La pilule ne convenait pas - L'Infirmière Magazine n° 386 du 01/10/2017 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Magazine n° 386 du 01/10/2017

 

FORMATION

CAS CLINIQUE

Claire Manicot*   Nicolas Dutriaux**  


*sage-femme à Herblay (95)

Refroidies par les effets indésirables de la pilule contraceptive, rendus publics en 2012, notamment pour celle de 3e et 4e génération, de nombreuses femmes s’en détournent.

L’HISTOIRE

→ Camille, 23 ans, étudiante, sans enfant, a utilisé le préservatif masculin tant qu’elle ne voyait son ami qu’un week-end par mois. Quand il l’a rejointe à Paris, elle a souhaité une autre contraception. Son médecin gynécologue lui a proposé une pilule œstro-progestative.

→ Six semaines après, elle est allée le revoir, se plaignant de spottings et d’une baisse de la libido, et a évoqué la pose d’un dispositif intra-utérin (DIU). Le médecin lui a dit que les saignements disparaîtraient après quelques mois et lui a lancé : « Oubliez le stérilet tant que vous n’avez pas d’enfant si vous ne voulez pas avoir mal ! » Et n’a pas dit un mot au sujet de la libido. Elle a eu l’impression de ne pas être prise au sérieux.

→ Camille consulte une sage-femme libérale, sur les conseils de sa sœur aînée. Jusque-là, elle ne savait pas qu’une sage-femme pouvait prescrire une contraception, de surcroît à une femme n’ayant pas d’enfant. La jeune femme parle de ses symptômes et de sa crainte de la pilule. Elle se souvient des controverses de l’année 2012 et confie ne plus avoir envie d’avaler des hormones.

ANALYSE

La mise en place d’une contraception nécessite une écoute sans préjugé ni jugement. Camille a eu une expérience malheureuse où elle n’a pas été entendue. Discuter avec la sage-femme lui a permis de comprendre ses symptômes, d’être rassurée, d’avoir des informations sur le DIU et de faire un choix éclairé.

→ La pilule, comme tout médicament, a des effets indésirables.

• Les spottings sont des effets indésirables classiques chez les femmes qui commencent une contraception sous pilule. Ils sont indolores, n’enlèvent rien à l’efficacité de la pilule et ne sont pas des règles. Ce sont des micro-saignements de l’endomètre devenu trop mince ou, au contraire, un épaississement en raison d’un dosage inadéquat en hormones. Généralement, ils régressent après plusieurs cycles. S’ils persistent, il faut changer de dosage ou envisager une autre contraception.

• La baisse de la libido reste taboue bien qu’elle figure dans le RCP (résumé caractéristique produit). La pilule bloquant le cycle menstruel signifie l’absence de décharges d’œstrogènes au moment de l’ovulation et serait, en cela, responsable du manque de ces pics de désir chez certaines femmes. L’objectif est de trouver une pilule au dosage adapté, avec un juste équilibre entre les œstrogènes et les progestatifs.

→ Il n’y a pas de mode de contraception idéal.

• Il convient de distinguer les accidents vasculaires artériels (infarctus, AVC) des accidents veineux (phlébite, embolie pulmonaire), qui ont déclenché l’inquiétude en 2012. Ces accidents se rencontrent généralement chez les personnes à risque identifiable (antécédents familiaux, diabète compliqué, tabagisme). La règle est de prescrire toujours des pilules de 2e génération en première intention, qui offrent les meilleurs rapports bénéfices/risques.

• La majorité des femmes supporte très bien la pilule. Il n’y a pas de mode de contraception idéal. Le DIU aussi présente des contre-indications (fibrome, IST) et parfois des effets indésirables (règles abondantes, saignements intermenstruels ou risque d’expulsion du DIU).

→ Le DIU peut être proposé chez une primipare.

• Sa pose sera généralement indolore lorsqu’elle est pratiquée par des professionnels expérimentés.

• Puisque Camille souhaite une méthode non hormonale, on lui proposera un stérilet au cuivre. Il présente l’avantage de rester en place cinq à dix ans.