Chirurgie :options délicates - L'Infirmière Magazine n° 397 du 01/10/2018 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Magazine n° 397 du 01/10/2018

 

FORMATION

CAS CLINIQUE

Le cancer du sein est un long chemin, de l’annonce de la maladie jusqu’à la rémission, en raison des traitements, de leurs effets secondaires, mais aussi parce qu’il atteint le corps des femmes d’un organe spécial, symbole de leur féminité.

L’HISTOIRE

→ Françoise, 55 ans, découvre à la toilette une grosseur inhabituelle dans son sein droit. Son médecin traitant lui prescrit une mammographie qui dévoile une image douteuse de plus de deux centimètres, retrouvée à l’échographie. Le cancer du sein est confirmé par la biopsie. Il s’agit d’un carcinome in situ, avec tumeur de petite taille.

→ Lors de la consultation d’annonce, la patiente est effondrée à l’idée d’une chirurgie éventuelle : à quoi ressemblera-t-elle ? Comment se mettra-t-elle en maillot de bain ?

→ Elle finit par en parler au médecin mais elle a peur qu’il juge ses préoccupations futiles. Elle a aussi beaucoup d’appréhension à l’idée de perdre ses cheveux en cas de chimiothérapie. Elle confiera à l’infirmière qu’elle craint d’être abandonnée par son mari.

PRISE EN CHARGE

Le dispositif d’annonce

Un dispositif a été mis en place pour que l’annonce de la maladie soit la moins brutale possible. Il est également là pour prendre en compte les souhaits et préoccupations des patients. Un temps médical puis un temps soignant permettront de répondre aux inquiétudes et aux questionnements.

→ Une réunion de concertation pluridisciplinaire (RCP) comprenant des spécialistes (radiologues, chirurgien, oncologue, radiothérapeute…) propose une stratégie thérapeutique pour le cancer très localisé de Françoise : chirurgie partielle avec radiothérapie ou ablation du sein sans radiothérapie. Françoise n’a pas besoin de chimiothérapie, ce qui la rassure d’emblée. L’hormonothérapie lui est recommandée.

→ Une décision partagée avec la patiente est prise au sujet de la technique de chirurgie, après une information éclairée de celle-ci en tenant compte de ses préoccupations esthétiques et des possibilités éventuelles de reconstruction. La tumorectomie a l’avantage d’être une intervention bénigne et permet de conserver une sensibilité au niveau de la peau, mais elle a pour inconvénient de provoquer une perte de volume de la glande. La mastectomie, si elle est radicale, permet, dans le cas de Françoise, d’éviter la radiothérapie et ses éventuels effets secondaires. Surtout, elle autorise une reconstruction immédiate lors de l’intervention chirurgicale d’ablation, ce que Françoise va préférer. L’enjeu pour l’équipe sera de lui présenter les différentes méthodes avec leurs avantages et inconvénients : pose d’un implant en silicone ou reconstruction avec un lambeau musculaire prélevé dans son dos ou au niveau de l’abdomen. Il sera nécessaire de la sensibiliser au fait que l’intervention reste complexe, qu’elle ne pourra retrouver le “sein d’avant” et que, de ce fait, la reconstruction peut être parfois difficile à accepter.

Un accompagnement au long cours

→ Les soins de support font partie de la stratégie thérapeutique. D’emblée, lors du temps accompagnant, l’infirmière repèrera les fragilités de la patiente. Elle pourra lui proposer une consultation avec une psycho-oncologue, des ateliers d’esthétique ainsi qu’un soutien avec une sexo-oncologue.

→ Parler des difficultés sexuelles est la première étape pour les surmonter. La patiente vit l’amputation du sein comme une atteinte de son intégrité au plus profond d’elle-même et perd confiance en elle. Ainsi, elle craint pour son couple mais, dans le même temps, préoccupée par son devenir, fatiguée, elle peut parfois renoncer à avoir une activité sexuelle. Un soutien l’aidera à mettre des mots sur ses inquiétudes, à faire le point sur sa relation avec son mari, ses désirs, et à retrouver une communication au sein du couple.