La mesure de la satisfaction des usagers de l’hôpital - Objectif Soins & Management n° 202 du 01/01/2012 | Espace Infirmier
 

Objectif Soins n° 202 du 01/01/2012

 

Qualité, hygiène et gestion des risques

Isabelle Rahhali*   Sylviane Charbonnier**   Corinne Danet***   Anne-Marie Gautier****   Patricia Valentini*****   Marie-Hélène Lorreyte******  

ENJEU → La qualité se prévoit, se construit, se mesure, et les usagers sont partie prenante de cette évaluation. Mesurer la satisfaction des patients est par ailleurs une obligation réglementaire pour les établissements hospitaliers, comme le stipule l’ordonnance n° 96-346 du 24 avril 1996 réformant l’hospitalisation et précisant que « tout établissement de santé doit procéder à une évaluation régulière de la satisfaction des patients ». Enquête à la Pitié-Salpêtrière.

Le groupe hospitalier Pitié-Salpêtrière (AP-HP) s’est engagé dans une dynamique d’amélioration de la qualité et de la sécurité des soins et accorde, à ce titre, une place prépondérante à la satisfaction des usagers.

Le pôle de chirurgie “tête et cou” a développé un secteur ambulatoire dans les services de chirurgie maxillo-faciale et d’ophtalmologie. Le développement de la chirurgie ambulatoire constitue une priorité pour les hôpitaux de l’AP-HP ainsi qu’un enjeu de santé publique et répond aux mêmes exigences de qualité que les autres secteurs – privé, hospitalisation conventionnelle…

Ces particularités ont favorisé le choix de retenir ce secteur pour mener une enquête de satisfaction par questionnaire auprès des patients.

Cette enquête devait permettre de recueillir et d’analyser les points de vue et les attentes des usagers au travers des réponses exprimées et de prendre les mesures correctives appropriées. Il s’agissait également d’obtenir des résultats exploitables au plan statistique, ce qui n’est pas toujours possible avec le questionnaire de sortie en raison d’un faible taux de réponse.

LA MÉTHODOLOGIE DE L’ENQUÊTE

Cette enquête s’inscrit dans une démarche d’amélioration de la qualité des soins en apportant aux professionnels le point de vue des patients au regard des soins reçus. L’objectif de l’enquête est de faire un état des lieux et d’en ressortir les points forts et ceux à améliorer qui seront pris en compte dans les pratiques professionnelles afin de soigner le mieux possible.

À cette fin, des questionnaires ont été envoyés au domicile des usagers de mi-septembre à fin novembre 2010, huit à dix jours après leur hospitalisation en secteur ambulatoire.

Ils comportaient plusieurs thèmes, dont ceux concernant l’information des patients sur leur état de santé, les relations avec les soignants et le fonctionnement du service, les informations médicales au moment de la sortie ainsi que leur opinion générale sur leur implication dans les décisions médicales les concernant et les soins reçus.

Enfin, quelques questions portaient sur le profil des personnes interrogées (âge, sexe, état de santé). Une question ouverte sur les opportunités d’amélioration du secteur ambulatoire terminait le questionnaire.

Le questionnaire comportait une possibilité de réponse graduée aux questions : la cotation 1 équivalait à “mauvais”, 2 à “moyen”, 3 à “bon”, 4 à “très bon” et 5 à “excellent”.

DES PATIENTS MAJORITAIREMENT SATISFAITS

Le taux de réponse a été de 31,77 % (61 questionnaires ont été analysés) en chirurgie maxillo-faciale et de 46,11 % (sur 83 questionnaires) en ophtalmologie.

→ 53,3 % des patients ayant répondu au questionnaire sont des sujets de sexe féminin contre 46,7 % de sexe masculin en chirurgie maxillo-faciale.

→ La proportion est identique en ophtalmologie avec 53,7 % de femmes et 46,3 % d’hommes.

→ 57,6 % sont âgés de moins de 50 ans en chirurgie maxillo-faciale alors qu’ils ne sont que 11 % à l’être en ophtalmologie. 89 % des répondants ont donc plus de 50?ans en ophtalmologie.

→ 90 % des hospitalisations sont programmées en chirurgie maxillo-faciale et 98,8 % en ophtalmologie.

→ La moitié des répondants du service de chirurgie maxillo-faciale considère que leur état de santé a été “beaucoup” amélioré du fait de leur hospitalisation. Ils sont un peu plus nombreux en ophtalmologie.

Nous avons analysé les réponses “Très bon” et “Excellent” (cotations 4 et 5) aux questions pour rendre compte de la satisfaction des répondants. Ainsi, au moins trois répondants sur quatre des deux services ont une opinion positive/très positive concernant l’information sur leurs symptômes.

La majorité des répondants du service de chirurgie maxillo-faciale et d’ophtalmologie disent avoir une opinion positive/très positive concernant respectivement les informations relatives aux raisons pour lesquelles ils passent des examens, le résultat de leurs examens, l’objectif de leur traitement et les effets indésirables de ce traitement. En revanche, les informations portant sur leur sortie font partie des points à améliorer. Il faut dire qu’une structure récente, fonctionnant depuis peu, montre quelques points faibles, le plus souvent directement liés à cette mise en route. Laisser du temps pour corriger des difficultés de fonctionnement, acquérir une maturité qui peut faire parfois défaut est nécessaire. L’enquête de satisfaction est un bon indicateur pour suivre cette évolution.

Dans le domaine intitulé “Relations avec les soignants et fonctionnement du service”, une majorité de patients (plus d’un patient sur deux) a une opinion positive/très positive concernant la facilité pour identifier le médecin responsable de leur prise en charge, le respect de leur intimité, l’aide apportée par les soignants dans la réalisation de leurs gestes quotidiens, le soulagement de la douleur et la facilité pour voir une infirmière. Nous constatons que la satisfaction des patients concernant l’aide à apporter aux patients dans la réalisation des gestes quotidiens est positive/très positive. Ce qui signifie que les patients ont pu légitimement bénéficier de l’aide qui leur était nécessaire.

Les répondants des deux services s’estiment respectivement satisfaits/très satisfaits de l’organisation et de l’ambiance du service ainsi que de la disponibilité des infirmières.

De même, ils sont satisfaits/très satisfaits de leur implication dans les décisions médicales les concernant.

Plus de 3 patients sur 4 ont également une très bonne/excellente opinion sur les soins reçus.

Enfin, la question ouverte est venue compléter et préciser qualitativement les points forts et les points à améliorer : manque d’informations sur le post-opératoire et les activités pouvant être pratiquées, conditions de confort ne répondant pas suffisamment au besoin d’intimité… Nous constatons que, même si ce mode de prise en charge – secteur ambulatoire – permet de ne passer qu’une seule journée à l’hôpital, il n’en demeure pas moins que les patients expriment le besoin d’une intimité respectée. L’idée selon laquelle une hospitalisation “courte” autoriserait à héberger plusieurs patients dans une même chambre est démentie par ces derniers.

Ces témoignages ont eu pour effet d’aider l’équipe à mieux comprendre les attentes des patients et d’ouvrir des pistes d’actions collectives pour répondre à ces attentes.

DU CONSTAT À L’ACTION

Même si trois patients sur quatre s’estiment satisfaits/très satisfaits des soins reçus, le pôle a pris acte des marges de progrès possibles indiquées par les répondants et mis en œuvre un plan d’actions qualité. Ainsi, une première étape a consisté à rendre les résultats aux équipes médicales et paramédicales des deux services ; une deuxième étape, à renforcer les temps d’échange avec les patients pour répondre à leurs questions et redonner les informations dont ils ont besoin.

Dans la pratique quotidienne, nous constatons que les patients sont souvent pressés de quitter l’hôpital et qu’ils ne prennent pas toujours le temps de poser les questions qui leur permettraient d’être mieux préparés à leur retour à domicile. Néanmoins, le secteur ambulatoire a décidé, avant chaque sortie, de cibler les informations indispensables à transmettre aux patients et de leur remettre les supports utiles à leur compréhension. Ainsi, dans un bureau dédié, le médecin met l’accent sur :

→ les principaux symptômes qui doivent les alerter par rapport à leur pathologie et le degré d’urgence. L’enquête a démontré que les patients redoutent la nuit qui suit le retour à domicile et les possibles complications post-opératoires. Au cours de ce temps, le médecin vérifie également que les patients ont bien noté les coordonnées du service et les rassure. L’infirmière, dans un deuxième temps, vérifie leur niveau de compréhension par des questions les amenant à reformuler les informations reçues. Ces dernières sont tracées dans le dossier de soins ;

→ les activités possibles après la sortie. Le médecin et l’infirmière refont le point sur la possibilité de poursuivre une activité sportive, de la suspendre momentanément ou définitivement ou de la remplacer par un loisir plus approprié ;

→ les ordonnances et les effets secondaires des traitements font l’objet d’une explication renforcée et permettent au médecin d’aborder les bénéfices/risques ainsi que la durée du traitement ;

→ le suivi médical après leur sortie. Les patients sont en effet revus au cours d’une consultation par un médecin ou par une infirmière si des soins infirmiers sont nécessaires. L’infirmière remet et explique au patient le déroulement de ses futurs rendez-vous.

L’instauration de ce temps d’échange, en favorisant une meilleure organisation des modalités de sortie des patients, facilite les conditions de leur retour à domicile et évite les nombreuses difficultés liées à une sortie insuffisamment préparée.

L’ENQUÊTE DE SATISFACTION : UN BAROMÈTRE POUR ÉVALUER LA QUALITÉ DES SOINS AU SERVICE DES ÉQUIPES

La démarche de l’évaluation de la satisfaction des usagers consiste en l’analyse des points forts et des points à améliorer. Elle inclut la mise en œuvre, le suivi d’actions correctives des pratiques professionnelles et de l’organisation des services et doit être régulièrement répétée de façon à apprécier les améliorations et les évolutions. Elle institue les usagers comme partenaires pouvant intervenir et s’impliquer dans la construction de l’amélioration de la qualité des soins. La politique du groupe hospitalier et le pôle “tête et cou” ont d’ailleurs acté dans leur contrat la poursuite du développement de ce type d’enquête qui constitue un véritable outil “d’écoute patients”.

Les professionnels, en se préoccupant de l’avis et des attentes des usagers, sont conduits à analyser et à faire progresser leurs pratiques, à renforcer les démarches d’amélioration et à faire évoluer les modes de prise en charge. Cette évaluation, porteuse de changement à court et moyen terme, constitue une réelle avancée au service de la qualité des soins et des usagers.