Une retraite dans l’humanitaire - Objectif Soins & Management n° 189 du 01/10/2010 | Espace Infirmier
 

Objectif Soins n° 189 du 01/10/2010

 

MONIQUE ROBERT

Parcours

Joëlle Maraschin  

Ancienne directrice de l’Ifsi de l’hôpital Saint-Joseph à Paris, Monique Robert continue de se consacrer à un projet humanitaire qui lui tient à cœur depuis près de vingt ans : le développement de la formation continue des infirmières au Liban et en Syrie.

Monique Robert a une retraite plus que bien remplie : expert bénévole en santé hospitalière pour l’Institut européen de coopération et de développement* (IECD), elle consacre une bonne partie de ses journées à animer deux grands projets humanitaires de l’ONG au Liban et en Syrie. De Montreuil en Seine-Saint-Denis où elle vit, elle travaille à distance avec les équipes locales grâce à l’outil Internet, mais elle se rend aussi plusieurs fois par an sur le terrain pour rencontrer les acteurs hospitaliers.

L’aventure libanaise

Alors qu’elle occupe le poste de directrice de l’Ifsi Saint-Joseph à Paris, Monique Robert est sollicitée en 1993 par l’IECD qui recherche en France une école pour un projet au Liban de création d’une formation aide-soignante. « Pendant la guerre, la plupart des aides-soignantes libanaises étaient formées sur le tas. Nous souhaitions créer une école de formation paramédicale dans la banlieue de Beyrouth », explique-t-elle. En accord avec le directeur de son hôpital, motivé aussi par cet engagement humanitaire, Monique Robert prend l’avion pour le Liban.

À la sortie de l’aéroport, elle découvre un pays qui sort de la guerre, des amas de ruines dans le centre de Beyrouth, des immeubles éventrés par les bombes… « J’ai été bouleversée. J’ai senti très vite les immenses besoins de ce pays en reconstruction », se souvient-elle. Avec son équipe de formatrices, elle accueille pendant un an à l’Ifsi deux infirmières libanaises, afin de les former au programme français de formation des aides-soignantes. En charge du suivi pédagogique de l’Institut technique franco-libanais de Sabtieh, Monique Robert se déplace deux ou trois fois par an à Beyrouth. En faisant le tour des terrains de stage des futures aides-soignantes, elle se lie d’amitié avec la directrice de l’hôpital Saint-Joseph de Dora au Liban.

En 1998, une convention de partenariat est signée entre l’hôpital parisien et l’hôpital libanais, afin d’assurer la formation continue des surveillantes religieuses par les cadres de santé Saint-Joseph à Paris. Une vingtaine de surveillantes libanaises sont ainsi accueillies à l’Ifsi et dans les services de l’hôpital. Des cadres de Saint-Joseph partent une semaine au Liban pour échanger leur expérience avec leurs consœurs de l’hôpital de Dora. Plusieurs congrès organisés à Paris et au Liban par les deux hôpitaux viennent concrétiser ces échanges et ce partage d’expériences entre cadres de santé des deux pays.

Une évolution remarquée

« En l’espace de dix-sept ans, les choses ont évolué de façon exceptionnelle au Liban. La formation initiale et continue est désormais d’excellente qualité dans ce pays qui possède aujourd’hui un système de santé de très haut niveau », précise Monique Robert. Elle continue néanmoins de se rendre encore plusieurs fois par an au Liban pour apporter son expertise pédagogique. « Le Liban, c’est aujourd’hui mon deuxième pays : j’y ai tissé tant de liens d’amitiés pendant toutes ces années », confie-t-elle.

Bien que le partenariat entre Saint-Joseph et l’hôpital de Dora ait pris fin en 2006, plusieurs cadres de l’hôpital parisien continuent de leur côté cette aventure humanitaire en se rendant au Liban et aujourd’hui en Syrie pendant leurs congés.

À la rencontre des infirmières syriennes

En 2006, l’IECD souhaite s’engager pour la promotion de la formation continue des infirmières en Syrie. Après quelques hésitations au regard du passé difficile entre le Liban et la Syrie, Monique Robert est partante pour cette nouvelle mission humanitaire.

Avec deux cadres infirmiers de Saint-Joseph, elle se rend plusieurs fois à l’hôpital d’Alep pour expérimenter une formation-action auprès des équipes soignantes. Il s’agit d’observer le travail quotidien des soignants et de travailler avec eux à l’amélioration de leurs compétences professionnelles, notamment en hygiène et aseptie. À la suite d’un audit concluant, la formation-action est développée au sein de trois hôpitaux privés de Damas. « Compte tenu de nos relations avec le Liban, nous avons pris contact avec la clinique du Levant à Beyrouth. Le directeur a accepté de faire participer ses cadres infirmiers à ce projet en Syrie. C’était important, car les infirmières syriennes parlent essentiellement en arabe », ajoute Monique Robert.

Près de deux cents soignantes ont d’ores et déjà été formées grâce à ce dispositif. Le ministère de la Santé en Syrie a décidé depuis peu de promouvoir la formation continue au sein de ses hôpitaux, et l’ONG a commencé des audits dans deux premiers hôpitaux publics.

Une carrière pour la formation

Lorsqu’elle a obtenu son diplôme d’État en 1960 après ses études à l’école d’infirmières de Saint-Joseph, Monique Robert n’imaginait certainement pas qu’elle serait encore aussi impliquée cinquante ans plus tard pour la promotion d’une formation infirmière de qualité. « Un patient en France, aux États-Unis, au Chili ou au Japon a droit à des soins de qualité. Et les infirmières, quel que soit leur pays, doivent être formées le mieux possible », estime-t-elle toujours.

Déjà très intéressée par la formation, Monique Robert a passé son certificat d’aptitude à la fonction de monitrice dès 1966. Mais pendant douze ans elle est surveillante dans différents hôpitaux parisiens avant de rejoindre en 1978 l’école infirmière de l’hôpital Saint-Joseph, un établissement auquel elle est particulièrement attachée. C’est en 1982 qu’elle prend la direction de l’Ifsi de cet établissement privé sur décision du conseil d’administration.

Retraitée depuis 2000, elle reste très investie au sein de l’ONG : « Je suis toujours aussi motivée par l’humanitaire, c’est un vrai virus. Et je n’ai absolument pas l’impression d’être à la retraite », s’enthousiasme-t-elle. Grand-mère, elle s’occupe de ses deux petits-enfants pendant les vacances, tout en restant en contact à distance avec les acteurs locaux des projets qu’elle anime. À la rentrée, elle partira de nouveau à Beyrouth et à Damas.

* Site Internet de l’IECD : http://www.iecd.org/.