Eprus : le rapport qui accable… le ministère | Espace Infirmier
 
Eprus : le rapport qui accable… le ministère

28/10/2010

Eprus : le rapport qui accable… le ministère

La Cour des comptes s’est penchée sur le fonctionnement de l’Établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires. Elle pointe le rôle excessif de l’Etat dans la gestion de la pandémie de grippe A(H1N1).

Les Sages de la rue Cambon n’auront épargné ni l’une, ni l’autre des deux missions fixées à l’Eprus, créé en mars 2007. Cette institution est chargée, d’une part, d’acquérir et gérer des stocks pour faire face à des catastrophes sanitaires, et d'autre part de constituer et gérer un corps de réserve sanitaire. L’Eprus a fait l’objet d’un rapport de la Cour des comptes, remis le 14 octobre dernier à l’Assemblée nationale.
 
Après les commissions d’enquête de l’Assemblée et du Sénat, qui ont rendu leur copie durant l’été, ce rapport revient sur la gestion de la crise H1N1, avec une moindre complaisance. En effet, compte tenu des difficultés d’installation de l'Eprus, celui-ci n’est entré en phase active que courant 2009, avec l’émergence du virus de la grippe A. Les vaccins et médicaments pour lutter contre une éventuelle pandémie ont ainsi représenté à eux seuls 72% des achats réalisés en 2009. A la différence des députés et des sénateurs, la cour pointe l’omniprésence du ministère de la Santé, qui aurait, selon les mots de Rolande Ruellan, présidente de la sixième chambre de la Cour des comptes, « tenu en laisse » l’établissement.
 
Pas de négociation sur les prix

 
Si les méthodes de stockage et d’acquisition de l’Eprus ne sont pas remises en question, le mode de passation des marchés soulève en revanche de nombreuses critiques. Il n’apparaît en effet pas justifiable, estime le rapport, que deux des quatre commandes de vaccins aient été réalisées sous couvert de l’article 3-7° du Code des marchés publics (qui concerne des marchés exigeant le secret ou des mesures particulières de sécurité) au lieu d’utiliser la procédure habituelle ouvrant le marché à la mise en concurrence et à la publicité.
 
« La politique de commande et de négociation a été exclusivement définie par le ministère, tant en ce qui concerne les décisions de principe que les éléments de négociation,
a souligné Rollande Ruellan. Et il n’y a pas eu de négociation sur les prix. On est allé bien au-delà de ce que prévoyait la lettre de la loi et la convention signée entre l’Etat et l’Eprus. » Une garantie a même été rédigée afin que les produits commandés soient partiellement payés (voire remplacés par des vaccins contre un autre virus grippal !) en l’absence d’autorisation de mise sur le marché… Sans compter le non-engagement de la part des laboratoires pharmaceutiques sur les délais de livraison ou le retard à l’annulation des commandes à compter du moment où le schéma vaccinal a été modifié, passant de deux à une injection.
 
235 au lieu de 20 000 pour la réserve de renfort
 
Quant à la constitution de la réserve sanitaire, le rapport pointe la montée en charge trop lente du dispositif. 1.000 professionnels de santé devaient être recrutés pour la réserve sanitaire d’intervention et 20.000 pour la réserve de renfort. « L’objectif était beaucoup trop ambitieux par rapport au nombre d’étudiants et de professionnels retraités depuis moins de trois ans, souligne Rolande Ruellan. » Début juin 2010, l’établissement indiquait un effectif de 268 professionnels pour la réserve d’intervention et de 235 pour la réserve de renfort… Conscient de cette difficulté, le gouvernement serait en train de réfléchir à une nouvelle doctrine de recrutement et d’emploi de la réserve sanitaire…
 
L’état du recrutement n’a évidemment pas permis que la réserve soient réellement utilisée durant la campagne de vaccination. « Mais le bref délai entre la constitution de l’établissement et l’ouverture de l’épidémie grippale n’a pas été assez long pour permettre aux institutions déconcentrées de percevoir l’apport de la nouvelle formule et la nécessité de procéder dans des délais rapides à une campagne de recrutement », reconnaît volontiers Rolande Ruellan.
 
D’où le recours aux procédures de réquisition, mieux connues des préfectures et des Drass, là encore imposé par le ministère de la Santé. La Cour des comptes prend également soin de souligner l’incroyable confusion juridique dans laquelle la rémunération des personnels réquisitionnés a, pour partie, été transférée à l’Eprus en février 2010. Mais ni l’Eprus, ni le ministère de la Santé ne se sont encore exprimés quant au rapport de la Cour des comptes.
 
Sandra Mignot 

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