MARIE-CHRISTINE HENRY INFIRMIÈRE SIGNEUSE À L’UNITÉ RÉGIONALE D’ACCUEIL ET DE SOINS POUR SOURDS ET MALENTENDANTS (URASSM), AU CHRU DE NANCY (54) - L'Infirmière Magazine n° 391 du 01/03/2018 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Magazine n° 391 du 01/03/2018

 

RENCONTRE AVEC

CARRIÈRE

PARCOURS

MARIE-CAPUCINE DISS  

Est-ce l’allure historique du bâtiment qui l’abrite ou la complicité qui semble lier les membres de l’unité aux patients ? En franchissant le seuil de l’Unité régionale d’accueil et de soins pour sourds et mal entendants (Urassm), à Nancy, on a l’impression de se retrouver en famille. Tous les professionnels y maîtrisent la langue des signes française (LSF). Infirmière signeuse de l’unité, Marie-Christine Henry partage son temps entre l’accueil des patients et leur accompagnement dans les services du CHRU.

→ Un monde isolé. En 1999, elle fait partie des dix personnes de son service ORL volontaires pour apprendre la LSF. L’infirmière lorraine découvre alors un monde qu’elle ne connaît pas. Un monde à part. En 2003, elle est prête pour commencer ses vacations à l’Urassm, qui vient d’ouvrir. Au contact de sa formatrice en LSF, elle a pris conscience de l’isolement dans lequel vivent les personnes sourdes. Un isolement souvent amplifié en milieu hospitalier. « Les équipes soignantes sont souvent persuadées que la communication avec une personne sourde se fait sans problème, explique Marie-Christine Henry. Mais souvent, si on demande à un sourd s’il a bien compris, il répondra “oui, oui…” juste pour faire bonne figure. » Après les consultations hospitalières auxquelles elle participe, l’infirmière prend un temps de discussion avec le patient pour s’assurer qu’il a bien saisi ce qui s’est dit lors de l’échange avec le médecin.

→ Faciliter les échanges. Les débuts n’ont pas toujours été aisés, les portes des services du CHRU ne s’ouvrant pas facilement. Il fallait insister pour se faire accepter : « Si l’on me disait que je ne pouvais pas entrer dans une salle aux côtés d’une patiente, je faisais valoir que c’était son souhait d’être accompagnée.? » À présent, les professionnels de l’unité sont bien connus au CHRU. L’infirmière a parfois la satisfaction d’être remerciée par les médecins pour sa présence et sa médiation. Et cependant, il faut encore rappeler, inlassablement, les failles de communication, encore méconnues, rencontrées par les personnes sourdes. La présence de l’infirmière aux côtés du patient permet de désamorcer certains quiproquos qui pourraient s’avérer blessants pour lui. Et l’infirmière de citer cet exemple, dans une salle d’attente avant un examen médical : « La secrétaire, agacée par une étiquette mal collée sur un dossier, a poussé un soupir, tout de suite perçu par le patient comme s’il était dirigé contre lui. Je lui ai expliqué que ce signe d’agacement n’avait rien à faire avec lui et la tension est tout de suite redescendue. » À l’inverse, constatant que les personnes sourdes, par leur manière particulière de s’exprimer, en faisant de grands gestes, peuvent mettre mal à l’aise certains collègues, l’IDE peut les rassurer. « Il m’arrive d’expliquer qu’un patient n’est pas énervé mais qu’il est juste en train de parler », précise-t-elle.

→ À l’écoute. Pour Marie-Christine Henry, la prise en charge globale du patient est un est des attraits du travail dans l’unité. « La salle d’attente n’est pas une salle de repos, précise-t-elle. C’est en étant à l’écoute d’un patient en attendant un rendez-vous que je peux apprendre qu’un autre avec une grosse pathologie n’a plus d’électricité. » Une information qui n’a rien d’anodin. Le fonctionnement pluridisciplinaire, en lien avec deux médecins, une assistante sociale et une secrétaire, pratiquant tous la LSF, ainsi qu’une intermédiatrice sourde, permet d’aider le patient dans son parcours de santé et de vie. Certains, dont l’autonomie est réduite, ont besoin d’être épaulés pour gérer les prises de rendez-vous.

La présence des membres de l’unité s’avère également précieuse en cas d’hospitalisation. En cas d’anesthésie locale, l’infirmière peut être aux côtés du patient lors de l’intervention, notamment pour assurer le lien avec l’anesthésiste. À l’entrée et à la sortie de l’hôpital, elle est également présente. Elle s’assure aussi que toutes les conditions sont réunies pour que la convalescence se passe bien et que le patient ne soit pas isolé.

MOMENTS CLÉS

1984 : diplôme d’État infirmier.

1996 : entrée au service d’hospitalisation des enfants ORL du CHRU de Nancy.

1999-2004 : apprentissage de la langue des signes.

2003 : ouverture dans le service ORL de l’Unité régionale d’accueil et de soins pour sourds et malentendants (Urassm).

2006 : travaille à temps plein à l’Urassm.

2008 : l’unité est dotée de ses propres locaux.