Le patient change le débit de sa tubulure dès que j’ai le dos tourné : comment faire ? - L'Infirmière Magazine n° 413 du 01/03/2020 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Magazine n° 413 du 01/03/2020

 

SÉCURITÉ DES SOINS

SUR LE TERRAIN

MON QUOTIDIEN

CHRISTIANE BOLLON*   ANNE-GAËLLE MOULUN**  


*Cadre supérieure de santé à la direction centrale des soins des hospices civils de Lyon

La perfusion intra-veineuse est un acte très fréquent, qui doit être maîtrisé et ne doit jamais être banalisé. Le non-respect du débit de perfusion peut mettre en danger le patient, souligne Christiane Bollon, cadre supérieure de santé à la direction centrale des soins des Hospices civils de Lyon (HCL). L’administration d’une perfusion par gravité est toujours soumise à de nombreuses variations de débit (diminution progressive du volume de soluté dans le contenant, variation de hauteur entre le soluté et le patient, etc.). C’est pourquoi il est préconisé de régler, contrôler, réajuster le débit de la perfusion par comptage de gouttes à la pose puis régulièrement au cours de l’administration. » Pour éviter la moindre intervention du patient sur la molette de régulation de débit du perfuseur, il est important de l’informer dès la pose de perfusion : lui expliquer l’objectif ; lui préciser que l’efficacité de son traitement est liée au temps d’administration; l’informer qu’une modification de la durée de la perfusion (autre que par un soignant) peut avoir des effets défavorables ou contraires sur son traitement. Il ne s’agit pas d’effrayer le patient avec les autres risques encourus (voir encadré). Si, malgré tout, il modifie le débit avec la molette de régulation du perfuseur, il est important de comprendre la situation, de lui faire exprimer ce qu’il a compris et de reprendre les éléments importants de manière plus adaptée. L’incident doit faire l’objet d’une traçabilité synthétique dans le dossier de soins (questions du patient, réponses du soignant). Ces données permettent aux soignants d’assurer la continuité de la prise en soins. S’assurer de la compréhension et de l’adhésion du patient au quotidien permet de classer la question ou de la reprendre avec lui.

Quels risques ?

→ Les incidents pouvant être liés au non-respect du débit de perfusions sont nombreux :

– surcharge hydrique brutale pouvant entraîner un œdème aigu du poumon dont les signes sont : gêne respiratoire, angoisse, sueur, pouls rapide, tension artérielle pincée légèrement plus élevée ;

– embolie gazeuse ;

– toxicité ;

– fièvre signe d’une bactériémie ; (pour ces quatre premiers cas, il faut arrêter la perfusion de suite et prévenir le médecin au plus vite)

– réaction allergique ;

– déshydratation ;

– inefficacité.

La déshydratation et l’inefficacité peuvent être liées au non-respect de la concentration plasmatique, lui-même lié au non-respect d’un débit.

Source : « Les principes d’une perfusion », document d’information, Hospices civils de Lyon, février 2018.

LES BONNES PRATIQUES

→ Au moment de la pose :

– vérifier la conformité de la prescription au patient, on utilise la règle des 5B (au BON patient, les BONS médicaments injectables et solutés de perfusion, à la BONNE dose, par la BONNE voie et au BON moment) ;

– tracer l’administration dans le dossier de soins ;

– informer le patient et obtenir son adhésion à son traitement ;

– laisser le patient exprimer ses craintes et répondre à ses questions.

→ Pendant l’administration : vérifier régulièrement le débit de la perfusion.

→ Si le patient touche à sa perfusion :

– reprendre les éléments avec lui et lui faire reformuler les explications ;

– s’il est désorienté, penser au positionnement du matériel (lire ci-dessous), voire utiliser une pompe à perfusion verrouillable ;

– tracer le problème dans le dossier de soins.

Quelques astuces en présence d’un patient désorienté

→ Si le patient est désorienté ou confus, des petits moyens peuvent être mis en place pour lui éviter de toucher à sa perfusion.

Matériel : positionner le pied à sérum très en arrière de la tête de lit pour éviter qu’il ne soit dans son champ de vision, masquer la molette de régulation de débit en l’emballant, ne pas oublier la boucle de sécurité sur le perfuseur ou le prolongateur.

Surveillances : les surveillances doivent être renforcées et réalisées par l’ensemble des membres de l’équipe soignante qui doivent tous être en alerte. Il est également possible de mobiliser l’entourage lorsqu’il est présent. Et lorsque, pour ce patient, le risque médicamenteux est important, il sera préférable d’utiliser une pompe à perfusion verrouillable. En général, ces dispositifs actifs (pompe à perfusion, pousse-seringue électrique) sont réservés à l’administration des médicaments à marge thérapeutique étroite, c’est-à-dire ceux dont l’administration nécessite un débit précis et constant. L’utilisation d’un tel dispositif ne dispense pas des surveillances habituelles : vérification du volume restant, etc.