PROTOCOLES DE COOPÉRATION : LA HAS VEUT PASSER À LA VITESSE SUPÉRIEURE - Ma revue n° 044 du 01/05/2024 | Espace Infirmier
 

L'infirmière n° 044 du 01/05/2024

 

ACTUALITÉS

POLITIQUE PUBLIQUE

Laure Martin  

La Haute Autorité de santé (HAS) a rendu publique, mi-mars, sa position sur la mise en œuvre des protocoles de coopération et le partage des tâches entre professionnels de santé. Elle appelle à une accélération de leur déploiement pour élargir et améliorer la prise en charge des patients.

Les protocoles de coopération permettent à des professionnels de santé - notamment des infirmiers - travaillant en équipe d’opérer entre eux des transferts d’activités ou d’actes en réorganisant leurs modes d’intervention auprès des patients. Déployés depuis 2009, ils visent à atteindre des objectifs variés et complémentaires : réduire les délais d’accès aux soins, renforcer l’attractivité des métiers et améliorer la qualité des services rendus. Fin 2023, 57 protocoles nationaux de coopération étaient autorisés. En 2022, ils ont permis à un peu plus de 400 000 patients de bénéficier de près de 600 millions d’actes délégués. « Ce résultat est d’autant plus remarquable que très peu d’évènements indésirables ont été rapportés (0,12 %) et qu’aucun évènement indésirable grave n’a été déclaré », constate la HAS. S’agissant de la qualité des actes délégués, un peu moins de 40 000 patients (9,1 %) ont été réorientés vers les délégants, dont plus du tiers pour les seuls protocoles d’écho graphie entre radiologues et manipulateurs en électroradiologie médicale. D’autres réorientations sont aussi intervenues, uniquement parce qu’elles étaient prévues aux protocoles.

Des résultats perfectibles

Malgré ces résultats prometteurs, la HAS estime que cette politique publique doit franchir un nouveau cap. Car, d’après elle, l’application des protocoles de coopération reste très hétérogène. Si certains concernent plusieurs milliers de patients, d’autres n’en impliquent que quelques dizaines. Le nombre de protocoles nationaux reste tout de même « faible », de même que parmi les 106 protocoles locaux autorisés, très peu ont évolué vers une application nationale. Enfin, « des obstacles organisationnels et financiers mettent en échec les progrès attendus », regrette la HAS. À titre d’exemple, vingt-et-un mois après l’avis favorable donné par la Haute Autorité concernant le protocole de coopération entre médecins et infirmiers pour la prise en charge, à domicile, des patients âgés ou en situation de handicap et en difficulté pour se déplacer aux cabinets des médecins, la rémunération du protocole n’était toujours pas fixée. Par ailleurs, les objectifs attendus pour l’amélioration de la prise en charge des patients, l’attractivité des métiers de la santé et les réponses aux tensions sur l’offre de soins ne sont pas atteints, et ce en dépit de « la création des Communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS) et des potentialités du numérique en santé, qui offrent des opportunités nouvelles pour des coopérations et des partages de tâches ».

Lever les obstacles

Face à ces constats, la HAS plaide pour que les obstacles recensés soient levés, à commencer par les complexités administratives pour la mise en œuvre des protocoles de coopération. Elle propose d’aménager les procédures sur la base d’un cahier des charges national qu’elle aura élaboré et que les agences régionales de santé (ARS) pourraient appliquer afin d’examiner plus rapidement les demandes de protocoles dans des garanties de sécurité et de qualité conservées.

La HAS estime également que la rémunération à l’acte bloque le développement des coopérations et plaide pour la création d’un forfait de coopération valorisant pour tous les acteurs impliqués. Enfin, elle revendique une évaluation rigoureuse des partages de tâches « afin de garantir la qualité des soins, transmettre les savoirs acquis et guider la réflexion ainsi que les initiatives réglementaires, dans la mesure où ces partages et coopérations sont le plus souvent une première étape avant la modification des décrets de compétences ».

Pour aller plus loin

« Accélérer les coopérations et les partages de tâches entre professionnels de santé ». Position de la HAS mise en ligne le 13 mars 2024 : https://tinyurl.com/y6ahrd7r