DES HÔPITAUX LIGÉRIENS POSENT UN DIAGNOSTIC - L'Infirmière Magazine n° 327 du 15/07/2013 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Magazine n° 327 du 15/07/2013

 

ABSENTÉISME

ACTUALITÉ

DU CÔTÉ DES … ÉTABLISSEMENTS

Dix établissements des Pays-de-la-Loire ont fait l’objet d’une étude au long cours sur l’absentéisme. Plus de 400 entretiens ont été menés auprès des soignants, pointant des organisations défaillantes.

L’organisation n’est plus comme avant… ». Une plainte que les chercheurs ont entendu de façon récurrente au cours des entretiens qu’ils ont menés dans dix hôpitaux de la région des Pays-de-la-Loire(1). De 2009 à 2012, ces établissements ont fait l’objet d’une étude sur l’absentéisme. Ce projet, baptisé « PHARES »(2), a été conduit par sept chercheurs en gestion et un ergonome de l’Ecole des Mines de Paris et de l’université de la ville de Nantes, à la demande de trois organismes (l’Agence régionale de santé, la Fédération hospitalière de France et le Fonds national de prévention). « Il n’a pas été possible de chiffrer de manière fiable et comparable l’absentéisme dans ces hôpitaux, chaque établissement dis­posant de ses propres indicateurs, précise d’emblée Frédéric Kletz, chercheur en gestion à l’Ecole des Mines. Mais tous étaient très demandeurs d’informations et d’accompagnement sur ce sujet. »

Des cadres accaparés

Plus de 400 entretiens, tous anonymisés, ont été réalisés avec des infirmières, des aides-soignantes, des ASH, et des cadres de santé. « Très vite, les échanges ont dérivé non pas vers des problèmes d’absences individuelles, ni de pénibilité ou de troubles musculosquelettiques, mais vers des questions organisationnelles, ajoute Frédéric Kletz. Ces difficultés à l’hôpital sont plutôt récentes. »

Les raisons invoquées ? Les cadres sont accaparés par des contraintes administratives et institutionnelles, qui les clouent derrière leur poste informatique et les empêchent d’être sur le terrain pour accompagner les soignants et répondre à leurs questions. Les paramédicaux déplorent, également, une implication insuffisante des médecins au sein des unités.

Stratégies de remplacement

Selon le chercheur de l’école des Mines : « l’absence signe avant tout la volonté d’ un individu de prendre de la distance par rapport à une organisation du travail à laquelle il n’adhère plus, et dans laquelle sa fonction n’a plus le sens qu’elle avait au départ ».

La gestion des remplacements, très variable d’un établissement à l’autre, a aussi été remise en question. Dans certains hôpitaux, les absents ne sont pas remplacés, créant une surcharge de travail pour ceux qui restent. Dans d’autres, on recourt, parfois, à la « mobilité forcée ». Des soignants d’autres services sont appelés en renfort, au pied levé. Le problème est qu’ils ne possèdent pas les repères de l’unité, et les collègues passent du temps à les former. Cela crée un surcroît de travail. Les stratégies de remplacement peuvent, à leur tour, engendrer de l’absentéisme.

Une fois l’étude de terrain achevée, en 2012, les chercheurs ont proposé plusieurs pistes d’action aux différents hôpitaux (lire l’encadré). Pour l’heure, celles-ci peinent à donner des résultats. Il faut dire que l’absentéisme est l’arbre qui cache la forêt d’un dysfonctionnement global dans les établissements. « C’est toute l’organisation de l’hôpital qu’il faut revoir en profondeur », estime Frédéric Kletz. Ce qui peut prendre des années.

1– L’hôpital local du Sud-ouest Mayennais, les CHU de Nantes et d’Angers, le CHS de la Sarthe, l’hôpital local Loire et Sillon, le Pôle santé Sarthe et Loire, le CHS Georges-Mazurelle, l’hôpital local de Doué-La-Fontaine, l’EDPA de Saint-Brévin-les-Pins et l’hôpital local de Baugeois-la-Vallée.

2– Projet hospitalier ligérien sur l’absentéisme, recherche, intervention, efficience et organisation, santé au travail.

INFIRMIERS ABSENTS

En quête de remèdes

> Parmi les pistes d’action suggérées par les chercheurs figure la « charte de l’absentéisme », qui encadre la gestion des remplacements, le recours à la « mobilité forcée », la rétribution éventuelle des remplaçants, etc. Autre initiative : la mise en place d’entretiens de retour, anonymisés et analysés, dont le contenu doit faire l’objet d’une réflexion entre les agents du service. Dans un hôpital psychiatrique, les chercheurs ont proposé de réinstituer « les entretiens infirmiers », qui étaient quelque peu tombés en désuétude.

Or, ces entretiens, menés notamment à l’arrivée de nouveaux patients, sont un facteur d’implication des infirmières dans la démarche thérapeutique et permettent une coordination avec les médecins.