L’INFORMATIQUE AU SERVICE DE LA PRATIQUE - Ma revue n° 033 du 01/06/2023 | Espace Infirmier
 

L'infirmière n° 033 du 01/06/2023

 

JE DIALOGUE

Laure Martin  

D’abord référente du dossier patient informatisé et désormais infirmière responsable des applications métiers au sein du centre hospitalier privé de Sainte-Marie (Val-d’Oise), Laura Boller a su saisir les opportunités pour monter en compétences.

Pouvez-vous raconter votre parcours ?

Laura Boller : J’ai commencé à exercer au sein de la clinique Sainte-Marie il y a une quinzaine d’années, en chirurgie. En 2013, lorsque la direction a décidé de l’informatisation des dossiers patients, elle a souhaité la présence d’un référent par service, et je me suis positionnée pour le mien. Mon rôle consistait à aider au paramétrage du logiciel afin qu’il soit adapté aux besoins des infirmiers de chirurgie. J’intervenais également dans le cadre de la rédaction des protocoles de soins pendant les séjours hospitaliers des patients et ceux du bloc opératoire. J’ai d’emblée trouvé cette mission intéressante, car déjà à l’époque, il était acté que l’informatisation des hôpitaux allait se généraliser et devenir le standard. Autant s’impliquer pour suivre l’évolution et la répercussion sur nos pratiques.

Et ensuite ?

L. B. : Lorsque la personne qui gérait le déploiement du logiciel au sein de l’ensemble de la structure a démissionné, la direction, ayant constaté mon implication, m’a proposé de prendre son poste. J’ai immédiatement accepté car je l’ai vu comme un défi à relever. J’étais donc à 50 % infirmière de soins et à 50 % sur la gestion du déploiement du dossier patient, cette fois-ci pour l’ensemble de l’établissement. Je n’ai pas bénéficié de formation particulière. J’étais surtout en relation étroite avec l’éditeur du logiciel afin d’apprendre à paramétrer l’outil.

Quel était l’enjeu autour de ce poste ?

L. B. : Il était particulièrement important puisqu’il fallait que cette transition informatique devienne opérationnelle sans alourdir les procédures. Il s’agissait de paramétrer tous les protocoles concernant l’ensemble des professionnels de santé et le personnel administratif de l’établissement. J’ai écouté les attentes de chacun, cherché à les comprendre au mieux pour les intégrer dans la programmation du logiciel. Ensuite, j’ai organisé des formations, par groupe, de l’ensemble des acteurs concernés. L’intégralité de la clinique a été informatisée en six mois.

Le fait d’être infirmière a-t-il changé la donne ?

L. B. : C’est un avantage, à l’époque et encore maintenant, car lorsque je dois, par exemple, former les médecins, ils ne me considèrent pas uniquement comme une personne derrière un bureau. Étant une ancienne infirmière de service, je comprends les enjeux et les protocoles qu’ils souhaitent mettre en place assez rapidement. Mon métier me permet d’avoir un poids supplémentaire et positif. C’est d’autant plus important que lorsque la clinique a été rachetée par le groupe Vivalto, les logiciels ont été modifiés pour une uniformisation des systèmes informatiques sur l’ensemble du territoire. J’ai donc dû reprendre tout le travail. La direction m’a aussi proposé d’exercer à temps plein et de devenir infirmière responsable des applications métiers.

En quoi consiste cette évolution ?

L. B. : Désormais, je ne me limite pas aux logiciels de soins. J’assure le déploiement de l’ensemble des logiciels transversaux que les professionnels de santé utilisent dans leur quotidien. Je m’occupe de leur paramétrage, des formations des professionnels impliqués, tout en tenant compte, en amont, de leurs besoins. Car mon objectif reste avant tout de leur faciliter la vie au quotidien, d’adapter le logiciel afin qu’il soit le plus pratique pour eux, pour leur libérer du temps médical et qu’ils puissent rester au maximum au plus près des patients. À titre d’exemple, lorsqu’un patient est hospitalisé pour une pathologie particulière, un protocole y est associé et il permet à l’ensemble des acteurs concernés par la prise en charge de savoir exactement quel rôle tenir, quels actes effectuer, quels contrôles assurer en fonction du moment. Nous pouvons, d’un point de vue informatique, planifier et paramétrer l’ensemble des soins, des examens, des radiologies ou encore le régime alimentaire. Ce fonctionnement fait gagner du temps à tous, permet d’éviter les oublis et sécurise la prise en charge. C’est d’autant plus important lorsqu’il y a des vacataires qui ne connaissent pas nécessairement le fonctionnement de l’hôpital. Bien entendu, les protocoles sont amenés à évoluer avec le temps.

Avez-vous d’autres missions ?

L. B. : Je suis amenée à proposer l’utilisation de nouveaux outils visant à faciliter le travail de mes collègues. Les infirmières ont notamment beaucoup de tâches administratives à gérer. Si on prend l’exemple de la commande des ambulances, elles peuvent rester 15 minutes à attendre au téléphone que l’entreprise décroche, pour fixer des rendez-vous. Nous avons donc acté la mise en place d’une plateforme pour la prise de rendez-vous afin qu’elles puissent réserver les ambulances en deux clics. Cette concrétisation repose sur une réflexion commune en amont, pour trouver le bon outil et l’implémenter dans notre logiciel. Je fais également régulièrement des réunions avec la direction et les professionnels afin d’évaluer la prise en charge des patients, sur les applications à utiliser ou non. Dès lors que le choix est effectué, je me mets en relation avec l’entreprise pour créer des liens avec notre logiciel.

Comment êtes-vous parvenue à maîtriser les connaissances et le langage informatique ?

L. B. : Le langage informatique a en effet été complexe à acquérir mais je communique beaucoup avec la direction de la sécurité informatique (DSI) chargée de concrétiser le paramétrage des outils sur lesquels j’ai travaillé en amont. Face à un problème ou une difficulté, je creuse toujours pour en comprendre les raisons. Le numérique et le médical sont deux mondes totalement différents, mais aujourd’hui, tout est informatisé donc nous n’avons plus vraiment d’autre choix que d’être en contact.

Votre métier d’infirmière de soins vous manque-t-il ?

L. B. : Il est vrai que je ressens parfois l’envie d’être dans les services, de faire du soin à proprement parler. Néanmoins, je pense que mon poste représente une évolution de mon métier. Il donne une autre vision et permet de faire avancer les pratiques avec l’utilisation quotidienne du numérique dans le but de faire gagner du temps à chacun. De fait, même si je ne suis plus au plus près des patients, je fais tout pour que mes collègues puissent l’être. D’ailleurs tous comprennent l’utilité de mon poste. J’organise une réunion par mois avec les référents de chaque service afin qu’ils m’informent de ce qui fonctionne ou non dans les protocoles. Cela leur permet d’être impliqués et de ne pas uniquement se voir imposer des outils. Je les encourage également à valoriser leur travail en complétant les protocoles dès qu’ils accomplissent un acte qui n’y est pas mentionné, par exemple un pansement ou une aide à la toilette. Cette démarche peut sembler anodine mais s’avère pourtant nécessaire pour le suivi du patient et pour montrer le rôle de chacun. Elle permet aussi une montée en compétences et de se rendre davantage compte de l’importance du rôle des infirmières notamment. D’autant plus que les dossiers de soins sont lus par les acteurs du Programme de médicalisation des systèmes d’information (PMSI), qui recueillent des données pour l’ensemble des hospitalisations avec pour finalité le financement des établissements de santé. Personne ne nous le dit lorsqu’on est étudiant en soins infirmiers. On nous demande simplement de faire nos transmissions. Pourtant cela participe à l’amélioration de l’état de santé des patients et à une définition plus précise des protocoles de prise en charge.

POURQUOI ELLE ?

Au sein du groupe hospitalier privé Vivalto, plusieurs infirmières accomplissent cette mission de responsable des applications métiers. Une fonction que Laura Boller considère comme une montée en compétences de la profession infirmière. Elle la met au service des professionnels de santé de l’établissement hospitalier où elle exerce, au bénéfice de la prise en charge des patients.

BIO EXPRESS

2008 Diplôme d’État à l’institut de formation en soins infirmiers du centre hospitalier Roger Prévot à Moisselles (Val-d’Oise).

2008 Infirmière en chirurgie, clinique Sainte-Marie à Osny (Val-d’Oise).

2013 Référente dossier patient informatisé (DPI), clinique Sainte-Marie.

2017 Infirmière DPI à temps plein, centre hospitalier (CHP) Sainte-Marie.

2020 Infirmière responsable des applications métiers, CHP Sainte-Marie.