Du berceau au divan - L'Infirmière Magazine n° 256 du 01/01/2010 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Magazine n° 256 du 01/01/2010

 

Psychanalyse

Dossier

Si la psychanalyse infantile est un outil précieux et efficace, elle reste peu pratiquée. Histoire et évolution d'une discipline qui fait encore débat.

Complexe d'OEdipe, « parlez-moi de votre mère », régression... dès que l'on évoque la psychanalyse, la figure de l'enfant s'impose irrémédiablement. Mais si l'histoire de la psychanalyse est indissociable de l'intérêt porté à la part infantile, il faudra attendre cinquante ans de débats avant que ne se développe réellement la psychanalyse au service de l'enfant. Et encore, si cette discipline paraît aujourd'hui bien établie, voire omniprésente, elle n'en est pas moins remise en cause et peu enseignée.

Depuis Freud

Dans ses premières années, la psychanalyse ne s'intéresse à l'enfant qu'indirectement, par le biais de reconstitutions des premières psychanalyses d'adultes. Ainsi, dès 1897, Sigmund Freud fait une découverte capitale : l'existence de désirs incestueux envers le parent de sexe opposé, découverte qui prendra plus tard le nom de complexe d'OEdipe. Lorsqu'en 1905, il publie Trois essais sur la théorie sexuelle, il révolte l'Europe entière en parlant de sexualité infantile. Pour Freud, la sexualité ne relève pas d'une fonction physiologique liée à la reproduction, elle est une élaboration psychique qui commence dès la petite enfance. Cette théorie, centrale dans la psychanalyse, est très mal reçue, mettant à mal la vision d'une enfance innocente et sans tache. Poursuivant ses travaux, Freud supervise notamment le premier travail avec un enfant, le « petit Hans » en 1908. Dès ces débuts, une question apparaît dans les cercles psychanalytiques, question qui reste toujours d'actualité : lorsqu'elle s'adresse à l'enfant, la psychanalyse doit-elle intégrer un aspect éducatif ?

Pour Hermine von Hug-Hellmuth (née en 1871), pionnière de la psychanalyse d'enfants dès 1913, l'analyste a effectivement un certain devoir d'éducation et de transmission de valeurs morales. Si elle a été largement oubliée suite à sa mort tragique en 1924 (1), elle aura notamment eu le mérite d'introduire la technique du jeu dans sa pratique analytique.

Anna Freud, institutrice avant de s'orienter vers la psychanalyse, émet également de sérieuses réserves sur la possibilité de mener une cure psychanalytique proprement dite sur des enfants, et ce pour plusieurs raisons : selon elle, l'enfant, disposant d'un langage immature, ne pourrait associer librement ; il n'a pas conscience de ses troubles et ne collabore donc pas ; son surmoi n'étant pas constitué avant l'élaboration oedipienne, il est fragile et il serait dangereux de libérer ses pulsions et de le soumettre à des interprétations. Mais surtout, le transfert représente pour Anna Freud une difficulté dans le travail avec l'enfant : celui-ci, trop attaché à ses parents, ne pourrait pas établir de transfert sur l'analyste, rendant la cure à proprement parler impossible. Ainsi préférera-t-elle s'intéresser à l'observation psychanalytique des enfants, méthode qu'elle met en pratique dans des centres comme la Hampstead Clinic à Londres (aujourd'hui Anna Freud Centre). Elle espère une « éducation psychanalytique » capable de prévenir les névroses, mais reviendra plus tard sur cette ambition : « l'éducation psychanalytique, en dépit de nombreux progrès partiels, n'a pas réussi à devenir l'arme préventive qu'elle devait constituer. Il ne peut y avoir, dans l'ensemble, prévention de la névrose. »

Mélanie Klein, viennoise installée à Londres en 1926, élabore ses travaux théoriques en même temps qu'Anna Freud, mais dans une direction opposée. Révolutionnaire dans ses concepts, elle affirme l'existence d'un surmoi précoce lié à un OEdipe primitif, et l'existence d'un psychisme très développé dès la première année de vie, qui engendre chez l'enfant des fantasmes violemment ambivalents à l'égard de sa mère. Pour elle, dès lors que l'enfant va être reconnaissant à l'analyste de tenter de le soulager de son angoisse, il sera prêt à accepter son aide et à opérer un transfert massif. La cure est donc possible, d'autant qu'elle considère le jeu de l'enfant comme une véritable technique analytique permettant l'interprétation. Enfin, à la différence d'Anna Freud qui s'intéresse davantage à la normalité et à ses déviances chez l'enfant, Mélanie Klein se penche très tôt sur des cas lourds. Dès 1930, elle relate le cas de Dick, garçon de 4 ans qu'elle qualifie de schizophrène, et ouvre la voie à l'analyse des psychotiques, auparavant considérés comme irrécupérables.

Controverses et apaisement

Les travaux de Mélanie Klein provoquent débats et scandales dans le monde psychanalytique et débouchent sur les fameuses « Controverses » en 1941, qui visent à déterminer si ces idées sont compatibles avec la théorie freudienne. Au bout de quatre ans de débats acharnés, Mélanie Klein et ses disciples sont autorisés à rester au sein de la Société britannique de psychanalyse, qui accueille désormais deux courants, en plus d'un troisième : les indépendants (le Middle Group). Le plus prestigieux membre de celui-ci, Donald Winnicott, théorise notamment les concepts du faux self, un moi de protection contre un environnement défectueux ; de l'objet transitionnel qui ne se situe ni dans le dedans du bébé, ni dans la réalité extérieure, mais dans une « aire transitionnelle » où pourront se développer les intérêts culturels ; et de mère « suffisamment bonne » : ni trop, ni pas assez.

La psychanalyse d'enfants, qui s'est développée jusque-là comme une sous-spécialité réservée aux femmes et aux profanes (non médecins), connaît pendant les années 40 une immense richesse théorique et pratique, qui bénéficiera à la psychanalyse dans son ensemble. Une fois les dissensions apaisées, la psychanalyse infantile prend enfin son envol, et on se penche notamment sur les relations mère-nourrisson. En partie à cause des souffrances vécues par les bébés pendant la guerre, on passe de la conception du nourrisson-tube digestif à celle du bébé, être de compétences innées et potentielles. Cette évolution de la pensée permet la description de la dépression du nouveau né par Anna Freud et Dorothy Burlingham en 1942, celle de l'autisme par Léo Kanner en 1943, suivis des travaux de René Spitz sur l'hospitalisme, de John Bowlby sur la théorie de l'attachement, notamment, qui ouvrent la voie à la prise en charge psychanalytique du bébé et à la pédopsychiatrie.

Psychanalyse de l'enfant

En France, où la psychanalyse tarde relativement à s'implanter, très peu de psychanalystes s'intéressent spécifiquement aux enfants avant la guerre. Eugénie Solnicka, qui s'installe à Paris en 1921, se sent mal reçue dans le service du Pr Georges Heuyer à Sainte-Anne, où elle ne travaille que quelques mois. Sophie Morgenstern, qui vient de Pologne en 1924 et suit une analyse avec Solnicka, a plus de succès chez Georges Heuyer, qui créé en 1925 une clinique annexe de neuropsychiatrie infantile à la Salpêtrière, dont elle assure le service du dispensaire de psychanalyse pendant quinze ans. Elle développe, notamment, la technique du dessin dans le travail avec les enfants, estimant que les névroses entraînent une grande richesse graphique, permettant l'accès aux conflits inconscients. C'est d'ailleurs auprès d'elle que la jeune externe Françoise Marette s'initie au travail avec les enfants en 1936. En 1939, elle soutient sa thèse intitulée Psychanalyse et pédiatrie, et la guerre éclate, chassant de Paris la plupart des psychanalystes. C'est donc dans un certain vide institutionnel que Françoise Marette, devenue Dolto en 1942, développe sa pratique et débute ses consultations à l'hôpital Trousseau. En 1945, elle apparaît comme une psychanalyste d'enfants confirmée... d'autant plus que ses confrères ont quitté Paris. C'est aussi sans doute pourquoi cette clinicienne de génie travaille en dehors des grands courants, sans référence explicite, mais en se constituant un grand cercle d'amis et d'élèves. Celle qui voulait être « médecin d'éducation » fait véritablement entrer la psychanalyse dans la société, et donc dans l'éducation avec ses émissions de radio et la création de la Maison Verte (cf. encadré ci-contre).

Au moment où Françoise Dolto révolutionne la manière de percevoir l'enfant, d'autres personnalités moins médiatisées jouent un grand rôle pour nourrir la pédopsychiatrie naissante d'idées psychanalytiques, notamment Serge Lebovici et René Diatkine, avec la création de la revue La psychiatrie de l'enfant et celle du Centre de santé mentale de l'enfant dans le XIIIe arrondissement de Paris.

Quelle formation ?

Grâce aussi à la création de la sécurité-sociale, de nombreux centres de guidance infantile naissent après la guerre : le Centre psychopédagogique Claude Bernard en 1946 - qui deviendra Centre médico-psycho-pédagogique lors de la création officielle des CMPP en 1963 -, l'Institut Édouard Claparède en 1949 ou encore l'Institut de puériculture de Paris, notamment. Avec la création des intersecteurs de psychiatrie infanto-juvenile dans les années soixante, les soins psychothérapeutiques d'inspiration psychanalytique sont dorénavant accessibles à tous, et l'enfermement des enfants « déficients » appartient désormais au passé. Mais, avec le temps, des psychanalystes ont pu déplorer une certaine dénaturation de l'approche psychanalytique dans certains de ces centres, et la formation psychanalytique insuffisante des thérapeutes y travaillant.

Réclamée par de nombreux psychanalystes en France, la formation officielle de psychanalyste d'enfant n'existe toujours pas en tant que telle. Ni la Société psychanalytique de Paris, ni l'Association psychanalytique de France n'ont mis en place de formation spécifique, malgré de nombreux débats à ce sujet et diverses initiatives menées par d'éminents psychanalystes. Florence Guignard, qui oeuvre pour une reconnaissance de cette formation depuis longtemps, a du mal à expliquer cette réticence : « Je crois, personnellement, que chacun d'entre nous a eu déjà tellement de peine à devenir adulte qu'il a une certaine résistance à retrouver l'enfant en soi. On n'est pas exempt de paradoxe, même si l'on est psychanalyste. » Pour un psychanalyste, il faut donc s'aguerrir au travail avec les adultes, puis se familiariser avec le corpus théorique de l'analyse d'enfant, suivre les séminaires ou week-ends de travail existants, et si possible un stage dans un service de pédopsychiatrie. Mais à côté de ces psychanalystes, certains psychiatres ou psychologues peuvent s'installer psychothérapeutes d'enfants, sans jamais avoir travaillé auparavant avec des enfants !

Situation d'autant plus problématique que, nous dit le Dr Jean-David Nasio, le travail avec les enfants est l'un des plus difficiles qui soit : « à la différence du travail avec l'adulte, le praticien doit être extrêmement concentré pour ne pas se laisser distraire et impressionner par l'apparente facilité de communication avec l'enfant. Il ne suffit pas de jouer pour que l'enfant aille mieux. Beaucoup de professionnels débutants croient que les enfants sont plus faciles, et commencent à travailler avec eux, ce qui est une erreur. Il faut d'abord commencer à pratiquer avec des adultes : les enfants nécessitent un thérapeute très bien formé et avisé. »

Difficultés et spécificités

Cela peut être encore compliqué par les sentiments parentaux éveillés chez l'analyste, d'autant que celui-ci n'a pas qu'à traiter son contre-transfert vis-à-vis de l'enfant, il doit aussi faire face au transfert des parents. En effet, comme le dit le Dr Nasio, « Quand on travaille avec un enfant, on travaille automatiquement avec la famille, on ne peut le faire sans s'occuper des parents ».

C'est là une spécificité supplémentaire pour l'analyste d'enfants. Il s'agit pour lui de rassurer les parents et de tenter de les déculpabiliser, de bâtir avec eux une « alliance thérapeutique » pour le suivi de l'enfant, et de gagner leur confiance afin que ce qui se construit dans la thérapie ne se défasse pas à la maison : « l'enfant est l'expression de conflits difficiles, de noeuds dramatiques qui peuvent exister dans la famille. Je dois donc être au courant de ce qui se passe en profondeur dans cette famille, sinon le travail avec l'enfant est complètement superficiel et inutile. »

Et, à l'inverse, la thérapie de l'enfant pourra avoir des effets positifs sur toute sa famille. C'est ainsi que Florence Guignard parle de l'enfant thérapeute : « Beaucoup de parents, inconsciemment, comptent sur l'enfant et sur sa psychothérapie pour soigner quelque chose en eux, et ils n'ont pas tort, parce que sitôt que l'enfant va mieux, ses relations avec les parents vont changer, et l'attitude de ceux-ci évoluera également. »

Un accueil dès la naissance

En institution, le travail avec les parents est facilité par l'existence d'une équipe, et notamment par le travail du consultant, qui sera le référent de la famille, tandis que le psychothérapeute aura peu de contacts avec celle-ci : pour Serge Boimare, directeur du CMPP Claude Bernard, « il y a une préparation, un accompagnement et un soutien des familles qui ne peut pas se faire de la même façon lorsque l'on travaille en privé. Quand on est le thérapeute de l'enfant, on ne peut pas vraiment être le consultant de la famille. » Concrètement, l'accueil des enfants se fait dès la naissance, parfois même avant : des nombreux psychanalystes et institutions reçoivent des femmes enceintes. Avec les nouveau-nés, la mère est bien sûr présente lors des séances. Myriam Szejer, formée auprès de Françoise Dolto, travaille ainsi depuis près de vingt ans à la maternité de l'hôpital Antoine Béclère avec les bébés et leurs parents juste après la naissance. Elle intervient lorsqu'une situation de souffrance est décelée par l'équipe soignante, et que toute cause médicale a été écartée. Car si le nourrisson ne parle pas encore, il sait exprimer une souffrance par des pleurs, un refus d'alimentation ou une insomnie, par exemple.

Pour elle, « dans les quelques jours qui suivent l'accouchement, les mères sont dans une disposition à parler très particulière. C'est comme si cette envie de parler avait une fonction très précise pour l'enfant : lui transmettre des informations. Je suis là pour favoriser cela, pour faire en sorte que des paroles importantes qui concernent l'enfant lui soient dites. » Il s'agit souvent d'exprimer devant l'enfant un traumatisme familial, comme par exemple le décès d'un proche, réactualisé par cette naissance.

Et les résultats sont surprenants : « Il arrive que cela ne marche pas, mais dans la majorité des cas, une séance suffit pour faire disparaître les troubles. Ce dispositif permet de remettre la parole en circulation, le symptôme n'est de ce fait plus nécessaire. » Si les motifs de consultation pour les tout-petits concernent souvent un état dépressif du nourrisson, ceux des enfants de deux à six ans sont plus souvent liés à l'agressivité, aux difficultés du sommeil, du langage ou de l'apprentissage. Pour certains de ces problèmes, le travail en institution pourra présenter plusieurs facettes : psychothérapie psychanalytique assortie d'un travail psychomoteur, orthophonique ou pédagogique.

Quelle efficacité ?

Si les psychanalystes ne s'accordent pas sur la durée moyenne d'un travail psychanalytique avec l'enfant, ils sont d'accord en revanche pour dire que celle-ci sera plus courte qu'avec un adulte - hors problèmes plus graves comme l'autisme et les troubles psychotiques, qui seront bien sûr suivis sur un temps très long. « Nous avons comme alliée la force de vie et de développement de l'enfant, de sorte qu'il nous arrive d'avoir des résultats beaucoup plus rapides qu'avec les adultes », dit Florence Guignard.

Six mois, un an, deux ans... Des périodes qui peuvent encore paraître trop longues à certains parents, surtout dans une société où rapidité et rentabilité sont devenues des valeurs suprêmes et où l'on peut être tenté de recourir à d'autres solutions comme des thérapies comportementales ou des médicaments, en vogue depuis quelques années.

D'autant plus que les résultats de la psychanalyse sont difficiles à évaluer : « Il est très compliqué pour les psychanalystes de rendre compte de leur travail, et nous sommes très critiqués pour cela, selon Marie Terral-Vidal, médecin psychiatre et psychanalyste, qui dirige le CATTP grande enfance à l'hôpital Sainte-Anne. Les méthodes d'étude épidémiologiques sont inadaptées à nos pratiques, nous essayons de mettre en place nos propres outils pour évaluer l'efficacité de nos traitements. La psychanalyse a du mal à parler d'elle-même car elle est, à chaque fois, une histoire singulière, mais toutes les vignettes cliniques parlent énormément. »

De plus, le travail avec l'enfant aurait valeur de prévention pour sa vie d'adulte. « On ne peut garantir qu'ils ne rencontreront pas de nouveau ces problèmes, confie Florence Guignard, mais je pense qu'ils seront moins effrayés et plus intéressés par les difficultés qu'ils rencontreront plus tard dans leur vie. Ils auront entendu qu'on peut s'intéresser sans jugement à un problème, et que cela peut y changer quelque chose. C'est le but. » Jean-David Nasio abonde dans ce sens : « Chaque fois que je reçois un enfant, je me dis que c'est une grande responsabilité pour moi, et une chance pour lui, de consulter un professionnel. Travailler avec un enfant a toujours une action préventive. »

Bon père, bonne mère...

La psychanalyse serait-elle alors la panacée pour les problèmes de nos enfants ? Pas pour tout le monde... Les critiques à son encontre sont légion, et ce depuis sa création. Aujourd'hui, on lui reproche notamment d'avoir été désastreuse pour l'éducation des enfants (cf. encadré p. 6), et de culpabiliser à outrance les parents. Des critiques parfois reprises par les psychanalystes eux-mêmes : pour Graziella Turolla, psychologue et psychanalyste à Sainte-Anne, « Les enfants n'ont pas à être éduqués par une quelconque méthode psychanalytique ou psychologique. Et c'est très paradoxal : on accuse d'un côté la psychanalyse d'avoir fabriqué des enfants-rois, et d'un autre côté, un enfant ne peut plus glisser dans la cour sans qu'on se demande s'il n'est pas traumatisé et n'a pas besoin d'un psy. Les psys sont omniprésents, sollicités sur tout, et on leur reproche. »

« Certains psychanalystes seraient en quelque sorte devenus les gardiens du temple et porteraient la bonne parole, pour dire ce qu'est un bon père, une bonne mère..., renchérit Marie Terral-Vidal. Les dérives sont partout, même dans les écoles de psychanalyse. Et la vulgarisation a fait beaucoup de mal à la psychanalyse. Celle-ci n'est pas un dogme, c'est la parole du sujet que l'on doit écouter, sans rien plaquer dessus. C'est pourquoi ce qu'il y a dans les journaux, ça n'a aucun sens, et rien à voir avec la psychanalyse. » Pour les enfants comme pour les adultes, la psychanalyse reste toujours une histoire singulière et multiple.

1- Elle connut une fin tragique, puisqu'elle fut étranglée par son neveu âgé de 18 ans, qui avait été un de ses principaux patients.

point de vue

DE LA NÉCESSITÉ DES RÈGLES

Didier Pleux, docteur en psychologie du développement, psychologue clinicien et psychothérapeute, estime que l'hégémonie du discours psychanalytique sur les enfants a fait beaucoup de mal au savoir-faire des parents en matière d'éducation. « Dolto a toujours dit qu'il ne fallait pas de verticalité avec l'enfant, pas de règle ni d'habitude, que le parent n'avait pas à être un guide mais à favoriser le désir de l'enfant. Autant cela pouvait être porteur dans les années 60 et 70, auprès d'une génération qui avait souffert de l'autoritarisme, mais avec la génération actuelle, qui souffre plutôt d'un manque d'autorité, cela peut être désastreux. Dolto a amené la psychanalyse, qui est une démarche adulte de connaissance de soi, relevant du domaine du symbolique, dans l'éducation. Or celle-ci ne peut être du domaine du symbolique : il faut des règles, des interdits, des conséquences... tout un savoir-faire que les parents, qui n'entendent qu'un discours inspiré de la psychanalyse, ont désappris. »

Pour en savoir plus :

De l'enfant roi à l'enfant tyran, Paris, éd. Odile Jacob, 2006, 8,40 Euro(s).Euro(s)Génération Dolto, Paris, éd. Odile Jacob, 2008, 22,90 Euro(s).

initiative

LA MAISON VERTE

Depuis 30 ans cette année, la Maison Verte accueille des enfants de la naissance à trois ans avec leurs parents ou leur nounou. Ni crèche, ni garderie, cet endroit imaginé par Françoise Dolto est un lieu de partage, de convivialité, un lieu d'écoute. Il ne s'agit pas d'y pratiquer la psychanalyse, mais les accueillants (trois par jour, dont un homme) ont tous une expérience analytique qui leur permet d'avoir le recul nécessaire pour ne pas juger, ne rien imposer, mais être là pour entendre les histoires, parfois difficiles, qui peuvent se raconter autour des naissances, des sevrages, des séparations... L'accueil libre et totalement anonyme (seul le prénom de l'enfant est noté sur un tableau lors de son arrivée) permet aux mères de se détendre, de se confier, de partager leurs préoccupations et leurs conseils à une époque où nombre d'entre elles sont isolées, loin de leurs familles. Et les enfants peuvent jouer entre eux, en présence d'autres adultes, sans craindre la séparation. Une expérience unique, qui a inspiré une multitude de lieux d'accueil parents-enfants à travers le monde.

La Maison Verte. 13, rue Meilhac. 75015 Paris.

Ouverte du lundi au vendredi de 14 heures à 19 heures, et le samedi de 15 heures à 18 heures 30.

Une participation financière, dont le montant est libre, est demandée.

terminologie

PETIT LEXIQUE

- Transfert. Processus par lequel l'analysant établit inconsciemment un lien affectif avec son analyste, lui permettant de diriger sur celui-ci des réactions liées à des personnes ayant joué un rôle important dans son enfance. Ce processus occupe une place centrale dans la cure.

- Contre-transfert. Ensemble des réactions inconscientes de l'analyste à la personne, et plus particulièrement au transfert de l'analysant.

- Associations libres. Méthode de l'analyse, qui consiste à dire ce qui passe par la tête, sans censure morale ni souci de cohérence apparente, et visant à rendre conscientes des manifestations refoulées.

- Sexualité infantile. Ensemble des divers mécanismes pulsionnels de l'enfant, dont les transformations aboutissent à la sexualité adulte en passant par différentes phases : phase orale liée à la succion, phase anale liée au contrôle des sphincters, phase phallique liée à la masturbation, pendant laquelle se développe le complexe d'OEdipe, et période de latence.

Pour en savoir plus :

- à lire :

La grande menace. La psychanalyse et l'enfant, D. Vasse, Paris, éd. Le Seuil, 2004, 60 Euro(s).

Cures d'enfance, L. Kahn, Paris, éd. Gallimard, 2004, 15 Euro(s).

Histoire de la psychanalyse de l'enfant, Cl. et P. Geissman, Paris, éd. Bayard, 2004, 29 Euro(s).

- Internet :

Psychiatrie infirmière : http://psychiatriinfirmiere.free.fr

Société psychanalytique de Paris : http://www.spp.asso.fr

À savoir

Un enfant qui ne va pas bien ne parle que rarement de son mal-être. Certains symptômes peuvent permettre de savoir quand l'orienter vers une psychothérapie :

- des troubles du sommeil, terreurs nocturnes ou cauchemars à répétition ;

- des peurs inexpliquées ou phobies trop invalidantes ;

- des troubles obsessionnels du comportement (Toc) ;

- des comportements agressifs ;

- des troubles de l'alimentation ;

- des troubles du langage (bégaiement, dyslexie) ;

- des problèmes scolaires ;

- des maladies trop répétitives ;

- des difficultés relationnelles avec les autres enfants (isolement, bouc-émissaire) ;

- des états dépressifs ou pleurs inexpliqués ;

- de l'énurésie ou de l'encoprésie.

Articles de la même rubrique d'un même numéro