Le cancer du pancréas - L'Infirmière Libérale Magazine n° 343 du 01/01/2018 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Libérale Magazine n° 343 du 01/01/2018

 

Cahier de formation

Savoir

Longtemps silencieux cliniquement, le cancer du pancréas est souvent diagnostiqué à un stade avancé, lorsque la chirurgie n’est plus possible.

Le pronostic du cancer du pancréas reste très sombre, avec une survie nette à cinq ans de l’ordre de 7 %. Son incidence ne cesse d’augmenter dans les pays occidentaux, en particulier en France. En dehors du tabagisme et des facteurs génétiques, plus de 70 % des cancers du pancréas surviennent sans cause établie.

ANATOMIE

Présentation

→ Le pancréas est un organe profondément enfoui dans l’abdomen, en arrière de l’estomac, tout contre l’intestin (voir l’illustration ci-dessous). Il s’étend transversalement entre le foie et la rate. Il comprend trois parties : la tête, le corps et la queue. La tête est enchâssée dans le duodénum.

→ À l’intérieur du pancréas, organe très mou, friable et fragile, un réseau de canaux achemine le suc pancréatique vers le canal de Wirsung (voir l’illustration page de droite). Ce dernier rejoint le canal cholédoque qui traverse la tête du pancréas et apporte la bile produite par le foie dans l’intestin. La bile participe à l’absorption des graisses et de certaines vitamines. Le canal de Wirsung et la voie biliaire déversent respectivement le suc pancréatique et la bile dans le duodénum, au niveau d’un orifice, l’ampoule de Vater. À cet endroit, se trouve le sphincter d’Oddi.

→ Le pancréas est situé dans un réseau de vaisseaux importants : la veine porte, le tronc cœliaque et l’artère hépatique, qui irrigue le foie, la rate et l’estomac, et l’artère et la veine mésentériques supérieures, qui alimentent l’intestin.

Deux fonctions essentielles

Réguler le taux de glucose

Les cellules des îlots de Langerhans reparties dans tout le pancréas représentent 10 % des cellules pancréatiques. Elles produisent des hormones, en particulier l’insuline et le glucagon. On parle de pancréas endocrine. Ces deux hormones régulent la glycémie. Ainsi, l’insuline diminue la quantité de glucose dans le sang tandis que le glucagon l’augmente. La production de ces hormones varie en fonction des besoins. Si l’organisme nécessite de l’énergie, les cellules des îlots fabriquent du glucagon pour augmenter la quantité de glucose dans le sang. Si la glycémie est élevée, de l’insuline est produite pour augmenter l’utilisation de glucose.

Aider à la digestion

Le suc pancréatique contient des enzymes qui décomposent les aliments en éléments nutritifs : protéines, lipides, sucre…. Ces enzymes sont produites par les cellules acineuses du pancréas, cellules exocrines (ainsi appelées parce qu’elles libèrent des substances en dehors du pancréas) qui représentent près de 90 % des cellules pancréatiques.

CANCERS ET TUMEURS

Formes malignes

→ L’adénocarcinome (90 % des cas) touche le plus souvent la tête du pancréas et se développe à partir des cellules qui produisent le suc pancréatique.

→ Différentes formes rares (10 % des tumeurs pancréatiques) :

• les carcinomes neuroendocrines, qui se développent aux dépens des cellules endocrines (2 à 3 % des tumeurs) ;

• les cystadénocarcinomes (1 à 2 %), évolution maligne des cystadénomes, kystes qui évoluent en cancer dans 6 à 36 % des cas(1) ;

• d’autres formes de cancers rares, comme les adénocarcinomes polymorphes, les carcinomes adénosquameux (adénoacanthomes), les carcinomes à cellules acineuses, les micro-adénocarcinomes, les pancréatoblastomes ou les oncocytomes malins.

Tumeurs bénignes

Elles représentent 2 % des masses suspectes. Les pseudokystes pancréatiques et les cystadénomes séreux sont les formes les plus fréquentes.

ÉPIDÉMIOLOGIE

Incidence

Elle est de près de 10 000 nouveaux cas par an en France en 2015 (5 469 nouveaux cas pour les femmes et 5 859 pour les hommes)(2). Le cancer du pancréas est un cancer relativement rare (1,8 % des cancers). Entre 2005 et 2012, le taux d’incidence a augmenté de 4,5 % chez les hommes et 5,4 % chez les femmes (3), pour atteindre respectivement, en 2012, 10,2 et 6,9 pour 100 000.

Survie nette et décès

La survie nette (si la seule cause de décès est le cancer du pancréas) à cinq ans des patients atteints d’un cancer du pancréas est de 8 % pour les hommes et de 7 % pour les femmes(4). En cas de chirurgie suivie de chimiothérapie, la survie est de l’ordre de 25 % à cinq ans(1). Le nombre de décès par cancer de pancréas en France, en 2012, a été estimé à près de 5 000 cas pour la femme et 5 000 cas pour l’homme(3). Le taux de mortalité standardisé n’est pas connu en raison du manque de fiabilité des données (3). Le cancer du pancréas se situe parmi les cancers de mauvais pronostic (survie nette à cinq ans inférieure à 33 %).

FACTEURS DE RISQUE

Le tabagisme(5)

Le tabac multiplie par trois le risque de cancer de pancréas et est responsable de 21 % des décès. Le risque de cancer augmente avec la consommation de tabac : 2 % pour une cigarette fumée par jour contre 62 % pour 20 cigarettes fumées par jour. La durée du tabagisme augmente le risque : de 1 % pour une année de tabagisme versus 16 % pour dix années de tabagisme.

La génétique

Les formes familiales concernent 5 à 10 % des cas. Si aucun gène responsable n’a été identifié, on sait en revanche que le risque augmente en cas d’agrégation de cas dans une famille(1). Certains syndromes familiaux sont associés à un risque accru de cancer pancréatique. Les formes familiales de cancer du sein et de l’ovaire (gènes BRCA2 et BRCA1) et les mélanomes multiples familiaux (gène codant pour un suppresseur de tumeur p16/MTS1) sont des facteurs de risque.

Les facteurs discutés(5)

Liés à la nutrition

→ Le surpoids. Il est corrélé à une hausse du risque de cancer du pancréas. En revanche, le niveau de preuve n’est pas suffisant pour associer cancer du pancréas et manque d’exercice physique.

→ Une consommation d’alcool excessive et régulière. Elle augmenterait le risque en favorisant une pancréatite chronique, mais les résultats ne font pas l’unanimité. De son côté, le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC) considère qu’il n’y a probablement pas de lien entre la consommation d’alcool et le cancer du pancréas.

→ La consommation de viande rouge. Elle a fait l’objet de nombreuses études, mais les résultats ne permettent pas d’affirmer que cette consommation entraîne un risque accru de cancer pancréatique. À noter : la viande rouge a été classée par le CIRC comme facteur probablement cancérogène. Les données les plus solides sur lesquelles se sont appuyés les experts concernent le cancer colorectal (voir le cahier de formation de notre n° 338).

→ Une alimentation supplémentée en folates. Alors que le rôle des folates (fruits, légumes verts, etc.) est démontré dans la synthèse et la réparation de l’ADN, une méta-analyse reposant sur six études de cohortes et quatre de cas témoins avance l’hypothèse que l’apport en folates préviendrait le cancer du pancréas.

→ La consommation de café. Une association entre la consommation de café et le cancer du pancréas est considérée comme peu probable au vu des données actuelles.

→ Le diabète. Il est présent chez 40 à 60 % des patients atteints d’un cancer du pancréas(6). Le diabète est-il une cause ou une conséquence du cancer ? Les données sont insuffisantes pour conclure.

Professionnels

→ Une exposition aux rayons X et au rayonnement γ. Un lien est suspecté avec la survenue du cancer pancréatique, mais des travaux supplémentaires doivent être réalisés pour confirmer une relation dose-réponse.

→ Une exposition aux pesticides. Des données contradictoires ont été obtenues auprès des agriculteurs. De plus amples travaux doivent être réalisés pour trancher. Néanmoins, l’Inserm a précisé qu’il convient d’être vigilant sur les effets des pesticides au niveau du pancréas, car ils sont susceptibles d’activer les voies œstrogéniques.

→ Les solvants, métaux tels que le nickel, le chrome, la silice, des insecticides organochlorés, l’amiante ou les radiations ionisantes sont aussi suspectés. Des études complémentaires sont nécessaires.

SYMPTÔMES

La maladie reste longtemps silencieuse cliniquement. Le plus souvent, les symptômes apparaissent lorsque la tumeur grandit et perturbe le fonctionnement de l’organe et son environnement.

Trois principaux signes

→ Douleurs : souvent intenses et lancinantes, elles sont situées au niveau du creux de l’estomac (épigastre) et se projettent typiquement sous les côtes et en arrière vers le dos, « en ceinture ». Souvent, les patients consultent d’abord un rhumatologue, pensant qu’il s’agit d’une affection du rachis. Ces douleurs ne se calment pas en position allongée.

→ Amaigrissement : le plus souvent rapide et important, il a de multiples causes, comme la douleur, la perte d’appétit, une moins bonne digestion (défaut des enzymes pancréatiques).

→ Ictère : il apparaît progressivement, d’abord au niveau des yeux, puis sur la peau. L’ictère est souvent précédé d’une coloration des urines et d’une couleur pâle des selles (la bile passe dans les urines au lieu des selles).

Autres symptômes éventuels

Un prurit accompagnant l’ictère, des selles grasses du fait de la mauvaise digestion des lipides, des vomissements dus à l’obstruction de l’intestin par la tumeur, une phlébite apparemment spontanée due à la sécrétion de certaines substances par la tumeur rendant le sang moins fluide, une pancréatite aigüe, l’apparition d’un diabète, une dépression liée à la fatigue prolongée entraînée par le cancer…

DIAGNOSTIC PAR IMAGERIE

Diagnostiquer

L’échographie

Cette technique permet de voir correctement le pancréas dans 20 % des cas seulement, car l’organe, profondément enfoui, n’est pas facile à visualiser. L’intérêt de l’échographie est qu’elle permet de repérer des masses suspectes et des signes « indirects », comme une dilatation des canaux qui transportent la bile ou une grosse vésicule biliaire. Elle est complétée d’un scanner.

Le scanner thoraco-abdomino-pelvien

Cet examen non invasif qui permet, à l’aide de rayons X, de réaliser une imagerie en coupe du thorax, de l’abdomen et du pelvis, comprend la réalisation de clichés après injection de produit de contraste dans une veine. Cette injection peut induire une sensation de chaleur, parfois désagréable. Il est demandé au patient de boire de l’eau juste avant l’examen pour que l’estomac soit bien visible et séparé du pancréas. S’il est diabétique, le patient doit le signaler : certains médicaments doivent être interrompus quarante-huit heures avant le scanner et repris quarante-huit heures après. Le scanner est l’examen clé pour le diagnostic d’inflammation pancréatique ou de tumeur du pancréas. Sa sensibilité est de 90 %. En cas de tumeur, il permet de préciser sa taille, sa localisation et d’évaluer son extension. Il permet souvent à lui seul de prédire si une tumeur peut être enlevée par chirurgie ou non.

Évaluer l’étendue de la tumeur

L’IRM

Examen très utile pour détecter de petites métastases, dans le foie en particulier. Sa réalisation est assez longue : vingt à trente minutes. Si le patient est claustrophobe, un tranquillisant pourra lui être proposé. L’examen comporte des bruits assez importants. Des bouchons dans les oreilles peuvent être utiles.

L’écho-endoscopie

Elle est proposée lorsque les limites de la tumeur ne sont pas clairement visualisées par le scanner. L’écho-endoscopie permet alors de préciser les relations entre la tumeur qui se développe et les vaisseaux autour du pancréas. Le but est de déterminer si une intervention par chirurgie est possible. Cet examen permet aussi de faire des biopsies du pancréas, pour déterminer la nature (cancéreuse ou non, type de cancer) d’une éventuelle tumeur. Le médecin introduit l’endoscope par la bouche du patient et le dirige vers l’estomac et le duodénum. À son extrémité, une sonde d’échographie permet d’obtenir des images de l’intérieur. L’écho-endoscopie se déroule pendant environ vingt minutes pour un examen simple sans ponction. Elle est réalisée sous anesthésie générale.

La biopsie

Un échantillon de tissu est prélevé durant l’écho-endoscopie. Une aiguille pour le prélèvement est déployée par l’écho-endoscope. Le tissu prélevé peut être analysé au microscope (diagnostic histologique).

TRAITEMENTS

La résection chirurgicale

Elle est le seul traitement curatif. Seuls 20 % des patients peuvent en bénéficier(7). La chirurgie du pancréas est une intervention lourde qui peut durer de cinq à six heures. Deux types d’intervention sont couramment réalisés.

La duodénopancréatectomie céphalique (DPC)

C’est l’intervention de référence (voir l’illustration en bas à droite) pour les tumeurs de la tête du pancréas. Elle consiste d’abord à retirer la partie droite du pancréas et une partie du duodénum. La vésicule biliaire, le canal cholédoque et une partie de l’estomac peuvent également être retirés si les cellules cancéreuses se sont disséminées.

Après la résection, il faut rétablir :

→ le circuit digestif en suturant l’estomac restant sur l’intestin grêle : on parle d’anastomose gastro-jéjunale ;

→ Le circuit biliaire en abouchant la voie biliaire principale dans l’intestin grêle : on parle d’anastomose bilio-digestive.

Il faut également aboucher la partie restante du pancréas, soit dans l’estomac, soit dans l’intestin grêle : on parle d’anastomose pancréatico-gastrique ou pancréatique jéjunale. Le chirurgien introduit un tube dans le pancréas, qui sert de canal artificiel dans lequel s’écoulent les enzymes pancréatiques, acheminées jusque dans le tube digestif.

La splénopancréatectomie

L’intervention consiste à retirer la partie gauche du pancréas, mais aussi la rate, dont les vaisseaux passent au contact du pancréas (voir l’illustration en haut à droite). Cette intervention est plus simple que la DPC, car le circuit digestif biliaire et pancréatique n’est pas à refaire.

La pancréatectomie totale

Elle est indiquée pour certaines tumeurs diffuses dans le pancréas, précancéreuses ou à un stade très précoce de cancérisation (situation très rare). La pancréatectomie entraîne une insuffisance exocrine (mauvaise digestion des graisses provoquant une diarrhée), à corriger par des médicaments (extraits pancréatiques). Il convient également de corriger le diabète.

La chimiothérapie

Indiquée dans trois situations

→ Quand le cancer est avancé (pas de résection envisagée), généralement parce qu’il y a présence de métastases à distance, un développement locorégional important ou encore une rechute après opération. L’objectif est d’augmenter la durée de vie du patient et d’améliorer sa qualité de vie en empêchant ou en retardant la survenue de symptômes désagréables : douleurs, troubles digestifs avec amaigrissement, ictère, etc. Plusieurs lignes de chimiothérapies peuvent être proposées, en fonction de l’état général, de la motivation du patient et de l’évolution de la maladie. L’amélioration de l’état général du patient est un critère essentiel pour décider de la poursuite du traitement, même en l’absence de réponse objective (tumorale).

→ En situation adjuvante, après une résection chirurgicale, l’objectif est d’éliminer les éventuelles cellules cancéreuses restantes et de diminuer les risques de rechute. La chimiothérapie permet d’augmenter quelque peu la survie des patients.

→ Avant une éventuelle chirurgie, en cas de tumeur sans métastase, pour faciliter l’exérèse en diminuant la taille de la tumeur.

Les médicaments et leurs effets secondaires

→ Les antimétabolites (gemcitabine, 5-fluorouracile ou 5-FU, capécitabine) bloquent la réplication de l’ADN et la synthèse des protéines, empêchant les cellules tumorales de se diviser.

Les effets secondaires de la gemcitabine sont : fièvre, frissons et douleurs musculaires (ressemblant aux symptômes d’une grippe légère) se manifestant en général dans les quarante-huit heures suivant la perfusion, fatigue, perte d’appétit, nausée ou vomissements. Les effets indésirables du 5-FU et de la capécitabine sont : diarrhée, mucites, modification de la peau des mains et des pieds (rougeurs, ulcérations et/ou peau qui pèle) et, très rarement, douleurs thoraciques d’origine cardiaque exigeant l’arrêt de la chimiothérapie. Les modifications de la peau des mains et des pieds sont souvent plus sévères avec les formes orales de 5-FU (capécitabine).

→ Les dérivés du platine (oxaliplatine et cisplatine) ont pour but d’empêcher la réplication de l’ADN des cellules, notamment des cellules tumorales. L’oxaliplatine peut induire une neuropathie sensitive. Augmentant au fur et à mesure des cures, celle-ci est réversible à l’arrêt du traitement. Si les symptômes sont sévères, la chimiothérapie doit obligatoirement être interrompue.

→ Les inhibiteurs de la topoisomérase de type I (irinotécan), qui modifient la structure de l’ADN. L’irinotécan peut induire les effets indésirables suivants : fatigue, diarrhée, syndrome vagal, perte transitoire des cheveux.

→ Les associations sels de platine (oxaliplatine) ou irinotécan au 5-FU, appelées Folfox ou Folfiri (avec respectivement oxaliplatine et irinotécan). On peut également proposer l’association 5-FU, irinotécan et oxaliplatine, dite Folfirinox. Les associations peuvent induire les effets secondaires correspondant à chacune des substances thérapeutiques. L’association Folfirinox a une toxicité plus importante que les autres traitements. Elle est réservée aux patients n’ayant pas de troubles hépatiques.

→ Le nab-paclitaxel (nanoparticules composées de molécules cytotoxiques liées à l’albumine), associé à la gemcitabine, a montré son efficacité pour traiter les cancers du pancréas métastatiques. Le nab-paclitaxel peut induire des neuropathies sensitives, réversibles dans la plupart des cas.

→ Une thérapie ciblée (erlotinib) en association avec la gemcitabine a montré son efficacité par rapport à la gemcitabine en monothérapie. Il s’agit d’une molécule qui inhibe une enzyme dans la cellule tumorale qui sert à la division de celle-ci. L’erlotinib (comprimés) peut provoquer des éruptions ressemblant à de l’acné, et/ou des diarrhées.

La chimio-radiothérapie

Elle consiste à associer la chimiothérapie et la radiothérapie, ce qui est souvent plus efficace que la radiothérapie seule, car la chimiothérapie rend les cellules encore plus vulnérables aux rayons.

Deux indications

→ La tumeur a été retirée, mais le compte-rendu anatomopathologique conclut que l’exérèse n’est pas complète. Une chimio-radiothérapie peut être prescrite.

→ La tumeur n’est pas résécable, une chimiothérapie puis une chimio-radiothérapie peuvent être proposées.

Effets secondaires

Fatigue, douleurs abdominales et brûlures d’estomac (en général après deux semaines de traitement), nausées et vomissements (liés à l’action des rayons sur le plexus cœliaque), manque d’appétit, diarrhées (liées à l’irradiation du tube digestif).

TRAITEMENT DES COMPLICATIONS

La prothèse biliaire

Elle peut être proposée lorsque la tumeur se développe au niveau de la tête du pancréas et comprime la voie biliaire, empêchant alors l’écoulement de la bile dans l’intestin (cholestase). La bile stagne dans le canal cholédoque et peut induire un ictère, des démangeaisons, de la fièvre. Elle peut aussi causer des vomissements, car l’estomac n’arrive plus à se vider correctement. Une prothèse biliaire est un tube semi-rigide, en plastique ou métal, qui maintient le canal ouvert malgré la pression de la tumeur. Au bout de plusieurs mois, l’accumulation de sédiments de la bile ou la progression de la tumeur peuvent obstruer la prothèse. Si elle est en plastique, on la retire pour la changer. Si elle est en métal, on en pose une autre à l’intérieur pour la déboucher dans le cadre d’une nouvelle endoscopie. L’intervention sous anesthésie générale peut se dérouler à l’occasion d’une intervention chirurgicale ou par endoscopie.

La prothèse duodénale

On peut la proposer en présence d’une tumeur qui bloque le duodénum, empêchant le passage des aliments en provenance de l’estomac. La prothèse est un tuyau qui maintient le canal ouvert et rétablit le transit. Cette intervention a lieu le plus souvent par endoscopie.

La lutte contre la douleur

La douleur est fréquente, car le pancréas est localisé dans une région riche en nerfs sensitifs. Ils se regroupent en faisceaux et forment des ganglions nerveux, dans une région appelée le plexus cœliaque. Les douleurs peuvent être atténuées par :

→ la chirurgie avec alcoolisation du plexus cœliaque : si la tumeur n’est pas résécable, dans le cadre d’une dérivation biliaire ou du duodénum, le chirurgien peut injecter de l’alcool sur les nerfs qui émettent les signaux de douleur. Ce geste détruit les nerfs et peut être renouvelé en cas d’échec ;

→ la chimiothérapie avec réduction de la taille de la tumeur : elle permet de réduire, voire d’arrêter un traitement antalgique. L’effet n’est pas immédiat, mais est obtenu au moins un mois après le début de la chimiothérapie ;

→ la radiothérapie en cas de métastases osseuses : efficace pour diminuer les douleurs liées à ces métastases ;

→ l’administration d’antalgiques : les médicaments les plus utilisés sont les dérivés morphiniques ayant des durées d’action très variées (rapides, à libération prolongée), adaptées à toute situation (douleur aiguë, stabilisée, traitement prolongé). En cas de fortes douleurs, des injections de morphine par voie veineuse (« bolus ») peuvent être effectuées par une pompe à morphine auto-contrôlée.

(1) Association française de formation médicale continue en hépato-gastro- entérologie (FMC-HGE), “Peut-on dépister le cancer du pancréas ?” (lien : bit.ly/2o19WhZ).

(2) INCa, “Les cancers en France – Édition 2015”, 2015.

(3) INVS, INCa, Réseau Francim, Hospices civils de Lyon, “Estimation nationale de l’incidence et de la mortalité par cancer en France entre 1980 et 2012”, 2013 (lien : bit.ly/2iEavXk).

(4) INVS, INCa, Réseau Francim, Hospices civils de Lyon, “Survie des personnes atteintes de cancer en France métropolitaine 1989-2013”, 2016 (lien : bit.ly/2o1LSeR).

(5) Centre Léon Bérard (lien : bit.ly/2o1zTOD).

(6) FMC-HGE, “Facteurs de risque du cancer du pancréas” (lien : bit.ly/2AGO3KM).

(7) Association nationale française de gastro-entérologie, « Cancer du pancréas » (lien : bit.ly/2BcViqZ).

La classification TNM des stades du cancer

Les stades du cancer exocrine sont déterminés en fonction de l’extension de celui-ci. Pour quantifier l’évolution de la tumeur, on se réfère à une classification internationale, appelée TNM, qui résume le stade de l’extension tumorale : T pour tumeur, N pour ganglion (node en anglais) et M pour métastase.

→ Trois indicateurs

→ Les différents stades

Les contre-indications à une chimiothérapie

Si le patient présente un mauvais état général, c’est-à-dire en présence de comorbidités invalidantes (troubles cognitifs, insuffisance rénale, etc), une chimiothérapie n’est pas recommandée. Mais la question mérite quelques nuances. De fait, chez un patient en mauvais état général au moment du diagnostic, le traitement actif des symptômes peut parfois améliorer l’état général. À noter que l’âge n’est pas vraiment une contre-indication. Certes, il ne faut pas prescrire une chimiothérapie chez un patient très âgé qui aurait des comorbidités, mais on ne peut pas fixer arbitrairement une limite. La motivation du patient doit être évaluée avec le plus d’objectivité possible. Il convient de faire la distinction entre les souhaits de la famille et du médecin, et ceux du patient. Enfin, si une chimiothérapie est décidée mais qu’elle n’est pas bien tolérée, il faut savoir l’arrêter et laisser la place exclusive aux soins de confort.

Source : FMC-HGE, “La chimiothérapie de l’adénocarcinome du pancréas” (lien : bit.ly/2ySGdrH).

Je cote à la nomenclature

→ Changement de flacon(s) ou branchement en Y sur dispositif en place, intervention pour débranchement ou déplacement du dispositif, contrôle du débit pour une perfusion sans surveillance continue, en dehors de la séance de pose → AMI 4,1

→ Forfait pour l’organisation de la surveillance d’une perfusion, de la planification des soins, y compris la coordination avec les autres professionnels de santé, les prestataires et les services sociaux, à l’exclusion du jour de la pose et de celui du retrait, par jour (ne peuvent être notés, à l’occasion de cet acte, des frais de déplacement ou des majorations de nuit ou de dimanche) → AMI 4

→ Forfait pour arrêt et retrait du dispositif d’une perfusion, y compris le pansement, la tenue du dossier de soins, éventuellement la transmission d’informations nécessaires au médecin prescripteur (ce forfait ne se cumule pas avec un forfait de perfusion sous surveillance continue) → AMI 5

Entretien
Pr Pascal Hammel Gastro-entérologue, chef du service d’oncologie digestive de l’hôpital Beaujon (AP-HP)

« On opère moins, mais mieux »

Quoi de neuf en matière de dépistage ?

Pascal Hammel : Le dépistage est possible mais ne peut en aucun cas être généralisé. Il est strictement réservé à une petite fraction de personnes présentant des cancers du pancréas familiaux. Des examens de dépistage (écho-endoscopie et IRM), effectués tous les ans à partir de 50 ans dans des centres experts, peuvent être discutés pour les sujets en bonne santé. Avec le dépistage, l’idée est que le diagnostic soit précoce pour pouvoir traiter plus efficacement. Pour l’heure, cette stratégie est en cours d’évaluation pour savoir si elle est vraiment pertinente.

Côté traitements, quels sont les progrès qui ont modifié, ou sont en passe de le faire, la prise en charge ?

P. H. : Concernant la chirurgie, on peut mieux évaluer les tumeurs et décider si elles sont opérables ou pas, grâce à des examens performants comme l’association du scanner et de l’IRM de diffusion hépatique. Ainsi, pour les tumeurs susceptibles d’être opérables, il y a une meilleure sélection des malades pour la chirurgie et les traitements adjuvants. Résultat : on opère moins, mais mieux. En pratique, on n’opère plus d’emblée des patients dont la tumeur a un contact vasculaire comme on pouvait le faire auparavant, mais on discute un traitement néoadjuvant. On distingue mieux les tumeurs potentiellement opérables, représentant 15 % des malades, celles qui sont métastatiques inopérables (60 % des malades) et celles qui sont localement avancées mais non métastatiques (25 % des malades).

Et chez les sujets opérés ?

P. H. : Des essais ont été réalisés pour évaluer comme traitements adjuvants l’association gemcitabine et capécitabine (résultats publiés, étude positive), le Folfirinox et l’association gemcitabine + nab-paclitaxel, susceptibles d’être plus efficaces que la gemcitabine seule. Chez les patients présentant un cancer métastatique sans cholestase, depuis 2011, on dispose (progrès majeur) de deux schémas plus efficaces que la gemcitabine en monothérapie : le Folfirinox et la gemcitabine + nab-paclitaxel (2013). En deuxième ligne de traitement, plusieurs molécules ont été testées : l’irinotécan sous forme liposomale et la L-asparaginase, produit déjà indiqué pour certaines leucémies. Enfin, des traitements ciblent l’environnement tumoral (stroma). Ainsi, un essai est en cours pour évaluer l’efficacité d’un produit capable de détruire l’acide hyaluronique présent en forte concentration dans le stroma de certaines tumeurs, afin de les rendre plus sensibles à la chimiothérapie. En matière d’immunothérapie, en revanche, rien ne se dégage pour le moment en monothérapie (sauf cas particulier). Et pour cause, le pancréas est un organe contenant très peu de cellules immunitaires. Des associations immunothérapie + chimiothérapie devront être testées.

L’enjeu n’est-il pas de traiter dès les premiers symptômes ?

P. H. : Effectivement, c’est un concept très important, car la dégradation de l’état général est rapide. Afin de sensibiliser les populations, plusieurs actions sont en cours, comme l’étude “Urgence pancréas”, soutenue par la fondation Arcad, des opérations de communication auprès du grand public et la mise en place d’une association de patients/proches concernés par la maladie. Pour informer, il y aussi la Journée mondiale du cancer du pancréas qui a lieu chaque année le 17 novembre. L’enjeu est de taille : d’ici 2030, le cancer du pancréas sera la deuxième cause de mortalité par cancer après le cancer bronchique.

Comme c’est le cas pour d’autres tumeurs solides, peut-on considérer qu’il n’ya pas un seul cancer du pancréas mais plusieurs types qui répondent différemment aux traitements selon leur profil génétique ?

P. H. : Absolument. Dans le futur, il n’y aura pas d’unique traitement, car il n’existe pas un seul type de cancer du pancréas, mais plusieurs formes génétiquement différentes (au moins quatre). Par exemple, la mutation BRCA1/BRCA2, très connue dans les cancers héréditaires du sein et de l’ovaire, confère une grande sensibilité au traitement par les sels de platine. Cela concerne près de 5 % des personnes ayant un cancer du pancréas. D’où l’idée que des traitements ciblés pourraient être proposés pour certaines catégories de patients, selon les caractéristiques de la tumeur. Les cancers du pancréas avec instabilité des microsatellites (MSI) pourraient être sensibles aux immunothérapies.