Haïti : instantané dans le chaos | Espace Infirmier
 
Haïti : instantané dans le chaos

05/02/2010

Haïti : instantané dans le chaos

Photographe pour «L’Infirmière magazine», Jean-Michel Delage était en Haïti dans les jours qui ont suivi le séisme du 12 janvier. Voici un aperçu des conditions d’urgence dans lesquelles travaillaient les équipes de secours.

Port-au-Prince, une semaine après le tremblement de terre qui a endeuillé ce petit pays des Caraïbes. Des milliers de corps sont encore enfouis sous les ruines des maisons et des bâtiments (1). Quant aux dizaines de milliers de blessés, ils sont partout. Dans ce qui reste des hôpitaux de la capitale, mais aussi dans des lieux improvisés : au milieu des squares, des places…
 
Près de la cathédrale détruite, un petit établissement abritait jusqu’à présent une clinique ophtalmologique gérée par des médecins cubains. Mais depuis le 12 janvier, les patients affluent. Ils arrivent juchés sur des motos ou bien en voiture, le plus souvent allongés à l’arrière de pick-up. Ils sont pris en charge par les médecins et infirmiers des ONG venues du monde entier, qui ont renforcé les équipes haïtiennes, car le personnel médical haïtien n’a pas été épargné par la catastrophe.
 
Les blessés sont posés à même le sol, abrités du soleil par des bâches – il fait au moins 30 degrés. Dans ce campement de misère, les cris fusent de partout. Les médecins, ici des Sud-Africains ou encore des Péruviens, opèrent à ciel ouvert. Amputation, désinfection, plaies béantes. Un enfer. « Je n’ai jamais vécu une telle situation. C’est pire qu’une guerre, témoigne Jim Ekheert, chirurgien venu du Cap (Afrique du Sud) pourtant habitué aux situations d’urgences. Les premiers jours, nous manquions d’anesthésiants mais nous devions opérer quand même… »

Difficile distribution de vivres

À quelques kilomètres de là, à l’hôpital Saint-François-de-Sales, une partie du bâtiment s’est effondrée. C’était le service de puériculture. Plusieurs dizaines de nouveau-nés y ont perdu la vie. Dans la cour, les blessés sont allongés sur des lits, à l’ombre. Une équipe de médecins belges a pris les choses en main. Un bloc opératoire a même pu être installé. « Mais nous devons nous installer près des fenêtres, pour profiter de la lumière du jour, au cas où le générateur s’arrêterait pendant une opération », précise un médecin, tout en continuant de recoudre le crâne d’une patiente partiellement scalpée.
 
Retour parmi les blessés. Sur un lit, une femme serre un bébé sur son sein. Un miracle parmi toute cette horreur : « Elle est née il y a deux jours, précise la maman. Je suis arrivé légèrement blessée et ma fille est arrivée avec plus d’un mois d’avance. Mais nous allons bien toutes les deux, grâce à Dieu! »
 
Les familles se regroupent autour des leurs. Si la situation s’améliore jour après jour dans cet hôpital, il reste toutefois le problème de la nourriture. « C’est à nous d’amener de quoi manger aux blessés », explique Adler, venu soutenir son épouse tout juste opérée d’une jambe fracturée. Car ici comme dans toute la ville, les distributions de vivres tardent encore. Tout se met en place lentement, dans le chaos post-séisme…

Jean-Michel Delage

1- Au 3 janvier, le gouvernement haïtien déplorait 200 000 morts.

 



Pourquoi tant d’amputations?

Une polémique enfle depuis quelques jours : fallait-il procéder à de si nombreuses amputations? [lire notamment ici] Certes, la situation des premiers jours obligeait les équipes soignantes à réagir très vite. Et pour éviter les gangrènes, certains chirurgiens ont recouru massivement à ces opérations. Or, les blessés bénéficieront difficilement d’un vrai suivi médical, et moins encore d’aide psychologique. Dans ce pays où 72% de la population survit avec moins de 2 dollars par jour (source: ONU), il était déjà compliqué de trouver du travail. Quelle vie sera possible pour ces milliers d’infirmes?

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