Le cru 2015 du PHRIP est arrivé - Objectif Soins & Management n° 242 du 01/01/2016 | Espace Infirmier
 

Objectif Soins n° 242 du 01/01/2016

 

Actualités

Cécile Almendros  

Recherche Le ministère de la Santé a retenu 22 projets dans le cadre du Programme hospitalier de recherche infirmière et paramédicale (PHRIP) 2015.

Avec six projets de moins qu’en 2014(1), la cuvée 2015 du PHRIP montre que « le niveau d’exigence scientifique » à l’égard des paramédicaux n’a rien à envier à celui des autres programmes de recherche hospitaliers, note la vice-présidente de l’Association pour la recherche en sciences infirmières Ljiljana Jovic. Ils seront financés à hauteur de 3,7 millions d’euros, soit 169 137 euros par projet en moyenne(2), contre 157 000 euros l’an passé. Parmi les porteurs de projet, on compte huit infirmières, six kinésithérapeutes, quatre cadres, deux ergothérapeutes, une orthophoniste et un médecin. Les projets concernent surtout la réanimation, la gériatrie, la cancérologie et la pédiatrie.

Des projets très hospitalo-centrés

Bien que l’instruction d’appel à projets de la Direction générale de l’offre de soins (DGOS) consacre les soins primaires comme “thématique prioritaire” de recherche et insiste sur le fait que le PHRIP est ouvert aux professionnels libéraux, le cru 2015 fait comme toujours apparaître des projets très – pour ne pas dire exclusivement – hospitalo-centrés. Certes, l’AP-HP truste moins la liste que l’an dernier(3), mais seuls trois projets ne sont pas hébergés par des CHU(4). Cela n’est sans doute pas étranger au fait que les CHU sont les établissements qui ont le plus accès aux crédits Merri(5), observe Ljiljana Jovic.

Des freins et des axes d’amélioration

« La recherche, notamment celle-ci qui est émergente, requiert un environnement », explique Hélène Coulonjou, cheffe du bureau innovation et recherche clinique à la DGOS. Pour que les professionnels libéraux puissent se lancer, ses services « essaient de structurer la recherche en soins primaires en proposant un guichet unique pour que les porteurs de projets libéraux ou maisons de santé puissent recourir à une plateforme de ressources (méthodologistes, biostatisticiens, etc.) », indique-t-elle. Ce dispositif est en phase de test avec les Hôpitaux universitaires du Grand-Ouest (Hugo), l’un des sept groupements interrégionaux de recherche clinique et innovation (Gersi) de France. Autre obstacle pour les libéraux : la rémunération. « Mener un projet de recherche dans un établissement peut être compliqué car il n’y a pas toujours de temps dédié, mais au moins perçoit-on un salaire », souligne Ljiljana Jovic, tandis que « le libéral qui passe du temps à écrire son projet de recherche n’est pas rémunéré ».

Élargir le choix des thèmes de projet

Un autre axe de progrès réside dans les thèmes des projets. « C’est hyper médical », constate Hélène Coulonjou, « on a l’impression d’un sous-Programme hospitalier de recherche clinique ». « Il serait sans doute plus intéressant » que les soignants « se tournent vers l’évaluation de l’innovation organisationnelle ». Et de regretter que « la spécificité des professions paramédicales » ne ressorte pas dans les intitulés des projets. Ljiljana Jovic y voit « un effet de la manière dont les projets sont construits et structurés » : « Les projets de recherche paramédicaux dans les CHU passent par les délégations à la recherche clinique composées de spécialistes de la recherche médicale qui se réfèrent à ce qu’ils connaissent », analyse-t-elle. « En face, les paramédicaux ne sont pas encore assez formés pour pouvoir défendre une autre voie. » Autre facteur de “médicalisation” des projets : la tendance du PHRIP à privilégier les projets multicentriques(6), qui « ne laisse pas beaucoup de place à l’exploratoire, au descriptif et au phénoménologique », constate Ljiljana Jovic. « Les directions des soins devraient s’impliquer dans la définition de problématiques de soins à explorer » en s’appuyant « sur les paramédicaux qui ont une formation à la recherche ou sont titulaires de doctorats en sciences », plaide-t-elle. Cela pourrait aussi être à l’avenir « l’une des missions des infirmières en pratiques avancées », suggère-t-elle.

(1) Soit un taux de sélection de 13,92 % sur les 158 lettres d’intention recevables.

(2) De 60 996 à 373 502 euros.

(3) 3 projets sur 22 en 2015 contre 9 sur 28 en 2014.

(4) Le CRLC Paul Lamarque-Val d’Aurelle, l’Institut de cancérologie de Lorraine et le CHI de Poissy-Saint-Germain en hébergent chacun un.

(5) Missions d’enseignement, de recherche, de référence et d’innovation.

(6) Comme celui porté par Emmanuelle Cartron au CHU de Nantes intitulé “Efficacité de la prophylaxie du syndrome post-ponction lombaire par une hyperhydratation orale : étude contrôlée, randomisée, multicentrique” ou celui porté par Fanny Crozes au CHU de Toulouse intitulé “Impact des mesures de prévention non pharmacologiques sur l’incidence du delirium en réanimation polyvalente adulte. Étude multicentrique interventionnelle contrôlée randomisée en clusters”.