Urgences pédiatriques - L'Infirmière Magazine n° 283 du 15/07/2011 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Magazine n° 283 du 15/07/2011

 

FORMATION CONTINUE

FICHE TECHNIQUE

La prise en charge de l’enfant en situation de détresse commence par un bilan méthodique de son état de santé.

La prise en charge de tout patient par un infirmier débute par l’évaluation de ses besoins. C’est là une compétence infirmière reconnue. Cette évaluation peut revêtir différentes formes, et l’infirmier adaptera sa méthodologie et son raisonnement clinique en fonction du contexte et de son environnement d’exercice.

L’infirmier peut être confronté à de multiples situations problématiques ; notamment deux situations particulièrement génératrices de stress : l’urgence et la pédiatrie. La prise en charge d’une détresse chez l’enfant comporte deux phases distinctes : la première étape est la réalisation d’un bilan qui permet de passer un message d’alerte mais aussi de prendre en charge les détresses vitales imminentes en attendant un renfort médical. La seconde étape consiste à mener une seconde évaluation qui permettra d’affiner la prise en charge par l’infirmier.

Les professionnels de santé en formation suivent désormais la formation aux gestes et aux soins d’urgences, et ceux en exercice y sont largement invités. La prise en charge de l’urgence chez l’enfant présentée ici ne suit pas le schéma méthodologique de l’AFGSU 2, et cet article ne saurait se substituer à une formation complète telle que celles prévues par les textes réglementaires.

LE BILAN INITIAL

• La méthodologie du bilan initial proposée ici permet une évaluation : sans matériel, méthodique, uniformisée, rapide (1 minute maximum).

• Elle est réalisée sans recherche d’éléments paracliniques, parfois même sans relevés de paramètres vitaux. Elle s’appuie sur la recherche de signes cliniques vitaux.

• Son objectif est la transmission d’un bilan rapide et juste au Centre de régulation et de réception des appels (CRRA) du Samu ; elle permet au médecin régulateur du Samu d’envoyer les moyens de secours adaptés (Smur, pompiers, autres).

• Pour recueillir les informations du bilan initial, l’infirmier :

– observe ;

– écoute ;

– examine.

Le bilan commence à distance de la victime, par un bilan de la « scène ».

J’observe – J’écoute

Durant cette phase, il s’agit de répondre aux questions suivantes :

– Où ? Quand ? Comment ? Depuis combien de temps ?

– « L’ambiance » : quel est l’état de stress des proches, des témoins, et celui des intervenants ?

– Le comportement de l’enfant : apparaît-il prostré, inconsolable, gémissant ? Dans quelle position est-il ?

– Les circonstances : que s’est-il passé ? Quelle est la cinétique de l’accident ? L’enfant était-il attaché ? Portait-il des protections ?

J’examine

• L’infirmier n’entre en contact avec la victime qu’une fois l’ambiance étudiée, afin d’identifier tous les dangers inhérents à la situation avant de toucher l’enfant et pour éviter de se focaliser sur un détail au détriment d’une bonne compréhension globale de la problématique.

• Une fois l’environnement observé, pour réaliser le bilan, il est primordial d’entrer en contact physique avec la victime (en l’ayant prévenue) ; on ne peut pas évaluer l’état de santé d’un individu sans le toucher. Le bilan initial est débuté.

Application de la méthode ABCD

• Pour répondre à ces exigences, on privilégiera la méthode « ABCD »

À chaque item (ABCD), les actions nécessaires sont mises en œuvre avant de continuer : l’infirmier n’évalue le « B » que lorsque les détresses liées au « A » ont été traitées, et ainsi de suite. En d’autres termes, il faut d’abord libérer les VAS avant d’évaluer la respiration.

• La réalisation du bilan, la mise en œuvre des gestes immédiats et la transmission de l’alerte au Samu peuvent-être simultanées si l’urgence l’exige et que la compétence le permet.

Ce bilan pourra être renouvelé aussi souvent que l’état de la victime le nécessite et ce d’autant qu’elle est instable.

A – Voies aériennes

• Proportionnellement au reste de son corps, la tête de l’enfant est volumineuse. De fait, elle bascule vers l’avant, provoquant une obstruction inspiratoire des voies aériennes supérieures (VAS).

• Une libération efficace de celles-ci peut être salvatrice. La tête doit être placée en position neutre sans bascule en arrière. La langue est également plus grosse, et l’affaissement du tonus pharyngé obstrue rapidement les VAS. Chez l’enfant inconscient, la langue chute et colle au palais, obstruant la cavité buccale. En présence d’un enfant sans tonus musculaire, l’infirmier introduit son index dans la cavité buccale de celui-ci et assure le décollement de la langue du palais.

B – Breathing (respiration)

Plus l’enfant est petit, plus les « besoins » en oxygène sont importants. La ventilation alvéolaire est proportionnellement bien supérieure à celle de l’adulte. Les signes de lutte apparaissent vite et peuvent être spectaculaires. L’oxygénothérapie doit être entreprise au moindre doute. Elle ne sera possible que si l’infirmier dispose du matériel adéquat.

C – Circulation

L’enfant, par son immaturité physiologique, est très dépendant de sa volémie. Toute perte de liquide par un saignement, une hémorragie, une brûlure ou une déshydratation doit être traitée rapidement.

L’examen de la fontanelle est réservé aux professionnels expérimentés en la matière.

D – Disability (neurologie)

L’inconscience de l’enfant – comme pour l’adulte – est un signe de gravité ; mais les étiologies peuvent différer. Le score de Glasgow, communément utilisé pour évaluer la gravité du coma, doit être adapté à l’enfant. La méthodologie ABCD peut être conservée et adaptée. Elle sera complétée par E et F (voir p. 43 le bilan complémentaire).

CONCLUSION

La gestion de son stress et l’application séquencée quasi réflexe d’une technique de bilan que l’on maîtrise sont, dans une large mesure, les clés de la réussite d’une prise en charge.

BILAN COMPLÉMENTAIRE

→ La méthodologie ABCD est complétée par E et F

→ E – Environnement, Exposer, Examiner. Les détresses vitales auront été détectées puis traitées l’une après l’autre par la séquence « ABCD ». Une fois ce premier bilan réalisé, les gestes d’urgence vitale ont été effectués et l’état de l’enfant est stabilisé. Il est possible qu’il ne le soit pas et que les gestes de réanimation soient encore nécessaires ; néanmoins, si tel n’est pas le cas, l’infirmier doit déshabiller l’enfant afin d’observer l’aspect de la peau, à la recherche de lésions ou de modifications dermatologiques. Il prend sa température, évalue la présence de traumatismes, En l’exposant, il « fait le tour » de l’enfant.

→ F – Famille. La famille ne doit être écartée de la prise en charge de l’enfant que si elle le désire. En dehors d’une simple présence, les parents peuvent être impliqués dans la prise en charge, soit en prenant leur enfant (si son état le permet), soit en apportant des renseignements précieux sur le déroulement de la grossesse, les antécédents de l’enfant et de sa fratrie. Le carnet de santé doit être demandé et mis à disposition des services de secours. Il en est de même pour le « doudou », dont l’enfant conscient peut avoir grandement besoin.

→ Relevé des paramètres

Les paramètres vitaux seront mesurés à cet instant et le bilan sera documenté : température, fréquence cardiaque, respiratoire, tension artérielle, saturation en oxygène…

RAPPELS

→ Chez l’enfant de moins de 1 an, le tonus est le premier critère d’évaluation de la gravité.

→ Un enfant qui pleure, qui crie ou qui parle est un enfant qui respire.