SOINS SOUS CONTRAINTES - Ma revue n° 006 du 01/03/2021 | Espace Infirmier
 

L'infirmière n° 006 du 01/03/2021

 

DROITS DU PATIENT

JE ME FORME

JURIDIQUE

Jean-Charles Scotti  

avocat au barreau de Marseille jcs@scotti-avocat.fr

Peut-on considérer comme principe acquis le fait que l’hospitalisation sous contrainte autorise, de facto, le soin sous contrainte ?

Selon les dispositions de la loi du 27 juin 1990, il y avait lieu de considérer la contrainte comme une simple mesure administrative accompagnant une modalité de soin requise, qui ne pouvait emporter automatiquement un droit au soin sous contrainte. Dès lors, la seule contrainte de soins possible était celle prescrite par le médecin pour répondre à une situation d’urgence. Cependant, avec les dispositions de l’article L 3211-1 du Code de la santé publique (CSP) modifiées par la loi de 2011, un changement essentiel est intervenu en matière d’hospitalisation sous contrainte : « Une personne ne peut sans son consentement ou, le cas échéant, sans celui de son représentant légal, faire l’objet de soins psychiatriques, hormis les cas prévus par les chapitres II à IV du présent titre et ceux prévus à l’article 706-135 du Code de procédure pénale. » En remplaçant le terme « hospitalisation sous contrainte » par celui de « soins psychiatriques sans consentement », le législateur relance le débat sur la légitimité du soin sous contrainte en psychiatrie. Dorénavant, le soin sous contrainte semble une prérogative médicale associée aux SDRE (soins psychiatriques sur décision du représentant de l’État) ou aux SDT (soins psychiatriques à la demande d’un tiers). Toutefois, pour répondre à la question, il faut garder en mémoire la décision du 20 avril 2012 du Conseil constitutionnel(1) qui a considéré qu’il ne pouvait y avoir de soin sous contrainte dans le programme de soins. Or, le programme de soins est une alternative à l’hospitalisation psychiatrique sous contrainte, sachant que l’obligation de soins semble être la même que dans le cadre d’une hospitalisation.

Ainsi, si le soin sous contrainte n’est pas admis dans le cadre du programme de soins, on peut s’interroger, en raisonnant par analogie, sur la constitutionnalité du soin sous contrainte en hospitalisation complète. Plus prosaïquement, si l’on considère la loi de 2011 - à l’instar de celle du 27 juin 1990 -, le principe directeur en matière de soins psychiatriques consiste dans la préservation de la dignité(2). La seule limite au soin sous contrainte, comme atteinte au principe de l’intégrité corporelle, réside dans la définition que donnent le corps médical et le patient de ce droit fondamental.

RÉFÉRENCES

1. Arrêt du Conseil constitutionnel, décision n° 2012-235 QPC, le 20 avril 2012. Disponible en ligne sur : bit.ly/2LWiJyF

2. Définition de la dignité : la primauté de la personne est fondée sur la reconnaissance de sa dignité et la dignité de la personne implique le respect de l’être humain dès le commencement de sa vie. Le Conseil constitutionnel, dans sa décision 93-343-344 DC, a consacré la dignité comme un principe constitutionnel inscrit dans le préambule de la Constitution de 1946.