Travaux à l’hôpital : les cadres au cœur du processus - Objectif Soins & Management n° 187 du 01/06/2010 | Espace Infirmier
 

Objectif Soins n° 187 du 01/06/2010

 

Cahier du management

Géraldine Langlois  

Dans des établissements aux allures de chantiers permanents, les cadres sont en première ligne sur le terrain de la gestion des risques au quotidien. Dans un environnement sous haute contrainte et à risque amplifié, leurs missions sont de participer, anticiper, communiquer, formaliser, contrôler…

Grues de toutes tailles, palissades, opérations à tiroir, restructurations, constructions, rénovations tous azimuts ou simple maintenance : le monde hospitalier bruisse de milliers de chantiers sans que les établissements cessent pour autant leurs activités. À la clé : gravats de toutes sortes, poussières en suspension, impacts sur l’organisation de l’activité, des équipes, des circuits, circulation d’ouvriers, de matériaux, outillage étrangers à l’activité hospitalière. Et des risques : aspergillose au premier plan, légionellose au second et bien des questions d’hygiène inédites pour des services de soin. S’ils ne sont pas les chevilles ouvrières de ces travaux, les cadres sont en première ligne sur le terrain. Présents dans les services lorsque ces chantiers sont en activité, ils peuvent signaler les risques spécifiques à l’activité de soin qui y est menée, observer la façon dont les travaux se déroulent et vérifier que les mesures de gestion des risques décidées sont respectées.

IDENTIFIER LES RISQUES

Avant toute opération de travaux, il s’agit de bien identifier les risques en jeu. Quelle que soit leur ampleur, « tous les travaux déplacent de la poussière qui contiennent des champignons filamenteux », souligne Raoul Baron, médecin hygiéniste au CHU de Brest. Trésorier de la Société française d’hygiène hospitalière (SFHH), il a piloté avec Jean-Pierre Gangneux, parasitologue médical au CHU de Rennes et membre de la Société française de mycologie médicale (SFMM), un guide pratique à paraître sur le risque infectieux fongique et les travaux en milieu hospitalier. Parmi ces champignons présents dans la poussière, notent-ils, on retrouve fréquemment l’Aspergillus spongiforme (dans 17 à 70 % des cas), le Penicillium (8 à 27 % des cas) ou le Cladosporium (2 à 60 %). Mais c’est l’Aspergillus, notamment fumigatus, qui est le plus souvent responsable d’infections fongiques invasives (IFI). « Ce ne sont pas des infections très fréquentes, souligne le Dr Baron, mais pour les malades les plus fragiles, en hématologie par exemple, elles sont très souvent mortelles… »

Cruelle aspergillose

Pendant longtemps, les services d’hématologie ont d’ailleurs été considérés comme les plus à risque vis-à-vis de l’aspergillose. « Mais aujourd’hui, pratiquement tous les services de l’hôpital prennent en charge des patients de plus en plus fragiles, les traitements sont de plus en plus audacieux et les malades susceptibles de faire des infections à champignon sont aussi en réanimation, en cancérologie, en rhumatologie, etc. », souligne le médecin hygiéniste.

Dans le guide pratique de la SFHH et de la SFMM, une hiérarchie des travaux est établie en fonction du risque environnemental qui les caractérise, des travaux de contrôle sans caractère invasif, peu émetteurs de poussières, aux travaux majeurs de démolition rénovation, construction, générateurs de grandes quantités de poussières. Mais ce risque est modéré ou amplifié par la proximité des travaux avec les services ou les patients à risque : de petits travaux effectués près d’un patient immunodéprimé peuvent être aussi risqués que des opérations plus importantes plus éloignées…

Dépoussiérer

Réduire l’émission de poussière et le confinement de ces poussières dans la zone de travaux par l’isolement du chantier sont les deux mesures majeures permettant de limiter le risque d’aspergillose. À la source, l’utilisation de certains outils plutôt que d’autres diminue la quantité de poussière émise : à charge pour les relais de l’établissement de sensibiliser les entreprises extérieures ou les ouvriers en interne. Mais aussi, surtout, de déterminer quels moyens de confinement du chantier peuvent être mis en œuvre. Si des linges mouillés placés en bas des portes et un nettoyage deux fois plus fréquent pouvaient convenir dans un service de SSR, il a été nécessaire, au bloc, de prendre des mesures bien plus drastiques. « En interne, avec les équipes, il a fallu redéfinir les circuits et prévoir le cloisonnement », se rappelle Marie-Agnès Laly, cadre de santé en anesthésie à l’hôpital de Beauvais. Un cloisonnement en dur, hermétique, du sol au plafond, et des accès au chantier par l’extérieur, quoiqu’il arrive.

Ici, la vigilance des cadres s’exerce à tout instant dès lors que des travaux se déroulent. C’est ainsi que Maxime Gesta, cadre supérieur de santé du service d’accueil d’urgence de l’hôpital de Villeneuve-Saint-Georges, a pu immédiatement réagir lorsqu’un gros nuage de poussière provenant du sciage de béton est passé par les faux-plafonds, au-dessus de la cloison temporaire… « On a fait arrêter les travaux tout de suite, raconte-t-il, on a aéré tout le service puis il a fallu recolmater de nouvelles cloisons et les ouvriers ont fini au marteau-piqueur ou à la masse. »

Légionellose

Outre le risque aspergillaire, d’autres risques liés aux travaux doivent être pris en compte. Notamment ceux qui concernent la légionellose dans le cas où des circuits d’eau sont concernés, soit parce que des interventions doivent être réalisées dessus, soit parce que, du fait de travaux, une partie d’un circuit doit être coupée et des installations (lavabos, éviers, etc.) immobilisées.

Circulations sous surveillance

D’autres risques concernent la circulation de personnes étrangères au service ou à l’hôpital et qui ne connaissent donc pas forcément les activités qui y sont menées, l’utilisation des réseaux électriques (risque de coupure !), les interventions sur les réseaux de gaz médicaux ou de ventilation, l’utilisation de produits chimiques. Voire de travaux “avec points chauds” qui comportent des risques d’incendie ou d’explosion (utilisation de chalumeaux, de disqueuses…). Des étincelles peuvent atterrir dans un recoin et « des départs de feu peuvent se déclencher parfois plusieurs heures après le départ des entreprises, voire le lendemain, dans des cloisons, par exemple », souligne Marc Moulaire, ingénieur chargé de la qualité et de la gestion des risques au GCS Helpam (Ardèche) et membre de la Société française de gestion des risques (Sofgres).

Les allées et venues en provenance du chantier ou vers les travaux, de la part de patients comme d’agents, doivent aussi être contrôlées, sur place, pour des raisons évidentes de sécurité personnelle mais aussi de prévention de la dispersion des poussières. Les cadres ont souvent vu certains s’aventurer sur le terrain des travaux mus par une curiosité… naturelle mais risquée. Lorsqu’elle travaillait en SSR, Patricia Champeymont vérifiait souvent que les portes des pièces où se déroulaient les travaux ou bien où était stocké le matériel de chantier étaient toujours fermées à clé après le départ des ouvriers afin d’éviter que tout patient désorienté ou dément n’y pénètre et s’y blesse. Selon Marc Moulaire, il arrive que des fenêtres, débloquées pour aérer un chantier, ne soient pas rebloquées au départ des ouvriers ou que des portes donnant sur des terrasses ou des vides sanitaires soient laissées déverrouillées…

Autre mésaventure relatée par la cadre du CHU de Limoges, lors de travaux en chirurgie. L’activité et les patients avaient été transférés du troisième au premier étage et le chantier totalement sécurisé. Un jour, « je suis arrivée sur le palier du troisième, devant la porte des soins intensifs, et il y avait du blanc partout, raconte-t-elle. Je me rappelle avoir vu beaucoup de poussière en suspension à travers un rayon de soleil… Sur les trois monte-malades, un était réquisitionné pour les travaux mais les ouvriers l’avaient utilisé pour monter de grosses plaques de plâtre qu’ils auraient dû monter par un escalier indépendant. J’ai appelé le chef de chantier pour tout arrêter immédiatement. C’était tendu. Il a fallu faire un gros ménage d’urgence, poser des linges mouillés sous toutes les portes : c’est par là qu’arrivaient les patients sortant du bloc ! ». Elle a tiré un enseignement de cette expérience : « Le regard du professionnel est toujours indispensable sur les travaux et la manière dont ils se déroulent. Les ouvriers n’avaient pas de mauvaise intention mais ils n’avaient pas conscience de l’impact que leurs actes pouvaient avoir sur les infections nosocomiales. » Dans ces domaines, une bonne information des équipes, de soins et du chantier, est nécessaire. De même que des vérifications régulières, par le cadre mais aussi par l’équipe chargée des travaux sous forme de rondes. D’une manière générale, pour Marc Moulaire, il est inadmissible qu’un chantier reste accessible aux personnes étrangères aux travaux. Pendant les opérations importantes de travaux, rappelle-t-il, le chantier est sous la responsabilité de l’architecte : « toutes les éventuelles visites doivent se faire avec son aval », insiste-t-il, accompagnées et en sécurité (port du casque, etc.). Pour déjouer les tentations de passer outre les barrières, Patricia Champeymont a eu la possibilité d’aller faire le tour du chantier avec des agents. « C’est aussi de la gestion des risques de permettre aux gens de voir où ils travailleront quand les travaux seront terminés », estime-t-elle.

→•FERMETÉ

En matière de circulation, Marc Moulaire évoque d’autres précautions : vérifier que tous les intervenants sont enregistrés et identifiés par un badge (afin de prévenir les intrusions, la malveillance et assurer la confidentialité), qu’ils ont été informés des risques et des mesures de prévention, qu’ils soient accompagnés lors de leurs premiers déplacements dans l’hôpital mais aussi leur demander de se présenter au cadre au préalable et que les interventions soient prévues. « Un cadre peut, voire doit, refuser l’accès à une entreprise non identifiée ou non avertie des risques ou s’il n’a pas été prévenu à l’avance d’une intervention, observe Marc Moulaire, car cela peut perturber l’activité du service. » Idem si le comportement des intervenants est inapproprié. En ce qui concerne les ouvriers relevant de l’établissement, ils connaissent souvent les lieux et un peu mieux les risques mais, pour l’ingénieur du GCS Helpam, les démarches sont les mêmes en termes de préparation du chantier avec les cadres en termes d’horaires, de risques spécifiques. À plus forte raison dans un service sensible.

→•ORGANISATION

L’organisation des circulations des ouvriers, des patients et des agents mais aussi de toutes les fonctions logistiques (blanchisserie, restauration, pharmacie, etc.) relève parfois du casse-tête. Elle doit être revue au fur et à mesure que des salles sont livrées ou que d’autres parties des services sont nouvellement condamnées. Pas facile, lorsque le nouvel ascenseur – seul moyen de faire quitter le bloc au malade – tombe souvent en panne… À chaque nouvelle tranche de travaux, il faut repenser les circuits pour les secours.

ANTICIPER DÈS LE DEBUT DU PROJET

La prise en compte de ces risques doit se traduire dès la conception du projet, avant même le lancement des appels d’offres afin que leur prévention figure dans le cahier des charges. Dans les établissements, ils sont bien connus des Clin et des équipes opérationnelles d’hygiène hospitalière (EOH). Le service travaux de l’hôpital travaille souvent main dans la main avec l’équipe d’hygiène pour caractériser et anticiper les risques propres à un chantier, en amont des travaux. Une étude d’impact complète et un plan de prévention sont nécessaires à ce stade pour caractériser le risque et anticiper les mesures.

En outre, certains établissements nomment un agent dont la mission consiste à suivre les questions de gestion des risques sur un chantier. Et lors de grosses opérations, une mission de coordination Sécurité et protection de la santé est dévolue à une personne, qui peut être membre d’un cabinet extérieur et qui fera l’intermédiaire entre les acteurs hospitaliers et les entreprises prestataires sur ces questions. Le rôle des uns et des autres, responsable des travaux, hygiénistes et autres, en termes de gestion des risques pendant les travaux, n’est pas clairement défini par les textes. Lors de chantiers, la gestion des risques se situe « à la frontière entre services techniques et soignants. Chacun connaît bien ses problématiques mais les interactions peuvent être floues », observe Marc Moulaire. Et les cadres de santé, pas toujours questionnés en amont des chantiers concernant les risques spécifiques liés aux activités de leurs services, ne sont consultés que lorsque les opérations sont sur le point d’être engagées. Que ce soit une entreprise extérieure ou le service technique interne qui intervienne, pourtant, « un chantier doit être préparé, aussi, avec les cadres », estime l’ingénieur ardéchois. Ils sont les plus à même d’évoquer les risques spécifiques à leur activité.

Au centre hospitalier de la côte basque (Bayonne), Lydia Bras-Magnient, cadre supérieur de pôle en gastro, pneumo et onco-hématologie, s’est beaucoup impliquée dans les chantiers, multiples, qui touchent l’établissement depuis 1999. Ibode, elle était déjà très sensibilisée aux questions d’hygiène et de gestion des risques avant de suivre un DU sur le sujet et devenir cadre hygiéniste. À ce poste, elle a ainsi participé à de nombreuses réunions de la cellule sanitaire chargée du suivi des travaux. Chaque lundi, la cellule sanitaire devait établir pour chaque intervention prévue une “fiche travaux” précisant les préconisations en matière de gestion des risques : protection, aspiration, nettoyage, circulations, etc. « Ces fiches étaient faxées à toutes les personnes concernées, y compris les cadres des unités et une visite de suivi était organisée », détaille Lydia Bras-Magnient. À charge pour les cadres de proximité d’indiquer les horaires auxquels les interventions pouvaient avoir lieu. Et pour la cellule sanitaire de les sensibiliser aux enjeux. « Cela nécessite énormément de communication », ajoute la cadre de pôle.

COM-MU-NI-QUER

À Beauvais, les cadres (ou faisant fonction) des blocs opératoires central et gynécologique, d’endoscopie et d’anesthésie ont demandé à être associés dès la conception aux réflexions sur les travaux prévus sur les blocs et la salle de réveil. Un technicien hospitalier faisait le lien entre les services et les entreprises mais ils ont pu apporter leur éclairage sur les plans et conduire les architectes à apporter quelques modifications puis suivre le chantier. « Nous avons souhaité être acteurs de ce chantier, y participer et être présents, comme si on construisait notre maison », explique Emmanuel Dumont, Ibode faisant fonction de cadre aux blocs opératoires central et gynécologique. Patricia Champeymont, cadre de santé de chirurgie thoracique, cardiovasculaire et angiologie au CHU de Limoges, a suivi trois gros chantiers : la réfection d’un service de SSR, celle d’une unité de chirurgie et celle d’une unité de soins intensifs. Elle a ainsi animé des réunions de chantier régulières auxquelles participaient les médecins, les infirmières, les aides-soignantes destinées à informer les équipes de l’avancement des travaux, choisir certains éléments à mettre en œuvre, organiser les déménagements de pièces, les opérations de nettoyage, de remise en service, etc. Sur le terrain, ce sont bien les cadres de santé – ou une personne désignée par eux – qui sont aux avant-postes pour évaluer si les précautions mises en œuvre permettent aux soins de se dérouler dans les conditions de sécurité et de qualité suffisantes. Et organiser leur continuité.

VIGILANCE PERMANENTE

L’étanchéité des cloisonnements doit faire l’objet d’une surveillance constante, de même en ce qui concerne la condamnation de certaines portes. Patricia Champeymont a remplacé elle-même bien des morceaux de gros ruban adhésif orange destinés à condamner des portes et empêcher les fuites de poussière venant du chantier. Et empêcher les déplacements vers la zone de travaux. Une bonne communication préalable entre responsables du chantier et hospitaliers s’impose donc, de même qu’une vigilance permanente de la part des cadres. Emmanuel Dumont, à Beauvais, souligne la nécessité de vérifier la non-pollution des circuits de ventilation par des prélèvements plus fréquents. Et la propreté des tapis adhésifs à l’entrée des zones-tampons, dont il fallait parfois réclamer le remplacement, ajoute Marie-Agnès Laly.

Des précautions particulièrement draconiennes dont certaines sont prises dans des zones à haut risque comme le secteur protégé d’hématologie du centre hospitalier de la Côte basque, resté ouvert pendant de gros travaux. « Les barrières de protection ont été renforcées à l’entrée du service, souligne Lydia Bras-Magnient. Nous avons ajouté des sas et, à l’entrée de ses sas, nous avons fait installer des brumisateurs d’eau » contre la poussière volatile. Les prélèvements d’air ont aussi été plus fréquents. Lors de précédents travaux au bloc, « nous vérifiions aussi que les ouvriers qui devaient passer par le service avaient une tenue la plus propre possible, ajoute-t-elle, qu’ils passent tous par le vestiaire et revêtaient des tenues de bloc, un masque, une charlotte, des sur-chaussures, etc. De plus, toute personne qui devait intervenir au bloc devait s’adresser au cadre et faire passer ses outils par un circuit spécial où ils étaient d’abord nettoyés ». L’usage du carton, comme emballage ou comme protection, était aussi prohibé à l’intérieur des locaux.

Petites entraves à risques

D’autres points méritent l’attention des cadres dans les unités de soins. Pas question, souligne Marc Moulaire, de laisser un ouvrier travailler dans la chambre d’un patient en sa présence. La vigilance est également de mise lorsqu’une intervention avec point chaud est nécessaire : un “permis feu” doit absolument avoir été délivré au préalable par le responsable technique ou sécurité de l’établissement. Attention aussi aux entraves, potentielles sources d’accident : rallonge électrique en travers d’un couloir, escabeau abandonné pendant quelques minutes, matériel entreposé dans un passage… Relevant plus de la nuisance que du risque, le bruit peut aussi être atténué par l’usage de certains outillages ou par le choix de certains moments d’intervention. Quant aux odeurs, elles peuvent être réduites.

LIVRAISON À HAUT RISQUE

À la fin du chantier, toute une série de précautions doivent permettre aux équipes de prendre ou de reprendre possession des lieux en toute sécurité, en liaison étroite avec l’équipe d’hygiène. L’entreprise ou l’équipe qui a réalisé les travaux effectue un premier nettoyage du chantier, qui est souvent aéré pendant plusieurs jours. Ensuite, une équipe interne réalise un second nettoyage selon les normes hospitalières. « Il faut être très prudent, souligne Patricia Champeymont. Par exemple, l’eau a stagné dans les circuits, les robinets. Il faut alors appliquer une procédure pour les remettre en route » en laissant couler l’eau de tous les robinets un quart d’heure plusieurs fois par jour, par exemple, pendant plusieurs jours, et en javellisant les siphons. Les circuits d’air doivent aussi être vérifiés par des prélèvements par les services ou entreprises ad hoc lors de leur mise ou remise en route.

Le décloisonnement constitue une source d’émission de poussière importante. Aux blocs de l’hôpital de Beauvais, il était effectué lors des veilles de week-end. Le samedi et le dimanche, les poussières pouvaient retomber et un nettoyage intensif pouvait être réalisé (balayage humide des murs, des sols, des plafonds) trois fois par jour pendant trois week-ends successifs… Au bout de la première semaine, souligne Emmanuel Dumont, la ventilation des salles était remise en route et contrôlée. Elle tournait pendant une semaine sans qu’aucune activité ne se tienne sur place. Suivaient la remise en route des appareils et équipements médicaux, la réception des fluides, le réaménagement des locaux, sans cartons, insiste Patricia Champeymont, et avec des meubles et objets ayant subi, éventuellement, une désinfection fongique. Après un troisième week-end de nettoyage (et le feu vert qui convient en matière de qualité de l’air, notamment), l’activité pouvait reprendre « sur des interventions basiques » dans les nouvelles salles, précise le cadre du bloc central, « pour que le personnel reprenne ses marques ». Il aura fallu revoir toutes les circulations ! Et faire attention à des petits détails d’importance : y a-t-il autant de prises informatiques que d’ordinateurs ? Fonctionnent-elles ? Les portes automatiques sont-elles opérationnelles ? Les contrôles de l’environnement, en outre, sont étendus aux zones frontières du chantier.

CHECK-LIST ?

Chaque opération de travaux d’ampleur constitue une expérience unique mais forte de son expérience, Lydia Bras-Maignent, comme d’autres cadres, a fini par définir une méthodologie, une démarche projet comprenant l’ensemble des éléments-clé à prendre en compte. Patricia Champeymont a pour sa part planché, sous l’égide de sa collègue Marcelle Faye et la cellule qualité du CHU de Limoges sur une procédure complète, une sorte de check-list chronologique. Elle inclut les courriers à adresser aux uns et aux autres, les documents de formalisation des engagements mutuels concernant tous les domaines, de l’hygiène à la pharmacie en passant par les services techniques, les cuisines, le service achats, la logistique, etc. Une demande de la coordination générale de soins afin que l’expérience des uns serve aux autres. Le guide technique élaboré par la SFHH et la SFMM sur le risque infectieux fongique propose également des outils concernant la prévention de ce risque spécifique.

Les cadres, en tout état de cause, jouent un rôle crucial dans la gestion des risques pendant des travaux, et son action sera d’autant plus efficace qu’elle s’articulera avec celle de la cellule d’hygiène, du service gestion des risques, de celui des travaux et du coordinateur sécurité. Comme le souligne Patricia Champeymont, ces préoccupations s’ajoutent aux missions fonctionnelles des cadres et concernent des domaines qui ne lui sont généralement pas familiers. D’ailleurs, pour Marie-Agnès Laly, le fait qu’il y ait un homme dans l’équipe de cadres concernés a souvent facilité les relations avec les professionnels du bâtiment… Quoi qu’il en soit, renchérit Emmanuel Dumont, « impliquer les cadres dans les travaux, c’est déterminant dans le déroulement et la réussite d’un chantier ».

POUR EN SAVOIR PLUS

→ Grille d’évaluation et mesures de prévention du risque infectieux suivant la nature des travaux, Cclin sud-ouest, novembre 2006 (téléchargeable sur www.cclin-sudouest.com)

→ Conférence de consensus Prévention du risque aspergillaire chez les patients immunodéprimés, 21 mars 2000, Anaes, SFHH (téléchargeable sur www.has-sante.fr)

→ Article R.6111-2 du Code de la Santé publique sur l’obligation de consultation de l’instance de consultation et de suivi chargée de la lutte contre les infections nosocomiales lors de la programmation de travaux ou l’aménagement de locaux (à consulter sur www.legifrance.gouv.fr)

→ Article L.230-6 du Code de la Santé publique sur l’obligation de prévention des chefs d’établissements (à consulter sur www.legifrance.gouv.fr)

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