“LA NOUVELLE PREMIÈRE MINISTRE SAURA-T-ELLE INCARNER LE CHANGEMENT ATTENDU ?” - Ma revue n° 021 du 01/06/2022 | Espace Infirmier
 

L'infirmière n° 021 du 01/06/2022

 

ÉDITO

Hélène Trappo  

Rédactrice en chef de L’INFIRMIÈR.E

Symboliquement, la nomination tout juste annoncée d’une femme à la fonction de Première ministre quelque trente ans après Édith Cresson, première femme à avoir occupé ce poste, est une décision dont on ne peut que se réjouir. La place des femmes dans notre société, et notamment dans le sérail des hautes fonctions de l’État, reste un éternel combat. Élisabeth Borne l’a souligné à sa façon en dédiant sa nomination « à toutes les petites filles ».

Ceci étant dit, la question est maintenant de savoir si, étant issue du précédent gouvernement, elle saura incarner le changement attendu. Car la tâche est immense. Dans le champ de la santé, les acteurs de tous horizons le martèlent : réformer en profondeur notre système de santé s’avère nécessaire si l’on veut répondre à l’objectif fondamental de l’accès aux soins, de l’amélioration de la santé des citoyens. Sachant que les indicateurs ne sont pas au beau fixe, notamment en ce qui concerne l’espérance de vie en bonne santé. Un indicateur pour lequel la France est à la traîne par rapport aux pays européens les plus avancés. Cela tient en deux questions posées par le sénateur Bernard Jomier* lors de l’édition 2022 du salon Santexpo : « Est-ce que les allocations de ressources et de moyens sont mises au bon endroit ? Est-ce que les acteurs remplissent leur rôle de façon suffisamment organisée par les pouvoirs publics ? » Pour le sénateur, « les diagnostics sont tous sur la table »… Reste à explorer les solutions, ne pas se limiter aux expérimentations, évaluer les dispositifs existants, etc.

Sortir de la crise que traverse le monde de la santé tient aussi à la capacité de la nouvelle équipe gouvernementale à redonner confiance et à remotiver des soignants qui semblent y croire de moins en moins (lire notre article p. 12). Et il n’y a pas, loin s’en faut, que la question de la rémunération. L’un des grands chantiers auquel il est urgent de s’atteler si l’on veut résoudre la question de la pénurie de personnels soignants est celui de l’attractivité des métiers. Et les axes de réflexion sont multiples. D’abord, les infirmières doivent pouvoir se projeter dans un système où leurs valeurs et leur éthique du soin sont respectés, en clair, pas exclusivement assis sur un argument économique. Il faut également prendre en compte les envies d’évoluer dans sa carrière souvent exprimées par les nouvelles générations, voire de reconversions dans d’autres spécialités par le biais de la formation ou grâce à la création de passerelles. Ces évolutions de carrière aspirent à une vraie reconnaissance. Ce qui n’est guère le cas concernant la pratique avancée, par exemple. Favoriser des manières d’exercer à la fois innovantes et ancrées dans les territoires, comme l’exercice interprofessionnel, est encore une piste à approfondir. Donner enfin un peu plus voix au chapitre aux paramédicaux dans la gouvernance participerait aussi d’une attractivité retrouvée.

En tout cas, une chose est certaine, alors que l’été s’annonce critique à l’hôpital comme en ville, les professionnels de santé ne se contenteront pas des promesses de campagne.

* Propos rapportés par APMnews. Bernard Jomier a présidé la Commission du Sénat qui a publié en mars dernier le rapport sur « la situation de l’hôpital et le système de santé en France ».