Qui informer ? Qui décide ? - L'Infirmière Magazine n° 297 du 15/03/2012 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Magazine n° 297 du 15/03/2012

 

MAJEURS PROTÉGÉS

JURIDIQUE

La loi encadre la question de la délivrance des informations d’ordre médical concernant les personnes sous tutelle ou curatelle, ainsi que celle du consentement aux soins.

Lorsque les facultés mentales ou corporelles d’une personne majeure sont altérées par la maladie, une infirmité ou un affaiblissement dû à l’âge, au point de mettre sa personne ou ses intérêts en danger, le juge des tutelles saisi décidera d’ouvrir une mesure plus ou moins contraignante. Il s’agira soit d’une curatelle, qui est un régime d’assistance et de contrôle pour les personnes qui, sans être hors d’état d’agir elles-mêmes, ont cependant besoin d’être assistées pour les actes importants de la vie, soit d’une tutelle, qui est une mesure de représentation de la personne protégée dans tous les actes de sa vie civile.

À qui les informations médicales relatives à ces personnes doivent-elles être délivrées ?

L’article L. 1111-2 du Code de la santé pose comme principe que « toute personne a le droit d’être informée sur son état de santé ». Dans le cas des majeurs sous tutelle, ce même article indique que le tuteur reçoit l’information, mais précise que le majeur sous tutelle a également le droit de la recevoir lui-même d’une manière adaptée à ses facultés de discernement, et de participer ainsi à la prise de décision le concernant. S’agissant des infirmières, l’article R. 4312-32 du CSP dispose que « l’infirmier ou l’infirmière informe le patient ou son représentant légal, à leur demande, et de façon adaptée, intelligible et loyale, des moyens ou des techniques mis en œuvre. Il en est de même des soins à propos desquels il donne tous les conseils utiles à leur bon déroulement ». Le projet du Code de déontologie des infirmiers reprend, dans son article 14, que l’information est donnée au tuteur, mais que les personnes sous tutelle doivent recevoir une information adaptée à leurs facultés de discernement.

Dès lors, dans la pratique, et au vu de ces différents textes, le principe est que l’information doit être donnée au majeur vulnérable, quel que soit son régime de protection. Bien entendu, cette information doit être adaptée à ses capacités de compréhension. Si le tuteur doit être informé de l’état de santé de la personne protégée, une telle obligation ne s’impose pas pour le curateur.

Qui doit donner le ­consentement aux soins ?

Le Code civil prévoit un principe d’autonomie de la personne protégée, qui prend seule les décisions relatives à sa personne dans la mesure où son état le permet (art. 459 al. 1 du Code civil). Si tel n’est pas le cas, le juge décidera que la personne protégée bénéficiera, pour l’ensemble des actes relatifs à sa personne ou ceux d’entre eux qu’elle énumère, de l’assistance de la personne chargée de sa protection. Si cette assistance ne suffit pas, le juge peut décider d’une représentation par le tuteur (art. 450 al. 2). Et ce n’est que dans le cas où il devra prendre une décision ayant pour effet de porter gravement atteinte à l’intégrité de la personne protégée que ce dernier sollicitera l’autorisation préalable du juge (voir encadré ci-contre).

L’article L. 1111-4 du Code de la santé publique indique que le consentement du majeur sous tutelle, et, a fortiori, du majeur sous curatelle, doit être systématiquement recherché « s’il est apte à exprimer sa volonté et à participer à la décision ». Ce même article prévoit que, dans le cas où le refus d’un traitement par le tuteur pourrait avoir des conséquences graves sur la santé du majeur sous tutelle, le médecin délivre alors les soins indispensables. Dans une telle situation, le recours à une autorisation préalable du juge avant toute intervention n’a pas été prévu par la loi.

Pour sa part, l’article R. 4127-42 du Code de la santé publique, au titre des obligations déontologiques du médecin, s’avère plus frileux et dispose que le médecin, s’il est appelé à donner des soins à un « majeur protégé » (notion plus large que celle de majeur sous tutelle), doit « s’efforcer » de prévenir son « représentant légal » et « d’obtenir son consentement ».

PROCÉDURE

→ En dehors de toute urgence et de pronostic vital engagé, le corps médical demande son avis aussi bien à la personne protégée, dès lors que ses facultés de discernement ne sont pas atteintes, qu’au tuteur. En cas de réponse contradictoire, le refus du patient primera sur l’accord du tuteur. En cas de défaillance du tuteur, le juge des tutelles devra être saisi.

EN PRATIQUE

→ Une association tutélaire saisit le juge des tutelles pour obtenir l’autorisation de faire pratiquer une coloscopie sous anesthésie générale. Le magistrat la lui refuse en soulignant que, dans la mesure où aucune décision spéciale du juge des tutelles n’est intervenue pour prévoir l’assistance ou la représentation de la personne protégée dans les actes touchant à sa personne, l’intéressée peut prendre seule sa décision. Il précise, par ailleurs, qu’en tout état de cause, l’examen envisagé ne pouvant être considéré comme un « acte portant gravement atteinte à l’intégrité corporelle de la personne protégée », l’autorisation du juge des tutelles n’est pas nécessaire.

TI Nice, j. tutelles, 4 fév. 2009.