Prescription sous conditions - L'Infirmière Magazine n° 384 du 01/07/2017 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Magazine n° 384 du 01/07/2017

 

FORMATION

L’ESSENTIEL

Thierry Pennable  

La prescription infirmière fête ses dix ans en France ! Si ce droit de prescrire, encore mal connu des infirmières, représente une reconnaissance de leurs compétences, il engage également leur responsabilité.

1. UNE ÉVOLUTION NÉCESSAIRE

Le vieillissement de la population et les progrès de la médecine, qui permettent à des personnes malades de vivre plus longtemps, ont modifié les attentes en matière de soins. Ainsi, en France, les 15 millions de personnes atteintes de maladies chroniques, les 9 millions déclarées en ALD(1), et plus généralement les 28 millions de personnes qui suivent un traitement au long cours obligent à une évolution de notre système de santé dans laquelle s’inscrit le droit de prescription donné aux infirmières. Car la prescription infirmière vise notamment à dégager du temps médical chez les médecins pour répondre aux besoins et aux attentes accrus de la population.

Si les États-Unis ont été précurseurs de ce nouveau droit accordé aux infirmières dès les années 1960, en France, la prescription infirmière(2) n’a, elle, vu le jour qu’il y a un peu plus de dix ans avec la loi du 21 décembre 2006(3) qui a modifié l’article L. 4311-1 du code de la santé publique (CSP) qui régit l’exercice de la profession d’infirmier. Une reconnaissance légiférée du rôle de collaborateur qu’exercent les infirmières aux côtés des médecins qui était attendue… En effet, un rapport de 1998 sur l’exercice libéral des professions paramédicales(4) soulignait déjà que le partage des rôles entre les médecins et les paramédicaux ne prenait pas en compte « les éléments constitutifs de la collaboration entre médecins et paramédicaux qui fonctionne souvent en pratique ». En cela, la loi de 2006 a substitué une reconnaissance légale de la compétence des infirmières à une pratique dans laquelle l’infirmière laissait une liste de matériels nécessaires aux soins, reprise scrupuleusement par le médecin prescripteur. Si la prescription infirmière est plus utilisée en médecine de ville, elle est aussi adoptée par les IDE dans certains domaines spécialisés comme en stomathérapie ou en tabacologie. Soumise à conditions, elle reste cependant cantonnée dans des limites strictes.

2. PRODUITS AUTORISÉS

Des dispositifs médicaux

La liste des dispositifs médicaux autorisés à la prescription infirmière est fixée par l’arrêté du 20 mars 2012 (lire pp. 44 à 47). Sachant que le pharmacien ou le prestataire de service qui délivre le dispositif médical n’a pas le droit de substituer un autre modèle à celui qu’a choisi le soignant « qu’avec l’accord exprès et préalable du prescripteur, sauf en cas d’urgence et dans l’intérêt du patient », selon l’article L. 5125-23 du CSP. Or, dans la pratique, la substitution des dispositifs médicaux par le pharmacien n’est pas rare, y compris pour les pansements. Ce qui peut affecter la démarche de soins décidée par l’infirmière. En effet, alors que la substance active d’un médicament générique est la « copie légale » de celle du médicament d’origine, les dispositifs médicaux inscrits sur une même ligne dite « générique » n’ont en commun que des « spécifications techniques minimales » et une même indication thérapeutique.

Des contraceptifs oraux

Depuis le 23 juillet 2009, les IDE sont autorisées à renouveler les prescriptions de médicaments contraceptifs oraux datant de moins d’un an pour une durée maximale de six mois, non renouvelable (lire pp. 51 à 53). À l’exclusion de ceux figurant sur une liste fixée par arrêté du ministre chargé de la Santé.

Des substituts nicotiniques

Depuis le 28 janvier 2016, les infirmières peuvent prescrire des traitements de substituts nicotiniques, donnant ainsi accès à leurs patients au forfait d’aide au sevrage tabagique. Depuis le 1er novembre 2016, ces traitements par substituts nicotiniques sont remboursés à hauteur de 150 € par année civile et par bénéficiaire (lire pp. 48 à 51).

Cas particulier de la vaccination antigrippale

Souvent classée dans le champ de la prescription infirmière, la possibilité d’administrer un vaccin antigrippal sans prescription médicale n’est pas un véritable acte de prescription. En effet, l’arrêté du 19 juin 2011 fixe la liste des personnes pouvant bénéficier de l’injection du vaccin antigrippal effectuée par l’infirmière sans prescription médicale :

– les personnes âgées de 65 ans et plus ;

– à l’exception des femmes enceintes, les personnes de plus de 18 ans atteintes d’une des nombreuses pathologies inscrites dans l’arrêté (asthme, BPCO…).

3. PAS DE FORMATION EXIGÉE

Alors que la Haute Autorité de santé (HAS) préconisait, dans un avis du 5 septembre 2007(5), que la prescription des pansements primaires soit réservée au médecin ou à une IDE titulaire d’un DIU plaies et cicatrisation, aujourd’hui, aucune formation complémentaire à la formation initiale n’est exigée pour pouvoir prescrire. Néanmoins, en pratique, toutes les IDE spécialisées interrogées insistent sur la nécessité de maîtriser le domaine de soins dans lequel intervient la prescription. Rejoignant en cela les dispositions de l’art R. 4312-10 du CSP qui stipule que « pour garantir la qualité des soins qu’il dispense et la sécurité du patient, l’infirmier ou l’infirmière a le devoir d’actualiser et de perfectionner ses connaissances professionnelles », ce qui inclut la prescription en tant qu’acte infirmier qui reflète les décisions thérapeutiques.

La prescription infirmière est traitée de façon générale dans les formations traitant de la nomenclature générale des actes professionnels (NGAP) qui fixe les cotations des actes infirmiers pour la facturation et la rémunération des infirmières libérales. Elle est abordée dans chaque formation dont le thème est un domaine ouvert à la prescription – la prescription des pansements dans les formations plaies et cicatrisation, les coussins anti-escarre dans les formations prévention escarre, les substituts nicotiniques dans la formation sur les conduites addictives, etc. De plus en plus de formations thématiques proposent un module sur ce que l’infirmière peut prescrire en lien avec la situation médicale et la réglementation.

4. RESPONSABILITÉ ENGAGÉE

Le droit de prescrire accorde une autonomie à l’infirmière qui s’accompagne d’une responsabilité.

Une obligation de moyen

La prescription engage la responsabilité de l’infirmière au même titre qu’un autre acte. Elle s’inscrit dans le cadre de l’art. R. 4312-14 du CSP qui stipule que l’infirmière est personnellement responsable des actes professionnels qu’elle est habilitée à effectuer.

Il s’agit plus précisément d’une obligation de moyen, au même titre que les médecins qui ne sont responsables des conséquences dommageables d’actes de prévention, de diagnostic ou de soins « qu’en cas de faute » (art. L1142-1 CSP). L’obligation de moyen qui s’applique à tous les professionnels de santé et à tous les actes médicaux, entendue comme une obligation de prodiguer des soins conformes aux connaissances du moment (et non comme une « obligation de résultat », c’est à dire de guérison). Elle est fondée sur un principe qui impose au médecin de donner au malade des soins « consciencieux, attentifs, et réserve faite de circonstances exceptionnelles, conformes aux données acquises de la science »(6). Comme pour un autre acte, la responsabilité de l’infirmière pourra être engagée uniquement pour une faute personnelle qui aura causé un dommage dont le lien de causalité avec la faute est démontré. La responsabilité civile professionnelle (RCP), qui couvre les actes relevant du champ de compétence de l’infirmière, garantit également la prescription infirmière qui est un droit inscrit dans le code de santé publique.

Des règles déontologiques

Le code de déontologie des infirmiers rappelle les textes en matière de « responsabilité dans le cadre du rôle propre et de ses prescriptions »(7) :

→ Art. R. 4312-33 du CSP :

– l’infirmier est libre du choix de ses actes professionnels et de ses prescriptions qu’il estime les plus appropriés ;

– il doit […] limiter ses actes professionnels et ses prescriptions à ce qui est nécessaire à la qualité et à la sécurité des soins ;

– il tient compte des avantages, des inconvénients et des conséquences des différents soins possibles.

→ Art. R. 4312-34 du CSP : l’infirmier répond, dans la mesure de ses connaissances, à toute demande d’information préalable sur les conditions de remboursement des produits et dispositifs prescrits.

Une responsabilité « partagée » dans certains cas

La prescription de certains dispositifs médicaux est conditionnée par une information faite au médecin traitant, selon l’arrêté du 20 mars 2012 qui fixe la liste des dispositifs médicaux que les infirmiers sont autorisés à prescrire (lire pp. 44 à 47). Toutefois, le CSP ne précise ni le support sur lequel peut être faite cette information des choix thérapeutiques de infirmière lorsqu’elle est requise, ni le délai dans lequel elle doit être faite. Or, l’infirmière qui prescrit dans cette catégorie de dispositifs médicaux se situe dans le cadre d’une responsabilité partagée et il peut être utile d’avoir une bonne traçabilité de l’information faite au médecin (par courrier adressé au médecin par exemple). Ce qui n’enlève rien au fait que l’infirmière qui a prescrit un soin et l’a appliqué garde l’entière responsabilité de ses actes, même avec une information faite au médecin.

5. VALIDITÉ DE LA PRESCRIPTION

La prescription doit contenir certaines mentions obligatoires.

→ Concernant le patient : nom, âge, sexe. Facultatif, le poids peut être utile pour les médicaments.

→ Concernant le prescripteur : nom, adresse et qualité (infirmier et numéro Adeli), date de prescription, signature. Facultatif, le numéro de téléphone du prescripteur peut être très utile pour le pharmacien ou tout autre prestataire qui a besoin de précisions.

→ Concernant les dispositifs médicaux :

– nom, posologie et mode d’emploi. Par exemple : pansement Biatain Silicone Lite ou « pansement hydrocellulaire à absorption importante », format 10 x 10 cm, 2 boîtes de 10 ;

– quantité prescrite ou durée de traitement. Lorsque la prescription concerne des dispositifs médicaux prévus pour une semaine mais que les soins risquent de durer davantage, l’infirmière peut noter « AR » (ou « à renouveler » en toutes lettres) sur la prescription. Les produits sont alors délivrés une deuxième fois au patient sans rédiger de nouvelle prescription ;

– fournir un double de l’ordonnance. Celle-ci est rédigée en deux exemplaires : l’original, sur lequel il peut être inscrit « AR », reste la propriété du patient. Le double permet de facturer ; il est envoyé à la caisse d’Assurance maladie, soit par le patient qui règle ses produits, soit par le prestataire qui pratique le tiers payant.

→ Concernant le remboursement :

– la prescription ne doit pas excéder douze mois, renouvellement (s) compris ;

– le nom et la quantité du produit, la durée totale de prescription ou le nombre de renouvellements doivent être indiqués ;

– la prescription doit être conforme aux conditions prévues à la liste des produits et prestations (LPP) pour certains dispositifs médicaux. Dont le respect des indications prévues et d’éventuelles restrictions : prise en charge subordonnée à une pathologie, à un type de traitement ou limitée à un certain nombre d’unités ;

– la validité de la prescription expire à l’issue de la délivrance des produits pour la durée totale de la prescription. Si le patient « saute » un mois sur une prescription à renouveler, il peut bénéficier de ce renouvellement dans la limite de douze mois.

6. ÉLARGISSEMENTS DU DROIT DE PRESCRIPTION

Plusieurs dispositifs permettent d’étendre le champ de la prescription infirmière.

Les protocoles de coopération

Ils ont été introduits dans le CSP par l’article 51 de la loi HPST de 2009. « Les professionnels de santé peuvent s’engager […] dans une démarche de coopération ayant pour objet d’opérer entre eux des transferts d’activités ou d’actes de soins » (article L. 4011-1). Si ces protocoles, encore peu nombreux, sont une reconnaissance des compétences déjà déployées par les infirmières dans l’exercice de leur profession, la question de la formation des professionnels fait débat. Début 2010, l’ensemble des ordres des professions de santé a désapprouvé ces dispositions qui prévoient que des professionnels, qui n’ont pas les titres nécessaires, puissent pratiquer des actes ou des activités qui ne relèveraient pas de leur domaine de compétence légal sans aucune garantie sur leurs qualifications et leurs compétences. Parmi les expériences positives, notons celle de l’équipe du service de nutrition de l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière (AP-HP) qui a mis en place un protocole de coopération professionnelle depuis 2013. Ce dernier permet aux IDE formées à la nutrition de suivre de manière autonome les patients après une chirurgie bariatrique et ceux ayant un diagnostic d’obésité. Depuis janvier 2015, les infirmières ont obtenu leur numéro de prescription validé par la HAS et l’agence régionale de santé (ARS) Île-de-France. Elles sont autonomes pour prescrire des vitamines et des micronutriments en cas de carence (lire aussi p. 40).

Les pratiques avancées

Inscrites dans la loi de modernisation de notre système de santé de janvier 2016, les pratiques avancées sont centrées sur la pratique clinique et permettent d’accéder à de nouvelles missions. Les IDE peuvent exercer en pratique avancée au sein d’une équipe de soins primaires coordonnée par le médecin traitant (article L. 4301 du CSP). Parmi les domaines d’intervention en pratique avancée, la possibilité de prescrire des produits de santé non soumis à prescription médicale obligatoire, des prescriptions d’examens complémentaires et des renouvellements ou adaptations de prescriptions médicales.

Ici, la question de la formation ne se pose pas. Les infirmières doivent justifier d’une durée d’exercice minimale de leur profession et d’un diplôme de formation en pratique avancée délivré par une université habilitée à cette fin. Il existe ainsi des masters “sciences cliniques infirmières” qui préparent à des spécialités : infirmière de pratiques avancées en cancérologie, gérontologie, parcours complexes de soins…

Les infirmières scolaires à part

Un protocole national(8) régit les modalités d’organisation des soins et des urgences dans les établissements scolaires. Et particulièrement l’utilisation des médicaments d’urgence dits « d’usage courant », en vente libre en pharmacie, ainsi que ceux prescrits dans le cadre des projets d’accueil individualisé (PAI). Parmi « les médicaments à usage strictement infirmier ou médical » que l’infirmière scolaire tient à la disposition des élèves, sont entre autres préconisés paracétamol, Hextril, Smecta et Spasfon. Ici, pas de véritable prescription rédigée. Les soins dont a bénéficié l’élève - date et heure de l’intervention, éventuelles mesures d’urgence ou décisions d’orientation vers le domicile ou une structure de soins, sont notés dans un registre spécifique. La responsabilité de l’infirmière est couverte à condition de respecter toutes ces consignes.

1- « Maladies chroniques », revue Actualité et dossier en santé publique (ADSP) du Haut Conseil de la santé publique, n° 72, septembre 2010.

2- « L’infirmière et la prescription, quelle situation internationale ? », revue Soins n° 809, octobre 2016.

3- Loi du 21 décembre 2006 de financement de la Sécurité sociale pour 2007.

4- Anne-Marie Brocas, « Rapport sur l’exercice libéral des professions paramédicales : infirmiers, masseurs kinésithérapeutes, orthophonistes, orthoptistes ». juin 1998 (bit.ly/2n3RvoJ).

5- HAS, 5 septembre 2007, « Avis pansements : prescriptions par les infirmiers ». Avis de la Commission d’évaluation des produits et prestations (bit.ly/2ren1UY).

6- Cour de Cassation, arrêt Mercier de 1936.

7- Décret n° 2016-1605 du 25 novembre 2016 portant code de déontologie des infirmiers.

8- Protocole national sur l’organisation des soins et des urgences dans les écoles et les établissements publics locaux d’enseignement, Bulletin officiel de l’Éducation nationale, 6 janvier 2000.

1- Christophe Debout, « L’infirmière et la prescription, quelle situation internationale ? », Soins n° 809, octobre 2016.

2- L’ICN regroupe des associations nationales d’infirmières de plus de 130 pays.

1- Anne-Marie Brocas, « Rapport sur l’exercice libéral des professions paramédicales : infirmiers, masseurs kinésithérapeutes, orthophonistes, orthoptistes ». juin 1998.

RÈGLEMENTATION

Typologie internationale(1)

La typologie élaborée par l’International Council of Nurses (ICN)(2) distingue quatre catégories de prescriptions infirmières utilisées à travers le monde. En France, on ne retrouve que les deux premières.

→ La prescription individuelle nominative : c’est la forme la plus classique de prescription. Elle est réalisée par l’infirmière pour un patient donné en indiquant clairement le dispositif médical, ou le médicament le cas échéant, sa posologie, sa fréquence d’utilisation et sa voie d’administration.

→ La prescription au regard d’un protocole établi pour un groupe de patient : dans ce cas, l’infirmière décide d’initier un protocole établi pour une situation clinique donnée applicable à une catégorie de patients spécifiques, après avoir identifié un des problèmes pour lequel le protocole a été conçu.

→ La prescription réalisée par « prescripteur supplémentaire » : ce mode de prescription combine l’intervention de deux professionnels de santé. Le prescripteur qualifié de « supplémentaire » – l’infirmière par exemple –, peut prescrire ou adapter les traitements appropriés à une situation pathologique diagnostiquée par un prescripteur « indépendant », le médecin par exemple.

→ La prescription indépendante : elle concerne les infirmières de pratique avancée et plus spécifiquement les infirmières praticiennes. Au Québec par exemple, l’infirmière praticienne spécialisée, titulaire d’une maîtrise en sciences infirmières et d’un diplôme d’études supérieures spécialisées, prescrit des examens diagnostiques, des médicaments et des traitements selon son domaine de spécialité.

ÉCLAIRAGE

« LE PROTOCOLE A VALORISÉ NOTRE SAVOIR-FAIRE »

Sylvie Wolf Infirmière à l’hôpital de jour du service de nutrition de l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière (AP-HP)

Le protocole de coopération mis en place au sein du service de nutrition de l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière (AP-HP), à Paris, permet aux infirmières habilitées de repérer et de traiter les complications nutritionnelles inhérentes à la chirurgie bariatrique. Une marque de reconnaissance.

En quoi consiste le protocole ?

Le protocole de coopération permet aux infirmières habilitées de repérer et de traiter les complications nutritionnelles inhérentes à la chirurgie bariatrique. Nous recevons en consultation infirmière principalement des patients qui ont subi cette intervention et une petite minorité de patients avant leur intervention pour faire de l’éducation et de l’information. Il y a une part d’évaluation clinique. Les carences vitaminiques inhérentes à la chirurgie bariatrique se manifestent par des symptômes neurologiques importants comme des troubles de la mémoire, de l’équilibre, fatigue, perte de cheveux ou des paresthésies recherchées lors de l’entretien avec le patient. Nous disposons également de bilans biologiques que nous sommes en mesure d’interpréter et qui nous permettent d’évaluer ces éventuelles carences en vitamines. Et depuis 2015, nous sommes autorisées à prescrire en notre nom propre des vitamines, du fer et du calcium avec des posologies adaptées à la sévérité de la carence.

Comment avez-vous été formées ?

En premier lieu par notre expérience antérieure dans le service de nutrition et dans le suivi des patients lors de leur première année post-opératoire. Le protocole s’appuie en partie sur ce que nous faisions déjà plus ou moins sans l’autonomie des décisions thérapeutiques, ni des prescriptions. Il a été initié par notre ancien chef de service, le Pr Basdevant, qui avait pu observer notre prise en charge des patients et notre gestion des difficultés. L’objectif du protocole était double : reconnaître et officialiser nos compétences et assurer un suivi de qualité aux patients selon les recommandations en vigueur de la Haute Autorité de santé (HAS) alors que nous faisons face à la multiplication des interventions de chirurgie bariatrique. Sur la base de notre expérience en nutrition, ma collègue a fait un DU d’éducation thérapeutique du patient et moi le DU « obésité et prise en charge post chirurgie bariatrique » de l’UPMC Paris VI. Puis nous avons gagné progressivement en autonomie. Pendant les deux premières années, tous nos comptes-rendus de consultations étaient débriefés avec les médecins qui signaient encore les prescriptions. Le service a aussi mis à notre disposition des protocoles particuliers à chaque traitement sous forme d’arbres décisionnels.

Que vous a apporté ce protocole dans votre exercice professionnel ?

Une autonomie dans le suivi des patients que nous prenons à la fois comme une marque de confiance et de reconnaissance. Le protocole a valorisé notre savoir-faire. Une satisfaction aussi puisque nos choix thérapeutiques ont toujours été validés par les médecins et que les malades sont aussi très satisfaits. Si notre relation aux patients est globalement proche de celle que nous avions avant le protocole, notre autonomie d’action et de prescription a plus ancré notre savoir-faire aux yeux des patients qui nous font confiance. Humainement, les consultations de suivi au long cours des patients sont très intéressantes. Notre autonomie a pour corolaire une responsabilité qui nous impose de rester dans notre domaine de compétence. Nous pouvons facilement appeler le médecin si la situation nous pose question, ce qui est notamment le cas de certaines douleurs abdominales. Depuis son élaboration, le protocole de coopération implique une grande cohésion de l’équipe médicale et paramédicale.

Propos recueillis par T. P.

SOINS DE PREMIER RECOURS

Sous couvert d’une prescription médicale en ville

Le médecin généraliste reste la porte d’entrée et le pivot des soins de premier recours en ville La prescription infirmière ne peut être réalisée que pendant la durée d’une prise en charge couverte par une prescription médicale. Condition rappelée par les textes :

→ la loi HPST du 21 juillet 2009 stipule que le « médecin généraliste de premier recours » doit « s’assurer de la coordination des soins nécessaire à ses patients, veiller à l’application individualisée des protocoles et recommandations […] en coopération avec les autres professionnels […] et s’assurer de la synthèse des informations transmises par les différents professionnels de santé » ;

→ la nomenclature générale des actes professionnels (NGAP) précise que « seuls peuvent être pris en charge ou remboursés par […] l’Assurance maladie […] les actes effectués personnellement par un auxiliaire médical, sous réserve qu’ils aient fait l’objet d’une prescription médicale écrite qualitative et quantitative […] »(1). Le texte ne distingue pas les actes du rôle propre ou du rôle prescrit.

ÉTUDIANTS EN IFSI

Références d’UE en lien avec le dossier et extrait :

→ UE 1.2.S3 « Santé publique et école de la santé » (compétence 5) ;

→ UE 2.11.S1 « Pharmacologie et thérapeutiques » : risque et dangers de la médication… (compétence 4) et UE 2.11.S5 « Pharmacologie et thérapeutiques » : prescription médicale et infirmière (compétence 4) ;

→ UE 4.4.S2 « Thérapeutique et contribution au diagnostic médical » (compétence 4) ;

→ UE 4.6.S3 « Soins éducatifs et préventifs » : soins infirmiers de prévention, éducation, aide… (compétence 5).