme une tâche plus importante que « la technique elle-même ». L’IPA « joue sur la relation, use de blagues pour que ça passe », autant d’intentions absentes de leurs représentations initiales. Ils entrent avec finesse de grains dans l’analyse de leurs manières de faire : « On travaille l’intonation de la voix quand on appelle un patient potentiel, on essaye d’être dynamique, de donner envie, de plaire, de montrer de l’empathie […] très vite on apprend à repérer quand l’interlocuteur a mordu à l’hameçon. Une fois qu’il commence à raconter ses difficultés de santé, c’est gagné ».

Les remises en question soulevées par l’étude

La présente étude s’est attachée à la prise en compte de l’usage de soi des IPA dans un temps effectif d’entrée dans le métier. Les résultats permettent d’interroger les ressources nécessaires aux IPA pour s’implanter dans l’écosystème des métiers de la santé, données pouvant alimenter l’offre de formation des masters IPA. En repartant des normes du métier, autrement dit des tâches et missions assignées aux professionnels, l’étude s’est attachée à mettre en lumière leurs arbitrages guidés par ce qui fait valeur pour ces derniers et qui les pousse à agir. Ce dialogue entre « ce qui est à faire » (normes), et ce que « cela demande » (valeurs) aux professionnels pour faire, fait émerger de nouveaux savoirs en mesure d’interroger à leur tour les savoirs académiques (ici le curriculum de formation des IPA). Loin de relativiser voire de minimiser ces savoirs investis dans l’agir, la démarche ergologique se propose de les considérer afin d’envisager avec eux des transformations éventuelles.

Les résultats témoignent de la nécessité de développer au préalable des compétences en marketing pour s’implanter et faire vivre le métier d’IPA. Si les compétences fondamentales proposées en master sont indispensables (évaluer l’état de santé de patients, définir et mettre en œuvre le projet de soins tout comme des actions de prévention et d’éducation thérapeutique, etc.), elles ne sont pas suffisantes pour outiller l’entrée dans le métier.

Il apparaît nécessaire de développer une véritable initiation à l’esprit d’entreprendre dont les ressorts relèvent de l’entrepreneuriat. Développer des qualités personnelles comme la créativité et l’esprit d’initiative, promouvoir des compétences psychosociales pour faire face en situation de perplexité régulièrement éprouvée(8), sont autant de compétences jugées indispensables par les IPA pour réussir le projet d’implantation.

Une IPA résume parfaitement un attendu de formation jugé secondaire en première intention, mais évalué comme central et essentiel par les IPA participant à l’étude : « Ce que j’ai retenu de la formation c’est parler en public, prendre la parole, faire des travaux en groupe, c’est ça qui me sert, c’est ce qui m’aide à m’affirmer face aux médecins… ».

Références

1. Misset S, Noûs C. Des mobilités discrètes en milieu populaire. Les trajectoires professionnelles entre arrangements conjugaux et quête de respectabilité. Genèses 2021 ; 122 : 83.

2. Schwingrouber J. Implantation et évaluation de la pratique avancée en France : comment accompagner les acteurs de santé dans leurs projets d’implantation et d’évaluation de la pratique avancée infirmière ? Thèse de doctorat en biologie santé. Recherche clinique et santé publique, Aix-Marseille Université, 2021. p. 229.

3. Aghnatios M, Darloy T, Dictor J, Gasparovicova M, Drouot C, Gasperini F, Almost J. Les soins infirmiers réglementés au Canada : le portrait de 2021. Association des infirmières et infirmiers du Canada, 2021. p. 169.

4. Blanpain N. Le vieillissement de la population française est‑il inéluctable ? Économie et Statistique 2020 ; 520 : 69-89.

5. Avignon A. Living Lab MACVIA Maladies chroniques. La Presse Médicale 2015 ; 44 : 47‑54.

6. Dress. Déserts médicaux : comment les définir ? Comment les mesurer ? Les dossiers de la Drees 2017 ; 17, 1-63. https://drees.solidarites-sante.gouv.fr/IMG/pdf/dd17.pdf

7. Décret n° 2018-629 du 18 juillet 2018 relatif à l’exercice infirmier en pratique avancée. https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000037218115

8. Denny JL, Bayle I, Dietemann L, Goulard Blank J, Durrive L. Les infirmiers en pratique avancée : un processus de reconnaissance à l'épreuve du terrain. Formation Emploi (sous presse).

9. Giraud F, Moraldo D. Devenir infirmier en pratique avancée : une mobilité « sur place » ?, Céreq Échanges, Trajectoires & carrières contemporaines. Nouvelles perspectives méthodologiques, XXVIIes journées du longitudinal 2022 ; 18 : 1-10.

10. Conseil international des infirmières (CII). Directives sur la pratique infirmière avancée. 2020. p. 19. https://www.icn.ch/sites/default/files/inline-files/ICN_APN%20Report_FR_WEB.pdf

11.  Schwartz Y, Durrive L. L’activité en dialogues. Entretiens sur l’activité humaine (II) suivi de : Manifeste pour un ergo-engagement. Octares, 2009. p. 260.

Encadré 1

Les cinq mentions de l’exercice en pratique avancée

Mention 1 : pathologies chroniques stabilisées ; prévention et polypathologies courantes en soins primaires.

Mention 2 : oncologie et hémato-oncologie.

Mention 3 : maladie rénale chronique, dialyse, transplantation rénale.

Mention 4 : psychiatrie et santé mentale.

Mention 5 : urgences.

Encadré 2

Cadre d'exercice

Au niveau international, l’infirmier en pratique avancée (IPA) est décrit comme un « infirmier diplômé d’État, titulaire d’un master, ayant acquis les connaissances théoriques, le savoir-faire nécessaire aux prises de décisions complexes, de même que les compétences cliniques indispensables à la pratique avancée de sa profession. Pratique dont les caractéristiques sont déterminées par le contexte et/ou le pays dans lequel l’infirmier sera autorisée à exercer » (Conseil international des infirmières, 2009).

En France, l’article L.4301-1 du Code de la santé publique précise que « Les auxi­liai­res médi­caux rele­vant des titres Ier à VII du pré­sent livre peu­vent exer­cer en pra­ti­que avan­cée au sein d’une équipe de soins pri­mai­res coor­don­née par le méde­cin trai­tant ou au sein d’une équipe de soins en établissements de santé ou en établissements médico-sociaux coor­don­née par un méde­cin ou, enfin, en assis­tance d’un méde­cin spé­cia­liste, hors soins pri­mai­res, en pra­ti­que ambu­la­toire. ». (Article R4301-2 du Code de la santé publique, http://www.legifrance.gouv.fr)

Encadré 3

L’usage de soi

Le concept d’usage de soi se situe au cœur de la démarche ergologique. La mise en visibilité de ce processus permet de saisir la manière dont un professionnel transforme les conditions de réalisation des normes du métier par l’activité en témoignant de ses délibérations et raisons d’agir. Une définition permet d’en saisir toute la portée.

« Tout travail, parce qu’il est le lieu d’un problème, appelle un usage de soi. Cela veut dire qu’il y a non pas simple exécution mais usage, convocation de quelqu’un de singulier avec des capacités bien plus larges que celles répertoriées par la tâche. Travailler met en tension “l’usage de soi requis par les autres” [pour satisfaire à des sollicitations extérieures], et “l’usage de soi consenti et engagé par soi-même” [selon son propre système de préférence] »(11).