Soins palliatifs : aider les Français à s’approprier leurs droits | Espace Infirmier
 
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09/02/2022

Soins palliatifs : aider les Français à s’approprier leurs droits

Le Centre national des soins palliatifs et de fin de vie (CNSPFV) créé en 2016 vient d’être prorogé par décret* jusqu’au 31 décembre 2026 avec des missions élargies et deux objectifs majeurs : mieux faire connaître leurs droits aux personnes en fin de vie ainsi que les directives anticipées. Explications avec Sarah Dauchy, présidente du Centre et de la nouvelle commission d’expertise.

La feuille de route du 5e plan national 2021-2024 sur le développement des soins palliatifs et l’accompagnement de la fin de vie est sortie le 26 janvier. Elle fixe trois axes majeurs, à savoir : favoriser l’appropriation des droits en faveur des personnes malades et des personnes en fin de vie ; conforter l’expertise en soins palliatifs en développant la formation et en soutenant la recherche ; définir des parcours de soins gradués et de proximité en développant l’offre de soins palliatifs, en renforçant la coordination avec la médecine de ville et en garantissant l’accès à l’expertise.

« Derrière le changement de nom (lire Savoir plus en fin d’article), ce qui est important c’est que la commission d’expertise s’est ouverte plus largement, souligne sa présidente. Elle intègre davantage les associations de patients, de bénévoles et d’aidants mais aussi de nouveaux représentants comme le Haut Conseil de la santé publique, la plateforme nationale pour la recherche sur la fin de vie, l’Institut national du cancer, la Commission nationale de psychiatrie… »

Une communication repensée autour de la loi Claeys-Leonetti

S’agissant de l’appropriation des droits existants, « il existe une carence énorme entre la connaissance de la loi Claeys-Leonetti de 2016 et son utilisation, et on ne peut imaginer utiliser une loi concernant quelque chose d’aussi important que la fin de vie en ne la connaissant pas ou mal », souligne le docteur Sarah Dauchy. En effet, le dernier sondage réalisé en février 2021** par BVA pour le CNSPFV a montré que 70 % des Français ne connaissent pas (52 %) ou mal (18 %) les directives anticipées, que 40 % ne connaissent pas (28 %) ou mal (12 %) la personne de confiance, et que 64 % ne connaissent pas (47 %) ou mal (17 %) la sédation profonde et continue jusqu’au décès. Favoriser l’appropriation des droits en faveur des personnes malades et des personnes en fin de vie est donc un des axes prioritaires de travail pour les années à venir du CNSPFV. « C’est un enjeu majeur que d’arriver à impliquer les patients eux-mêmes, la société civile elle-même dans la construction des messages de communication, poursuit-elle. Nous devons parvenir à un mode de communication impliquant assez les acteurs pour que les messages soient coconstruits avec de véritables relais de proximité. »

Dans les faits, la fin de vie est souvent quelque chose qui est peu anticipé. C’est un sujet difficile, lourd et d’autant plus inquiétant qu’on s’en approche. « Les droits de fin de vie démarrent avec les droits en santé, c’est une culture qui fait qu’un patient va très tôt être impliqué dans la décision thérapeutique qui le concerne, poursuit-elle. Si nous avions l’habitude de faire cela, ce serait beaucoup plus simple. C’est une vraie modification de culture médicale, un changement global de paradigme dans le lequel le CNSPFV va s’impliquer pour la fin de vie. »

Du temps et des moyens pour le recueil des directives anticipées

L’anticipation, c’est l’autre chantier (même s’il n’est pas nouveau) auquel va s’atteler de manière encore plus active le CNSPFV. Elle concerne les patients eux-mêmes mais aussi les organisations. Si le 5e plan national prévoit un volet important de renforcement des équipes de soins palliatifs (financement d’astreintes de soins palliatifs offrant une permanence d’appui aux professionnels du territoire, renforcement des équipes palliatives existantes et financement de structures palliatives complémentaires…), il faut que les organisations en place facilitent cette démarche d’anticipation. « Nous allons œuvrer pour que les dispositifs de recueil des directives anticipées soient lisibles, accessibles et compréhensibles par tous, y compris par les populations précaires et mal communicantes, explique Sarah Dauchy. Il faut aussi des endroits où ranger les directives anticipées et mettre en place des consultations de rédaction de ces directives anticipées. C’est-à-dire avoir un temps prévu et valorisé pour cela, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui. Il est important qu’il y ait un système pour que l’on arrive à parler des soins palliatifs. Il faut tout faire pour éviter que les patients arrivent en catastrophe sans savoir en quoi cela consiste parce qu’on n’a pas réussi à leur en parler. »

Isabel Soubelet

Décret n° 2022-87 du 28 janvier 2022 relatif au Centre national des soins palliatifs et de la fin de vie

** L’enquête a été réalisée par téléphone en janvier 2021 auprès d’un échantillon de 902 Français âgés de 50 ans et plus, considéré comme représentatif de cette population.

SAVOIR PLUS

Organisation du CNSPV

Le renouvellement du Centre national des soins palliatifs et de fin de vie (CNSPFV) s’inscrit dans le cadre du 5e Plan national de développement des soins palliatifs et de l’accompagnement de la fin de vie 2021-2024. La mise en œuvre stratégique des missions du Centre est confiée au Dr Sarah Dauchy, présidente du CNSPFV et, de fait, de la nouvelle commission d’expertise. Cette dernière, qui compte 28 membres, outre la présidente, remplace le Conseil d’orientation stratégique. Elle a pour mission de contribuer à la définition du programme de travail annuel du CNSPFV, de suivre sa mise en œuvre et de décider des suites à donner aux travaux réalisés. La mise en œuvre opérationnelle est, elle, confiée à Giovanna Marsico, directrice du CNSPFV depuis le 3 janvier.

Des mesures prioritaires

Outre le renouvellement du CNSPFV, la réalisation de campagnes d’information et la promotion du portail « Parlons fin de vie », le plan soins palliatifs 2021-2024 prévoit parmi les mesures phares le renforcement des structures palliatives (création d’unités de soins palliatifs, d’équipes mobiles, d’équipes régionales ressources…), une offre de formation étoffée au profit des professionnels de santé (entre autres des Ehpad). Il est encore question de financer des « astreintes de soins palliatifs » et de « généraliser le financement d’astreintes des infirmiers de nuit en Ehpad » pour « garantir la mise en place de dispositifs de permanence territoriale assurés par des médecins spécialisés en soins palliatifs ». Au rang des priorités figure encore le renforcement de l’articulation ville-hôpital-médico-social, une meilleure coordination de la prise en charge palliative par le financement d’équipes dédiées, un accès facilité aux pratiques sédatives à visée palliative à domicile et l’accompagnement de la mise à disposition du midazolam en officines de ville.

Les dernières réactions

  • 10/02/2022 à 21:11
    Maggy
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    Vraiment peu de personnes connaissent les soins palliatifs et pensent que ce ne sont des soins que pour les mourants
    Les médecins eux même
    Que faire pour y remédier ?
    Infirmière coordinatrice en ehpad durant 20 ans ´, ide surveillante en service j’ai toujours milites pour les soins palliatifs et fait appel à eux. Très , très tôt
    A l heure actuelle c est moi qui suis malade et pris rdv en consultation
    Et bien ma famille ,mes proches ne comprennent pas !!!!!!!! Alors que j ai toujours eu le même discours
    Le déni est il si fort ?,,
    C était juste un petit témoignage , une envie de parler
    Cordialement
  • 15/02/2022 à 03:40
    Natsoleil
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    Infirmière libérale, de famille, depuis 34 ans, DIU soins palliatifs il y a 13 ans, ayant déjà témoigné// directives anticipées au cours de nos tournees lors d'une journée d'experts au CNSPFV , réalisé 2 memoires de recherche, des podcast, articles, dont un projet art 51, je note qu' auprès du patient et de ses proches la nomenclature des infirmières libérales ne prévoit TOUJOURS RIEN pour le temps et les competences nécessaires pour prendre soin en situation colère et ou fin de vie: il faut se battre contre l'administration suspiscieuse et verrouillée en permanence ! Se battre pour qu'on nous FASSE CONFIANCE. Il faut commencer par cesser de maltraiter les soignants!!!
  • 15/02/2022 à 22:40
    giovanna
    alerter
    comme maggy, je pense que peu de personnes ne connaissent vraiment les soins palliatifs et encore moins les directives anticipées et très peu la loi claeys leonetti
    le plus grave même des médecins ne la connaisse pas ou ne veulent pas la connaître.
    mon papa a été placé en protocole de fin de vie avec arrêt des traitements y compris l'alimentation mais maintien de l'hydratation en HAD. 2 mois plus tard, il était toujours là avec ce corps décharné et des escarres stade 4. papa à quel point as tu souffert ?
    on ne saura pas à quel point puisque la maladie te rendait prisonnier de ton corps et tu ne pouvais pas t'exprimer. on se souviendra de ce corps décharné et de ces râles. 2 longs mois avant qu'une sédation soit mise en place durant encore 7 jours
    je reste accusée d'avoir demandé l'euthanasie de mon papa alors que dans ce cas là, la sédation est autorisée par la loi. alors que dire des médecins qui ne respectent rien. et madame la présidente et madame la directrice du centre, pourquoi l'étude sur les refus de sédation fait en 2017 par le CNSPFV ne sera jamais publié.....
    j'ai honte de cette société
  • 15/02/2022 à 23:05
    Maggy
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    Merci Giovanni pour votre témoignage
    Si seulement les choses pouvaient évoluer
    La loi Kouchner est oubliée depuis longtemps
    Sans parler de palliatifs beaucoup , que dis je presque tout le monde attend que la douleur soit bien installée pour prendre le traitement et ne prend pas le second , bien sûr on n.a plus mal
    Les pharmaciens ne rappellent pas les protocoles
    Il y en aurait des choses à revoir
    Mais surtout ne plus voir des personnes souffrir

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