Marché européen de la santé : pour ou contre ? - Objectif Soins & Management n° 196 du 01/05/2011 | Espace Infirmier
 

Objectif Soins n° 196 du 01/05/2011

 

Actualités

Annabelle Alix  

OUVERTURE → Une directive européenne, publiée le 4 avril, prévoit la libre circulation des patients dans l’Union européenne, ouvrant la voie à une européanisation du marché de la santé. Représentants des syndicats et députés européens ont lancé le débat.

La directive européenne 2011/24/UE* permet à tout malade de se faire hospitaliser à l’étranger. Lors de sa transposition, des points de contact nationaux les informeront des possibilités thérapeutiques qui s’offrent à eux, à l’échelle européenne. Sauf cas particuliers, leurs soins seront remboursés à hauteur du taux de remboursement français. Quant à leur ordonnance, elle sera reconnue dans n’importe quel État membre, à condition que les médicaments prescrits y disposent d’une autorisation de mise sur le marché (AMM).

Légalisation du tourisme médical

La directive prévoit également des centres européens avec experts et prestataires de soins, qui permettront à la fois de défragmenter la recherche pour la rendre plus efficace, et d’optimiser chaque prise en charge. Par la signature de cette directive, c’est dans une véritable politique de coopération en santé que l’Union européenne s’est engagée.

Jusqu’ici, la Cour de justice de l’Union européenne forgeait les règles applicables en matière de soins transfrontaliers, au rythme des litiges qu’elle devait trancher. Le législateur européen se devait d’intervenir. Mais le 13 avril dernier, dans les locaux de l’Assemblée nationale, syndicats et députés européens débattaient des bienfaits et des dangers de cette nouvelle législation. Car, si la directive a réglé quelques problèmes, elle en a soulevé d’autres. Un exemple : la libre circulation en Europe des professionnels de santé.

Quelques problèmes

Après la libre circulation des patients, celle des professionnels de santé ? Une telle extension de la liberté d’installation risquerait d’accentuer les inégalités territoriales en prestations de soins. « En France, les professionnels de santé s’établissent là où il y a de l’argent, du soleil, et sur la côte », martèle un syndicaliste. Qu’en serait-il si leurs possibilités de choix étaient étendues au territoire européen ? Faudrait-il renforcer les limitations à la liberté d’installation déjà imposées aux infirmières en 2009 ?

Autre problème : pour un même métier, la formation, le diplôme et la profession diffèrent d’un pays à un autre. « En France, une infirmière n’a pas les mêmes compétences, les mêmes tâches, les mêmes responsabilités qu’une infirmière en Angleterre », explique Bernard Salengro, secrétaire national chargé de la santé au travail et du handicap à la CGT-FO. « Les métiers se sont créés avec l’Histoire du pays. On les met en branle en voulant tout harmoniser. On tire le tapis et on voit ce qui reste ! » La différence de salaires et du montant des retraites pose également problème.

Un livre vert de la circulation des professionnels de santé est actuellement “en jachère”, appelant à une poursuitre de la réflexion.

*Directive du parlement européen et du conseil du 9 mars 2011 relative à l’application des droits du patient en matière de soins de santé transfrontaliers.