La HAS détaille sa V2020 pour la certification - Objectif Soins & Management n° 276 du 01/09/2020 | Espace Infirmier
 

Objectif Soins n° 276 du 01/09/2020

 

Actualités

Anne Lise Favier  

Qualité et sécurité des soins

La Haute autorité de santé a présenté son bilan de l'année 2019. Si ses missions habituelles se poursuivent, elle ajoute de nouvelles cordes à son arc et annonce la future V2020 de la certification, plus centrée sur la culture d'évaluation de la pertinence.

« Ce bilan témoigne des actions mises en œuvre l'an dernier, au plan national et international, pour favoriser l'accès aux produits de santé innovants, pour élaborer des parcours de santé et de vie à partir des besoins des personnes, ou encore pour construire un nouveau dispositif de certification des établissements de santé, simplifié et ancré dans les pratiques de soin » : c'est en ces termes que Dominique Le Guludec, présidente du collège de la Haute autorité de santé (HAS) présente le bilan de l'année 2019. Une année qui est celle de la création de nouvelles commissions, à l'image de la commission « recommandations, pertinence, parcours et indicateurs » (CRPPI) ou de la commission « impact des recommandations » (CIR) qui vise à accompagner et mesurer les changements de pratiques professionnelles appelées par les recommandations de la HAS. C'est aussi l'occasion pour la HAS de revenir sur l'instauration d'un conseil pour l'engagement des usagers (CEU), une nécessité qui se justifie pour elle par le fait que la « qualité du système de santé progresse sous l'impulsion d'usagers acteurs et autonomes » et qui s'est réuni pour la première fois le 25 avril 2019. C'est une commission mise en place pour 5 ans, conçue comme un lieu de réflexion, d'échange et d'appui pour éclairer les travaux de l'institution et qui dispose d'un pouvoir d'alerte auprès du collège de la HAS. Présidé par Christian Saout, ancien président du Collectif inter-associatif sur la santé (CISS), ce CEU est composé d'usagers du système de santé et d'associations mais aussi d'experts, d'universitaires, de professionnels de santé venant d'établissements de santé ou sociaux, médico-sociaux.

Évaluation au service du patient

Du point de vue de ses missions, rappelons que la HAS évalue les technologies de santé d'un point de vue clinique et médico-économique. Ses avis rendus aux pouvoirs publics permettent d'éclairer leur décision en vue d'une prise en charge par la solidarité nationale et de la négociation du prix de ces produits : en 2019, elle a ainsi rendu 581 avis et évalués 475 médicaments, notamment dans le champ de l'oncologie. Elle est aussi à l'origine d'un avis défavorable sur le maintien du remboursement de l'homéopathie. Concernant les dispositifs médicaux, notamment dans le champ de la chirurgie orthopédique et traumatologique mais aussi en cardiologie, la HAS a rendu 308 avis en évaluant 276 dispositifs dont de nombreuses nouveautés. Enfin, elle a publié 41 avis sur les actes professionnels puisque c'est également elle qui les valide en vue de leur remboursement (par exemple en chirurgie de l'obésité, elle a émis un avis défavorable sur le by-pass gastrique en oméga). D'un point de vue médico-économique, 24 avis d'efficience ont été adoptés, avec par exemple des séquences de traitements intégrant des bio-similaires.

Recommandations de santé publique

Sur le volet de sa mission de recommandations de bonnes pratiques, la HAS a émis 114 nouvelles publications à destination des professionnels de santé ou des pouvoirs publics pour une prise en charge pertinente des usagers du système de santé : elle est ainsi à l'origine de plusieurs documents sur le déploiement de la télémédecine, qui a connu un réel élan en ce début d'année avec la crise sanitaire.

Dans le champ médico-social, elle a également proposé des recommandations pour les professionnels du secteur, par exemple en lien avec la protection de l'enfance ou le handicap. Enfin du point de vue de la santé publique, la HAS a également émis trois recommandations, portant l'une sur le dépistage du papillomavirus, l'autre sur le dépistage plus large du virus de l'hépatite C et enfin le troisième sur la mammographie par tomosynthèse. Le champ des recommandations vaccinales relevant également des compétences de la HAS, elle a livré 8 recommandations dans ce sens, proposant notamment d'élargir la vaccination contre le papillomavirus aux garçons.

Une V2020 qui s'annonce

Dernier volet de ses compétences, la mesure et l'évaluation de la qualité, cheval de bataille de la HAS depuis sa création, la HAS détaille que l'évaluation s'est poursuivie dans sa V2014 : la version V2020 arrivant dans les établissements, elle vise à un développement de la culture d'évaluation de la pertinence et du résultat au sein des équipes de soins. Concrètement, 250 professionnels ont aidé à la construction de ce nouveau référentiel (médecins, soignants, gestionnaires, représentants de patients) ce qui a permis de dresser une première version du nouveau référentiel soumise à concertation. 11 visites expérimentales ont été réalisées, notamment pour s'assurer de la pertinence de ce nouveau modèle. « La certification s'assurera que les équipes de soins mesurent et analysent la pertinence de leurs pratiques et leurs résultats de leur prise en charge », précise Anne Chevrier, cheffe du service de certification des établissements de santé. Mais attention, « il ne s'agira pas d'apprécier la pertinence des décisions diagnostiques et thérapeutiques individuelles ou le niveau de résultat observé », prévient-elle. L'objectif de cette nouvelle version de la certification est de connaître la capacité des équipes à analyser leurs pratiques et leurs résultats et à rechercher les causes des écarts constatés entre observé et attendu pour mettre en place les améliorations nécessaires. Ce déploiement sera progressivement mis en place pour des premières visites prévues à la fin de cette année.

Culture de l'évaluation

Pour cette occasion, un nouveau type d'expert-visiteur a été élaboré, plus proche du terrain avec une approche médicalisée, qui utilisera la méthode du patient-traceur : « c'est une méthode basée sur l'évaluation des éléments clés de la prise en charge d'un patient dans un établissement de santé afin d'apprécier la qualité et la sécurité des soins délivrés. Elle repose sur une approche ancrée sur le terrain : l'expert s'entretient d'abord avec le patient et/ou son entourage s'il s'agit par exemple d'un enfant. Il questionne le patient durant une vingtaine de minutes, puis l'équipe qui assure la prise en charge du patient pour retracer avec précision son parcours depuis son arrivée jusqu'à sa sortie. Après quoi, il partage les éléments recueillis avec l'équipe d'experts-visiteurs. Ce nouveau profil d'expert propose de nouvelles modalités d'exercice, avec par exemple 2 jours de visite par an contre 3 à 4 en moyenne pour les experts-visiteurs médecins ou soignants. Cela permet à plus de médecins de pouvoir s'impliquer, comme par exemple les médecins libéraux », détaille le Dr Hélène Catenoix, neurologue à Bron (Hospices civils de Lyon) et médecin-expert visiteur. Un changement d'échelle qui annonce la volonté de la HAS d'intensifier la culture de l'évaluation des résultats : « Pour intensifier la culture du résultat, d'autres PREMS (Patient Reported Experience Measures) et des PROMS (Patient Reported Outcome Measures) sont en cours de développement. Pour les premiers, il s'agit d'évaluer factuellement l'expérience vécue par le patient. Les PROMS, eux, s'intéressent aux résultats cliniques rapportés par les patients », explique Laetitia May-Michelangeli, cheffe du service « évaluation et outils pour la qualité et la sécurité des soins ».

La simulation pour appréhender les risques

Pour placer la sécurité du patient au centre de ses préoccupations – rappelons que la HAS pilote au niveau national le retour d'expérience des évènements indésirables graves associés aux soins – la HAS, a publié un guide « simulation en santé et gestion des risques » : « On peut tester un nouvel environnement de travail – bloc opératoire par exemple - avant son ouverture : on simule alors une prise en charge d'un patient au sein de cet environnement pour détecter puis analyser les erreurs qui pourraient survenir afin de les corriger », détaille Bruno Bally, adjoint à la cheffe du service évaluation et outils pour la qualité et la sécurité des soins. En parallèle, la HAS annonce la construction d'un nouveau dispositif d'évaluation des établissements sociaux et médico-sociaux guidée comme chaque fois par une exigence de qualité des services délivrés.