« Parlons de sexualité ! » - L'Infirmière Magazine n° 260 du 01/05/2010 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Magazine n° 260 du 01/05/2010

 

Cancer de la prostate

Actualités

Santé

Le Dr Michel Schouman plaide pour une meilleure prise en compte de l'activité sexuelle des hommes soignés pour un cancer de la prostate.

« Lorsqu'on prend en charge un patient, qu'il soit traité ou non ou qu'une suspicion existe, les questions liées à sa sexualité doivent être abordées. Toutes ces étapes sont anxiogènes et, par conséquent, sexuellement délétères », insistait le Dr Michel Schouman, urologue et andrologue, lors des 13es Rencontres infirmières en oncologie (1).

S'agissant des cancers traités par prostatectomie, le médecin a tenu à battre en brèche quelques idées reçues : « À en croire les statistiques communiquées lors de congrès ou publiées dans les revues scientifiques, 80 % des hommes disent conserver une érection après une opération. D'expérience, je peux dire que la réalité est bien différente. » Pour le praticien, cette distorsion s'explique, notamment, par les séries de patients incluses dans les études. « La plupart ne sont revus qu'une seule fois pour un contrôle de cicatrice et, à cette occasion, la sexualité n'est presque jamais évoquée. Par défaut, on considère donc que tout va bien. » Or, selon lui, à peine 30 % des opérés verraient leur sexualité maintenue après un traitement chirurgical, les autres souffrant de troubles plus ou moins sévères de l'érection.

Pour le médecin, « Une fois la cicatrisation achevée, il faut encourager les patients à reprendre une activité sexuelle. Sinon, les muscles lisses de la verge s'atrophient et des tissus fibreux se développent à la place d'un collagène de bonne qualité. » Pour que l'érection se produise, il faut que les corps caverneux se relâchent et laissent affluer le sang. Pour favoriser ce relâchement, plusieurs traitements peuvent être proposés, soit « per os », soit par injection. Dans la classe des inhibiteurs de la phosphodiestérase de type 5, Viagra ®, Cialis ® et Levitra ® peuvent être prescrits. Leur délai d'action va de trente minutes à plusieurs heures, Mais ils restent chers et non remboursés. « Et, attention, prévient le Dr Schouman, avec ces produits, il n'y a pas d'érection sans stimulation sexuelle. »

Le bon dosage

S'agissant des molécules injectables, la prostaglandine E1 (Edex ®, Caverject ®) est utilisée. « Il faut trouver le bon dosage pour que l'érection ne soit ni trop courte ni trop longue (sinon, elle peut-être douloureuse), et apprendre au patient à réaliser l'injection. » La prostatectomie empêche toute éjaculation, mais les patients peuvent avoir des orgasmes. « Ils les décrivent comme différents, note le médecin, mais souvent plus forts. »

1- Le 13 mars à Paris.

Trop fréquent

Le cancer de la prostate entraîne 10 000 décès par an. Il est le cancer le plus fréquent chez les hommes de plus de 50 ans et la deuxième cause de décès par cancer après celui du poumon. À l'apparition de symptômes tels que des troubles urinaires et sexuels, son dépistage repose sur le toucher rectal, le dosage de l'antigène spécifique de la prostate (PSA) et une biopsie du tissu prostatique.