Recourir à des activités complémentaires - L'Infirmière Libérale Magazine n° 343 du 01/01/2018 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Libérale Magazine n° 343 du 01/01/2018

 

Cahier de formation

Savoir faire

MÉDECINES COMPLÉMENTAIRES : VÉRIFIER CE QUI EST RAISONNABLE

« Selon diverses sources récentes, on considère qu’environ deux tiers des patients atteints d’un cancer se tournent, à un moment ou à un autre, vers les médecines complémentaires ou alternatives, indique le Dr Sylvie Dolbeault, psychiatre à l’Institut Curie à Paris. Et il s’agit de bien différencier les médecines parallèles – gourous, magnétiseurs, micro-nutrition –, des approches complémentaires des traitements spécifiques du cancer, qui sont intégrées dans les soins de support. Les pratiques sont vastes : nutrition équilibrée, relaxation, massage, sophrologie, yoga, acupuncture, homéopathie, ostéopathie, aromathérapie… »

Ainsi, de nombreux patients font appel à d’autres ressources que l’allopathie, et ce « d’autant plus quand le médecin n’est pas ou plus en mesure de proposer un traitement curatif ». C’est vrai quand le patient a le sentiment que l’équipe médicale en est réduite à une situation d’impuissance ou n’est pas assez à l’écoute de ses symptômes. La personne malade cherche alors des solutions de confort pour améliorer sa qualité de vie.

« Dans ce contexte, l’Idel se doit de rester ouverte au dialogue pour mieux appréhender ce que le patient a exploré. Surtout, elle doit l’inciter à émettre un jugement sur l’approche qu’il a testée, explique le Dr Sylvie Dolbeault. Considère-t-il qu’elle est bénéfique ? Est-elle anxiogène ? Il revient à l’Idel de vérifier l’esprit critique du patient et s’il prend bien cette approche en complément du traitement spécifique du cancer et pas en remplacement. » L’Idel doit aussi observer dans « quelles conditions le patient accède à la médecine alternative. Y a t-il soupçon de dérive sectaire, d’escroquerie ? S’agit-il d’une “arnaque” qui vante un produit miracle vendu à un prix exorbitant ? » Une fois ces risques écartés, l’Idel peut accompagner le patient dans sa démarche. De fait, « quand un patient est atteint d’une maladie grave non curable, il est normal qu’il cherche d’éventuelles autres solutions, qui vont au minimum améliorer son quotidien ».

Mais une autre dimension est aussi à considérer : « Le recours aux médecines alternatives reflète le besoin du patient de retrouver un peu le contrôle sur sa vie. Lorsqu’il apprend un diagnostic de maladie très grave, le patient subit. Lorsqu’on lui annonce que le traitement ne sera pas curatif, il subit. Enfin, il commence une chimiothérapie avec des effets secondaires, il subit encore ! Dans ce contexte, il est légitime qu’une personne essaye de retrouver un sentiment de contrôle, des points de maîtrise dans sa vie. »

PRÉVOIR DES ACTIVITÉS CONVIVIALES

Il convient d’inciter le patient qui reçoit une chimiothérapie à mener une vie la plus normale possible selon son état de fatigue. S’il s’en pense capable, le patient peut mener des activités attrayantes. C’est important. Il peut même, dans certains cas, continuer une activité professionnelle, dans la mesure où elle n’est pas trop difficile. Une activité physique modérée peut être envisagée (vélo, marche, etc.) dès lors qu’elle est bénéfique pour le moral et le physique. Entre les traitements, le patient peut prendre des vacances ou voyager selon une durée et une distance discutées avec le médecin. Pour les séjours éloignés, il faut prévoir une certaine flexibilité dans le temps, de façon à pouvoir les annuler ou les changer en cas de symptômes inopinés.

Cas pratique

Mme D., 74 ans, a reçu une chimiothérapie adjuvante durant six mois. Vous intervenez pour une prise de sang avant sa dernière cure afin de vérifier que le nombre de globules blancs et de plaquettes autorise sa réalisation. Mme D. vous confie qu’elle vient de prendre un rendez-vous avec un magnétiseur pour l’aider à « reprendre le dessus ». Elle vous fait part également de ses recherches sur le jeûne qui, dit-elle, pourrait aider le corps à détruire les cellules cancéreuses. Des « stages » de jeûne sont proposés par un naturopathe non loin de chez elle. Elle vous demande votre avis. Mme D. continue de consulter une fois par semaine une psychologue.

Il n’est pas toujours évident de savoir quoi répondre concernant le recours à un magnétiseur. Vous essayez d’interroger Mme D. sur les messages qu’il lui a transmis et les prix qu’il pratique. Vous lui demandez si les séances lui ont apporté du bien-être et vous lui suggérez d’en faire part à la psychologue. Quant à la pratique du jeûne, vous rappelez à Mme D. qu’elle doit absolument faire des repas équilibrés durant toute la période du traitement. Vous lui conseillez d’en parler à son médecin.