Un label méconnu - L'Infirmière Magazine n° 395 du 01/07/2018 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Magazine n° 395 du 01/07/2018

 

CERTIFICATION

DOSSIER

Les DRH ont encore beaucoup de progrès à faire pour prévenir et répondre aux discriminations à l’égard des personnels LGBTI. Seuls deux établissements de santé (dont la direction est commune) sont labellisés « Diversité », une certification Afnor.

Sils ont le sentiment d’être discriminés, les agents du centre hospitalier de Brie-Comte-Robert et de l’établissement public gérontologique de Tournan-en-Brie, tous deux en Seine-et-Marne, peuvent compter sur le « dispositif alerte discrimination ». Cette cellule d’écoute, composée de représentants du personnel et du psychologue du travail, recueille les témoignages des personnes qui se sentent discriminées, quel que soit le critère (origine ethnique, apparence physique, âge, sexe, convictions religieuses mais aussi orientation et identité sexuelles… Vingt-deux critères au total). Elle prend le temps de l’écoute, analyse la situation, rencontre la personne citée, les éventuels témoins, et, en fonction de la situation, propose une solution. Ce dispositif constitue l’une des nouveautés introduites depuis l’obtention du label « Diversité »(1) en 2012.

« Une démarche exigeante »

Créée en 2008, cette certification délivrée par l’Afnor (Association française de normalisation) est fortement encouragée par les pouvoirs publics. Aujourd’hui, 96?employeurs sont titulaires de ce label Diversité (dans des secteurs aussi divers que la banque, la construction ou les services…), dont seulement deux établissements de santé. « Ce n’est pas un simple label, c’est une démarche exigeante, souligne Dominique Peljak, directeur des deux établissements de santé franciliens labellisés. Il faut prendre conscience que nous sommes tous discriminants, même sans le vouloir. Lors d’un recrutement, par exemple, nous nous faisons tous une idée de la personne en quelques secondes, à partir de sa tenue vestimentaire, de son sexe, de son âge… Le label nous pousse à nous interroger en permanence. »

Corriger les mécanismes de discrimination

En plus de la mise en place de la cellule d’écoute, le label a nécessité de revoir les processus RH, qui ont été évalués par l’Afnor, afin de prévenir et de corriger les mécanismes de discrimination. Des formations ont également été dispensées à l’ensemble de l’équipe de direction, des cadres et des organisations syndicales, une charte du mieux-être au travail rédigée, des outils de communication diffusés… « Il n’y avait pas de problématiques préalables dans l’établissement : il s’agit donc d’une démarche de prévention des risques professionnels pour améliorer la qualité des services rendus », précise Fabrice Dion, DRH. La discrimination pour orientation ou identité sexuelles représente une part minime des situations rencontrées puisqu’un seul cas a été recensé. Les membres de la cellule d’écoute ont analysé la situation suivant la procédure et ont fait suivre trois propositions d’action à la direction (suivi psychologique de la personne, médiation et action de communication par flyer).

Un meilleur dialogue social

Pour le directeur, le label « permet de porter les valeurs du service public telles que l’humanisme, le respect, la tolérance. Ce ne sont pas que des grands mots, cela se traduit aussi par des actes. Cette dynamique participe aussi à l’amélioration des conditions de travail. » Le CH de Brie-Comte-Robert et l’établissement public gérontologique de Tournan-en-Brie ayant fusionné avec le CH de Melun en 2017, l’actuel directeur souhaite étendre la labellisation à l’ensemble du groupe hospitalier du sud Île-de-France : « C’est un vrai challenge car le CH de Melun compte 2 000 agents contre 300 seulement pour celui de Brie-Comte-Robert », considère Dominique Peljak.

C’est son prédécesseur, Philippe Paret, qui avait initié la démarche en 2012 : « Ce label permet de s’attaquer à des sujets qui ne sont pas évidents à évoquer. Il faut être prêt à recevoir cette parole. Mais c’est une manière de traiter le mal-être des agents. J’estime pour ma part que cela constitue un excellent outil de dialogue social et que cela permet de faire du management de valeurs très intéressant, notamment pour fédérer plusieurs établissements entre eux. » Convaincu des intérêts du label « Diversité », Philippe Paret souhaite l’obtenir pour le CH Georges-Daumézon, à Bouguenais, et l’hôpital local de Corcoué-sur-Lorgne, tous deux en Loire-Atlantique, qu’il dirige aujourd’hui.

1- Plus d’informations sur le label sur : https://certification.afnor.org/ressources-humaines/label-diversite et sur : www.fonction-publique.gouv.fr/label-diversite-dans-la-fonction-publique

LÉGISLATION

→ Sur la discrimination : article L. 1132-1 du code du travail, article 6 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires et article 225-1 et 225-2 du code pénal. Les discriminations fondées sur l’orientation sexuelle ou l’identité de genre sont un délit passible d’une peine maximale de 3 ans d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende pour une personne physique. Les peines sont portées à 5 ans d’emprisonnement et à 75 000 euros d’amende lorsqu’un agent public refuse sur ces mêmes fondements de fournir un service ou un bien dans un lieu accueillant du public ou en interdit l’accès.

→ Sur le harcèlement moral (définition, condamnation) : article L. 1152-1 du code du travail, article 6 quinquiès de la loi du 13 juillet 1983 et article 222-33-2 du code pénal.