Nouveau report de la loi Grand âge - Objectif Soins & Management n° 279 du 01/02/2021 | Espace Infirmier
 

Objectif Soins n° 279 du 01/02/2021

 

Actualités

Claire Pourprix  

Vieillesse

C'était une promesse lancée dès le début du quinquennat d'Emmanuel Macron : une loi « Grand âge et autonomie » destinée à compléter la 5e branche de la Sécurité sociale pour mieux concentrer les financements dédiés à l'autonomie jusqu'à présent dispersés dans plusieurs administrations, et repenser la gouvernance, l'organisation des services à domicile ainsi que le modèle des Ehpad pour répondre aux besoins et attentes de notre population vieillissante comme des professionnels.

Le 14 janvier dernier, Gabriel Attal, porte-parole du gouvernement, a annoncé un nouveau report de la loi Grand âge et autonomie. Alors que cette loi aurait dû être votée en 2019, elle a été repoussée en raison d'un embouteillage législatif puis de la crise sanitaire, et ne figure donc désormais plus au calendrier 2021.

Le 18 janvier, les quatre fédérations associatives de l'aide, de l'accompagnement et des soins à domicile Adédom, ADMR, FNAAFP/CSF et UNA (1) ont publié un communiqué commun pour faire part de leur indignation à l'annonce de ce nouveau report. « Plus de 80 % des Français souhaitent vieillir à domicile et les besoins pour faire face aux défis du Grand âge sont parfaitement connus : les rapports de Dominique Libault, Myriam El Khomri, Denis Piveteau et du Haut conseil de la famille, de l'enfance et de l'âge, mettent en évidence l'impérieuse nécessité de revaloriser les métiers de l'aide et des soins à domicile et d'identifier des financements pérennes pour le secteur. L'heure n'est donc plus aux débats, encore moins aux diagnostics. C'est désormais d'une décision politique dont nous avons besoin », argumentent-elles.

« Une focale particulière sur les enjeux du grand âge »

La question du grand âge n'a sans doute jamais été autant au cœur de notre actualité sanitaire et sociale et le sera vraisemblablement tout autant voire plus dans les prochaines années, au vu de la démographie de notre pays. La ministre déléguée chargée de l'Autonomie, Brigitte Bourguignon, l'a d'ailleurs rappelé dans son discours d'ouverture du 13e colloque national de la FNADEPA (Fédération nationale des associations de directeurs d'établissements et services pour personnes âgées) le 20 janvier dernier : « Rien ne sera plus comme avant parce que la crise a mis une focale particulière sur les enjeux du grand âge. Ces enjeux, vous le savez tous, nous poussent évidemment à agir. L'urgence démographique n'est pas pour demain, elle est pour aujourd'hui : 1,5 million de personnes sont concernées aujourd'hui directement par la perte d'autonomie ; 1 million de professionnels travaillent à leurs côtés ; 11 millions d'aidants sont touchés dans leur quotidien ; 15 millions de personnes sont âgées de plus de 65 ans et seront donc très bientôt concernées par la perte d'autonomie. Ces chiffres existaient évidemment avant la crise sanitaire, mais, par sa brutalité contre les personnes âgées, elle a mis le doigt sur la nécessité de profondément changer notre modèle. »

Les besoins sont donc bien identifiés et la ministre déléguée a affirmé que la réforme du grand âge est déjà en cours avec la mise en œuvre de plusieurs mesures : prime Covid des métiers du domicile et augmentation salariale dans le cadre de l'avenant 44 à la Loi de financement de la Sécurité sociale, multiplication par quatre de la participation de l'État dans les opérations de rénovation, création de places ou déploiement numérique dans le cadre du plan de relance, mobilisation des collectivités et des associations dans la lutte contre l'isolement des personnes âgées, en particulier en milieu rural.

Elle a par ailleurs assuré que le projet de loi « est toujours une priorité pour ce quinquennat, dès que la crise sanitaire en permettra l'examen ».

Les professionnels de santé ne l'entendent pas ainsi : pressés de voir la situation de leur secteur s'améliorer, ils demandent au gouvernement de faire de cette loi une des priorités de 2021. Pour Jean-Pierre Riso, président de la FNADEPA, « la loi Grand âge n'est plus une urgence, elle est vitale ! Que la crise la relègue sine die serait intolérable ». Dans un communiqué du 20 janvier, il explique : « En effet, la crise sanitaire que nous traversons actuellement a exacerbé et accéléré les tensions que la FNADEPA dénonce depuis des années : les difficultés de recrutement, le manque de moyens humains et financiers, les cloisonnements entre établissements et domicile, entre sanitaire et médico-social, les limites d'une gouvernance locale complexe, etc. La FNADEPA refuse de baisser les bras. Nous refusons de voir s'épuiser nos professionnels, nos collègues qui s'investissent au quotidien pour protéger les personnes âgées et leur assurer un accompagnement digne. Nous refusons de voir notre population vieillir dans une société inadaptée au vieillissement. »

(1) Adédom : Fédération du domicile

ADMR : réseau associatif national de services à la personne

FNAAFP/CSF : Fédération des Associations de l'Aide Familiale Populaire

UNA : Union Nationale de l'Aide, des Soins et des Services aux Domiciles