Dix ans de double greffe des mains - Objectif Soins & Management n° 184 du 01/03/2010 | Espace Infirmier
 

Objectif Soins n° 184 du 01/03/2010

 

Actualités

ANNIVERSAIRE → En dix ans, quatre patients ont bénéficié d'une double greffe des mains. Vingt-cinq professionnels font actuellement partie de l'équipe internationale du professeur Jean-Michel Dubernard à Lyon.

Le 13 janvier 2000, Denis Chatelier était le premier patient à bénéficier d'une double greffe des mains à Lyon, au sein de l'hôpital Édouard-Herriot, par une équipe internationale dirigée par le Pr Jean-Michel Dubernard. Depuis, quatre autres patients ont eu recours à ces transplantations d'un nouveau genre. Denis Chatelier a reçu un traitement immunosuppreseur proche de celui administré pour des transplantations d'organes solides. Deux épisodes de rejets cutanés ont été observés les premiers mois, mais contrôlés. Dix ans plus tard, la peau et le système pileux fonctionnent normalement, le patient a retrouvé la perception de la douleur, de la pression, la sensibilité discriminative et le toucher (formes et texture), la mobilité du poignet et des doigts. Depuis 2004, ce sont quelque vingt-cinq professionnels de disciplines complémentaires qui forment l'équipe dédiée à la greffe de mains au sein des Hospices civils de Lyon : des chirurgiens, infirmières, instrumentistes et aides-opératoires issus, pour la plupart, du secteur privé. Ces dix années d'expérience, au cours desquelles il a fallu innover tant sur le plan logistique que technique pour adapter la chirurgie de la transplantation aux mains, ont permis de tirer des enseignements dans trois domaines principalement.

→ D'abord, l'immunologie de la transplantation : la prévention et le traitement du rejet de la peau se sont révélés bien plus aisés que supposé, ce qui permet d'avancer en matière de greffes de tissus composites. Des greffes de face ont ainsi été réalisées en suivant une approche thérapeutique similaire.

→ Ensuite, en matière de neurosciences, avec la démonstration d'une remarquable plasticité du cortex cérébral. La modification des cartes motrices dans le cerveau intervenant avant même la récupération fonctionnelle des mains pourrait ouvrir la voie à de nouvelles méthodes de rééducation.

→ Enfin, sur la plan de la psychologie, il est montré que l'appropriation des mains par les transplantés se fait progressivement, en même temps que le retour à la sensibilité. Le déni s'estompe avec le passage pour le patient de l'usage « des » mains à « mes » mains.

L'équipe, après avoir prouvé son leadership en matière de double transplantation des mains, se fixe d'autres objectifs pour les cinq ans à venir : évaluer les résultats de la greffe de bras, poursuivre des greffes de face et de nouvelles activités de greffes composites et même développer une activité de recherche expérimentale dans un modèle de greffe composite.