Stigmate dans la peau - L'Infirmière Magazine n° 256 du 01/01/2010 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Magazine n° 256 du 01/01/2010

 

VIH

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Santé

Une enquête menée par Sida info service souligne l'impact des lipodystrophies sur la qualité de vie des patients séropositifs.

« Je prends tous les jours en pleine face mon statut de porteur du vih. » Ces mots d'un homme de 40 ans sont l'un des nombreux témoignages qui jalonnent la présentation d'une enquête (1) menée par Sida info service en 2009. Menée auprès de 97 personnes, elle montre l'impact des lipodystrophies sur la qualité des vies des patients séropositifs.

Observance menacée

Dans un pays où le sida est devenu une maladie chronique, depuis l'avènement des trithérapies notamment, la prise en charge des lipodystrophies ne devrait pas être négligée, plaide l'étude.

Deux raisons suffisent à le comprendre : cette pathologie entraîne une stigmatisation des patients, et elle a des conséquences sur l'observance. « Je pense même arrêter de me soigner plutôt que de ressembler à un mort », déclare un homme de 41 ans. « 40 % des personnes interrogées signalent l'apparition d'une lipodystrophie lors des cinq dernières années », ajoute la responsable de l'observatoire de Sida info service, Elisabete de Carvalho.

Ce syndrome n'est donc pas encore suffisamment pris en charge. Il est caractérisé par une redistribution anormale des graisses et prend deux formes différentes ou concomitantes.

La lipoatrophie, d'une part, est définie par une fonte de la masse grasse au niveau des bras, des jambes, des fesses et du visage.

La lipohypertrophie, elle, est une augmentation de la masse grasse au niveau de l'abdomen (graisse intra-abdominale), de la poitrine et de la base du cou. « Aux conséquences esthétiques et psychologiques, il faut ajouter des conséquences métaboliques et cliniques, signale le Dr Zucman, endocrinologue à l'hôpital Foch de Suresnes (92). À savoir la dyslipidémie, l'insulinorésistance, le diabète et les maladies cardiovasculaires. » Des études ont déjà prouvé la corrélation entre traitements antirétroviraux et lipodystrophies. Cependant, « nous ne savons pas encore quelle est la part attribuable aux traitements, au seul virus ou à la conjugaison des deux », souligne Elisabete de Carvalho.

Trouble réversible

La difficulté réside dans son évaluation. Trois personnes sur cinq ont été diagnostiquées par leur médecin traitant ou spécialiste du VIH. Parmi elles, moins de la moitié (27) ont fait l'objet d'un examen clinique comprenant des mesures du poids, du tour de taille, des hanches et de la poitrine. L'évaluation par imagerie est la plus précise mais la moins pratiquée, de par son coût. Concrètement, pendant un an, le patient accumule de la masse grasse, et c'est au bout de la deuxième année que la lipodystrophie apparaît. Le Dr Zucman explique que les traitements par d4T et AZT induisent des lipodystrophies. Aussi, « il faut remplacer les analogues thymidiniques par d'autres antirétroviraux. » Bonne nouvelle, ce trouble est partiellement réversible : « Après l'arrêt du d4T ou de l'AZT, on constate une reconstitution partielle et progressive du tissu graisseux. »

Pour les patients marqués, le traitement de comblement des lipoathrophies faciales (type Newfill®) est une aide non négligeable, et prise en charge par la Sécurité sociale. Seul hic, l'effet « grain de riz » : dans 10 % des cas, le Newfill® produit un petit nodule à la palpation.

1- « Impact des lipodystrophies sur la qualité de vie des personnes vivant avec le VIH », en ligne sur : http://www.sida-info-service.org.