La richesse d’une reconversion professionnelle - Objectif Soins & Management n° 194 du 01/03/2011 | Espace Infirmier
 

Objectif Soins n° 194 du 01/03/2011

 

FRANCIS MONPROFIT

Parcours

Joëlle Maraschin  

Avant d’embrasser la profession infirmière, Francis Monprofit a travaillé pendant près de 15 ans dans une usine de métallurgie. Après avoir exercé comme infirmier en réanimation puis comme cadre de nuit, il est aujourd’hui cadre de santé formateur.

Avec l’ouverture de plus en plus importante des Ifsi à des adultes en reconversion, nombre d’étudiants en soins infirmiers se sont déjà frottés à des univers professionnels parfois fort éloignés du monde des soins. Loin d’être un handicap pour construire leur seconde vie professionnelle, un parcours atypique peut au contraire représenter une véritable richesse comme en témoigne l’expérience de Francis Monprofit. « Il est possible d’avoir un parcours particulier et d’y arriver avec de la volonté et de la motivation », estime Francis Monprofit.

Infirmier à 35 ans

Originaire d’un petit village près de Montrichard dans le Loir-et-Cher, Francis Monprofit n’avait dans sa jeunesse que peu d’intérêt pour les études. A 18 ans, il entre sur le marché du travail sans aucun diplôme. Recruté comme simple employé dans une usine de métallurgie de sa région, il gravit en quelques années les échelons de l’entreprise et devient responsable d’une chaîne de production. Au début des années 1990, la conjoncture économique est difficile dans le secteur de la métallurgie. Ouvriers et agents de maîtrise de l’usine sont souvent au chômage technique. « Je n’avais aucun diplôme, je me demandais ce que j’allais pouvoir faire en cas de dépôt de bilan de mon entreprise », se souvient Francis Monprofit. Au même moment, il découvre l’univers hospitalier en accompagnant l’un de ses proches malade. C’est pour lui une révélation, la perspective d’un nouvel élan professionnel tourné vers le soin et les autres. Il n’est pas bachelier et met tout en œuvre pour pouvoir s’engager dans cette voie. Tout en travaillant, il se prépare à l’ESEU (Examen spécial d’entrée à l’université), un examen réputé difficile équivalent au baccalauréat. Il réussit cette épreuve du premier coup, et en juillet 1993 il passe avec succès le concours d’entrée à l’Ifsi de Ville-Evrard. Soucieux de se rapprocher de son jeune fils qui vit à Blois, Francis Monprofit obtient une dérogation pour effectuer sa formation à l’Ifsi d’Amboise. Rémunéré pendant un peu plus d’un an grâce à un congé individuel de formation, il poursuit ensuite ses études en puisant sur ses réserves personnelles et en travaillant la nuit et les week-ends comme aide-soignant. « Ce n’était pas évident mais j’étais motivé, confie-t-il. Et j’ai trouvé beaucoup de plaisir à ces études, réapprendre différemment, essayer de comprendre. »

La réanimation et la découverte de la PNL

Il commence sa carrière professionnelle d’infirmier en fin d’année 1996 dans une clinique spécialisée en oncologie. Au bout de sept mois, il rentre au CH de Blois comme infirmier de nuit dans un premier temps, puis comme infirmier dans le service de réanimation et de Samu-Smur. Il restera près de sept ans dans ce service de réanimation.

« La réa me plaît énormément, je suis très intéressé par toute la dimension relationnelle avec ces patients en grande difficulté et leurs familles », ajoute-t-il. Il s’interroge alors sur les moyens de mieux communiquer avec les patients, et décide de se former aux techniques de PNL. Aujourd’hui maître praticien en PNL, il estime que cette technique lui a permis de s’ouvrir non seulement aux autres mais aussi sur lui-même. « Mes collègues me conseillaient souvent de faire l’école des cadres au regard de mon parcours professionnel, de mon engagement auprès des étudiants. La PNL m’a permis de confirmer ce qui était sous-jacent, cette envie de former de jeunes étudiants en soins infirmiers », explique-t-il.

Cadre de nuit, cadre de terrain

En 2005, il part à l’IFCS du CHU de Poitiers dans l’idée de devenir cadre formateur. A son retour au CH de Blois, la direction des soins lui propose cependant un poste de cadre de santé de nuit. Pendant deux ans, il travaille de 18 h à 3 h du matin comme cadre de nuit. Il s’occupe de l’ensemble des services de l’hôpital, gère les plannings de près de 120 agents. « Pour un cadre de nuit, la gestion des plannings représente près de 80 % de l’activité professionnelle », continue-t-il. En même temps, cette fonction donne une véritable ouverture sur l’institution puisqu’elle permet d’aller sur tous les terrains. » Si Francis Monprofit apprécie cette expérience sur le terrain, il n’oublie pas pour autant son projet de départ. « J’avais un contrat moral avec le CH de Blois, ce qui explique que je suis resté deux ans comme cadre de terrain. Mais comme il n’y avait toujours pas de disponibilité de poste de formateur à Blois, j’ai choisi de quitter l’hôpital pour réaliser mon projet », précise-t-il.

Un formateur épanoui

En détachement du CH de Blois, il rejoint début janvier 2009 l’équipe de formateurs de l’Ifsi de la Croix-Rouge à Tours. C’est un challenge pour lui, il souhaite intégrer la formation avec la mise en place du nouveau programme.

« Je me sens en plein épanouissement professionnel dans la richesse et la diversité du métier de formateur », souligne-t-il. Coordinateur de la seconde promotion d’entrée dans le nouveau programme, il voit son rôle de formateur comme celui d’un accompagnateur des étudiants en soins infirmiers. « Ma mission est de leur apporter les bases pour devenir des professionnels sur lesquels il sera possible de compter mais surtout de leur donner l’envie d’exercer ce métier. Je leur demande souvent de s’interroger sur eux-mêmes, sur leurs attentes, leurs souhaits », ajoute Francis Monprofit. Il dit utiliser très régulièrement les techniques de PNL avec ses étudiants, mais il s’appuie aussi sur l’ensemble de son expérience professionnelle. « En tant qu’agent de maîtrise, j’étais dans l’organisation, la conduite de projet, la dynamisation d’une équipe. Et tout cela m’est fort utile au quotidien », poursuit-il. Âgé de 50 ans, Francis Monprofit souhaite continuer sa carrière dans la formation. Il a le projet de suivre un master en ingénierie de formation, éventuellement sur son temps personnel s’il ne parvient pas à obtenir un financement.

« Mon parcours m’a certes appris à me remettre en question mais aussi à avoir confiance en moi, analyse-t-il. Et je sais maintenant toujours où je veux aller, ce que je souhaite. »