OBJECTIF SOINS n° 0304 du 14/03/2025

 

DOSSIER

David Naudin   Nathalie Renou  

Docteur en sciences de l’éducation, chercheur associé à l’École universitaire de recherche Sciences infirmières en promotion de la santé (EUR SIePS) et au Laboratoire Éducations et promotion de la santé (LEPS UR3412) Paris Sorbonne Nord, adjoint du directeur de l’IFCS, AP-HPCadre de santé formatrice, master 2 en sciences de l’éducation parcours inclusion, interventions et neurosciences, rédactrice en chef

Les neurosciences et le management en santé sont deux domaines qui convergent de plus en plus, offrant des perspectives nouvelles et prometteuses pour améliorer la qualité des soins, le bien-être des professionnels de santé et l'efficacité des organisations.

Les neurosciences ne sont pas susceptibles de tout expliquer ou résoudre. Elles offrent cependant des clés précieuses pour mieux comprendre le management et les interactions humaines. Elles apportent un éclairage sur nos processus de décision et d’adaptation, sans pour autant fournir des solutions « toutes faites ». Parmi leurs contributions, les concepts de « cerveau simulateur » et de « simplexité », développés par le neurophysiologiste Alain Berthoz(1), apportent un éclairage intéressant sur la manière dont les individus perçoivent, anticipent et interagissent dans des environnements complexes.

Le cerveau simulateur

Le « cerveau simulateur » désigne la capacité intrinsèque du cerveau à élaborer des représentations internes du monde extérieur, permettant ainsi de prévoir les conséquences potentielles de nos actions avant même de les entreprendre. Cette faculté de simulation mentale est essentielle pour la prise de décision, car elle offre la possibilité d’évaluer divers scénarios et d’anticiper les résultats possibles sans nécessiter une expérimentation réelle.

Dans un contexte managérial, cette aptitude se traduit par une meilleure prévision des défis organisationnels et une adaptation proactive aux changements, renforçant ainsi la résilience et l’efficacité des équipes.

La simplexité

Parallèlement, le concept de « simplexité » proposé par Berthoz suggère que, face à la complexité du monde, le cerveau adopte des stratégies simplificatrices pour gérer l’information de manière efficiente. Cette approche ne vise pas à réduire la complexité en soi, mais à élaborer des modèles opérationnels qui rendent cette complexité gérable et compréhensible.

Appliquée au management, la simplexité encourage les leaders à développer des cadres décisionnels flexibles et adaptatifs, capables de saisir l’essence des situations complexes sans s’enliser dans des détails superflus. Cela favorise une prise de décision plus agile et une communication plus claire au sein des organisations.

Les neurosciences permettent de mieux comprendre le fonctionnement du cerveau, les émotions, les motivations et les comportements humains. Intégrer ces concepts neuroscientifiques dans les pratiques managériales implique une reconnaissance de l’importance de la simulation mentale et de la simplification stratégique dans la gestion quotidienne.

Les managers peuvent ainsi encourager leurs équipes à utiliser des techniques de visualisation pour anticiper les défis et élaborer des plans d’action efficaces.

De plus, en adoptant une approche de simplexité, ils peuvent structurer les processus organisationnels de manière à ce que les informations essentielles soient mises en avant, facilitant ainsi la prise de décision et l’alignement des objectifs. Tout cela, dans une pratique éthique et respectueuse des êtres humains.

Les neurosciences, une réelle opportunité

Ainsi, les apports des neurosciences, à travers les notions de « cerveau simulateur » et de « simplexité », offrent des outils conceptuels puissants pour repenser le management. En s’appuyant sur ces principes, les organisations peuvent améliorer leur capacité à anticiper, à créer, à simplifier et à agir de manière cohérente dans des environnements complexes et évolutifs.

Bibliographie

1. Berthoz, A. La simplexité. Odile Jacob ; 2009.