Cadre de santé et officier militaire - Objectif Soins & Management n° 190 du 01/11/2010 | Espace Infirmier
 

Objectif Soins n° 190 du 01/11/2010

 

WARREN VIDAL

Parcours

Joëlle Maraschin  

Attaché à son identité militaire comme à son identité soignante, Warren Vidal est un cadre de santé qui continue de porter la culture de l’évaluation auprès de ses équipes. Il parle avec la même passion de son métier, que ce soit de ses missions à l’étranger ou de son quotidien de cadre de santé à l’hôpital Bégin (94).

Dès son retour de Kaboul, où il s’est occupé pendant trois mois de la coordination des soins de l’hôpital médico-chirurgical construit par l’Otan, Warren Vidal s’est attelé à terminer la préparation du déménagement d’un des deux services qu’il encadrait jusqu’alors. À 35 ans, Warren Vidal est visiblement de ceux qui aiment relever les défis, que ce soit pour l’organisation de la prise en charge des soins des militaires de l’Otan ou pour celle des patients de l’hôpital Bégin de Saint-Mandé (94).

La découverte de Bégin

Son bac en poche, Warren Vidal souhaite s’orienter vers une profession soignante pour être en contact avec les autres. Natif de Colmar, en Alsace, il choisit cependant de suivre ses études infirmières à l’Ifsi de la Croix-Rouge à Toulon. Diplômé en 1996, le jeune homme d’alors doit effectuer son service national. Mais l’armée offre aux jeunes appelés de profession soignante la possibilité de souscrire un contrat de trois ans pour travailler dans les services de l’un des neuf hôpitaux militaires français. « C’est à ce moment-là que j’ai découvert l’hôpital Bégin, où je me suis senti très bien. Car il existe dans cet hôpital une réelle fraternité et une grande proximité avec les patients », estime-t-il.

Il intègre le corps des Mitha (Militaires infirmiers et techniciens des hôpitaux des armées). Après plusieurs renouvellements de son contrat, Warren Vidal décide de rester dans le service de santé des armées et devient militaire de carrière. À Bégin, il développe ses compétences techniques en cardiovasculaire.

Puis il rejoint le service de suppléance, un pool de professionnels infirmiers polyvalents pour l’ensemble des services de l’hôpital. « Travailler dans un tel service est toujours très formateur. Cela permet notamment de développer son adaptabilité, ce qui est utile lorsqu’on est projeté en mission extérieure », précise Warren Vidal.

Des missions à l’étranger

Comme tout militaire infirmier, Warren Vidal peut être envoyé à l’étranger pour le soutien sanitaire des forces armées, voire des civils dans le cadre de l’aide médicale à la population. Ces missions durent en général deux à trois mois.

Sitôt engagé, il part en 2001 dans un petit hôpital de campagne en Bosnie. « Ma première mission était passionnante », se souvient-il. Un an plus tard, il est projeté en mission extérieure dans un service de réanimation pédiatrique d’un hôpital de Djibouti. Il découvre les pathologies de l’Afrique, notamment des cancers très avancés chez les enfants et des infections particulièrement sévères. Il doit également apprendre à utiliser un matériel spécifique. « J’ai beaucoup de fierté à avoir non seulement aidé la population, mais aussi apporté mon soutien aux militaires », ajoute-t-il.

De référent technique à l’encadrement

De retour de sa mission en Afrique, il envisage de goûter aux fonctions d’encadrement et en parle à sa hiérarchie. À Bégin, les professionnels qui souhaitent évoluer vers l’encadrement sont accompagnés par l’équipe cadre pendant deux ans. Warren Vidal est ainsi nommé comme infirmier “référent technique” aux services des urgences de l’hôpital, un poste sur lequel il bénéficie d’une initiation à la fonction cadre.

Sélectionné dans un premier temps par le service de santé des armées, il se présente au concours civil des instituts de formation des cadres. Retenu par l’IFCS d’Aix-en-Provence, il n’hésite pas à partir en 2005 dans le Sud de la France pour suivre une année de formation. « J’étais d’autant plus intéressé que cet IFCS proposait déjà aux étudiants cadres de suivre une première année de master en partenariat avec l’université », indique-t-il.

Nommé cadre de santé en octobre 2006, il encadre les équipes de soins du service des maladies infectieuses et tropicales et du service d’hépato-gastro-entérologie. Souhaitant poursuivre son cycle universitaire commencé à Aix-en-Provence, il décide cependant de passer un master2 en sciences de l’éducation. Il souhaite en effet intégrer l’équipe de formateurs du Centre d’enseignement des personnels d’encadrement de l’hôpital l’École du Val-de-Grâce, tout en continuant néanmoins sa carrière hospitalière. « J’aspire à poursuivre ma carrière en alternant formation et encadrement des équipes de soins. J’ai toujours pensé qu’un formateur devait en effet garder une fonction à l’hôpital pour être au plus près de la réalité de ses étudiants », commente-t-il.

Pour une dynamique de l’évaluation

Outre son intérêt pour la formation, Warren Vidal est un cadre de santé très attaché au développement de l’évaluation des pratiques professionnelles (EPP) au sein des structures de soins. Il a d’ailleurs beaucoup réfléchi à cette problématique puisque son mémoire de master2 porte justement sur l’appropriation des méthodes d’EPP. « J’essaie de sensibiliser les soignants à cette dynamique de l’évaluation, souligne-t-il. L’évaluation est encore trop souvent vécue comme une sorte de contrôle alors qu’elle permet avant tout de se questionner, d’avancer sur ses pratiques. »

Warren Vidal porte auprès de ses équipes la méthodologie du chemin clinique, plus compliquée selon lui que celle des audits cliniques ciblés mais moins vécue comme un contrôle des pratiques. « Le chemin clinique peut être construit par l’ensemble des acteurs. Il me semble plus facile ainsi de recueillir l’adhésion de l’équipe au projet, même si la mise en place est difficile parce que chronophage », considère Warren Vidal. Et c’est en sensibilisant les soignants à cette dynamique de l’évaluation que le cadre de santé a pu fédérer son équipe autour d’un beau projet, celui de la création d’un hôpital de jour pour les patients séropositifs pris en charge dans le service des maladies infectieuses. « Nous avons suivi les recommandations du rapport Yéni pour construire cette nouvelle prise en charge en hôpital de jour, laquelle repose en grande partie sur le développement de l’éducation thérapeutique », explique-t-il.

Soucieux de faire avancer cette culture de l’évaluation qui lui tient tant à cœur, Warren Vidal a même participé avec d’autres cadres de santé à la rédaction d’un ouvrage sur l’EPP à paraître aux éditions Lamarre.