L’allergie alimentaire chez l’enfant - L'Infirmière Magazine n° 383 du 01/06/2017 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Magazine n° 383 du 01/06/2017

 

FORMATION

PRISE EN CHARGE

Adeline Bleunven*   Dr Sylvie Prouzeau**  


*infirmière puéricultrice
**allergologue

Avec une prévalence estimée à 8 % chez les plus jeunes(1) - trois fois plus que chez l’adulte -, l’allergie alimentaire constitue un réel problème de santé publique. Une pathologie qui peut être grave et qui influence la qualité de vie des malades.

1. QU’EST-CE QUE L’ALLERGIE ALIMENTAIRE ?

L’allergie alimentaire (AA) est un ensemble de réactions immunitaires anormales survenant après l’ingestion d’un aliment particulier. Celui-ci, normalement inoffensif pour l’organisme, est alors appelé « trophallergène » (terme désignant un allergène ingéré). Notons que dans les milliers de protéines contenus dans les aliments, seules quelques-unes sont allergéniques.

Le processus

On différencie deux mécanismes :

• l’allergie IgE médiée qui représente 90 % des cas. Elle correspond aux réactions d’hypersensibilité de type I définies par la classification de Gell and Coombs (1945) qui catégorise les modes de réponses « exagérées » de l’organisme ;

• l’allergie non IgE médiée (réactions de type II : cytotoxique et cytolytique, de type III : semi-tardive, à complexes immuns ou de type IV : retardée, à médiation cellulaire selon cette même classification) qui représente 10 % des cas.

D’autres réactions adverses aux aliments sont possibles. Il ne faut pas confondre l’AA avec :

- l’intolérance alimentaire, caractérisée par un déficit en enzyme (élément permettant l’absorption des aliments) provoquant une inflammation au niveau de l’intestin (ex. : intolérance au lactose ou au glucose) ;

- l’intoxication alimentaire, due à l’ingestion d’aliments contenant des bactéries et/ou leurs toxines, des parasites, des virus ou des poisons ;

- les fausses allergies provoquées par des aliments dits « histamino-libérateurs », riches en histamine ou en tyramine (ex. : fraises ou chocolat) qui peuvent induire l’apparition de symptômes similaires à ceux de l’allergie (ex. : urticaire).

Physiopathologie

Le mécanisme des AA les plus courantes (IgE médiée) s’opère en deux phases (voir shéma ci-dessous).

→ La 1re phase, la sensibilisation, correspond au premier contact de l’organisme avec l’allergène. Sa pénétration dans l’organisme induit la production d’anticorps spécifiques de la classe des immunoglobulines E (IgE) par des cellules qui sont les lymphocytes B. Les IgE, une fois produites, vont se fixer en surface des mastocytes (cellules participant à la défense de l’organisme). Le système est prêt à déclencher une réaction allergique quand celui-ci se représentera.

→ La 2e phase, le déclenchement, correspond au deuxième contact de l’organisme avec le même allergène ou composant de celui-ci. À ce moment, l’allergène est capté par les anticorps (IgE) fixés à la surface des mastocytes : ce contact est perçu comme un signal et va provoquer la synthèse et la libération de médiateurs de l’inflammation comme l’histamine ce qui entraîne une réaction d’hypersensibilité. Les divers symptômes de l’AA se font alors ressentir.

Principaux allergènes alimentaires

Chez l’enfant de moins de 15 ans, cinq aliments sont responsables de 75 % des manifestations allergiques : œuf, arachide, lait de vache, poisson et moutarde. Jusqu’à 3 ans, le lait de vache et les œufs sont le plus souvent en cause. Après 3 ans, ce sont l’arachide, le poisson et les fruits à coques qui viennent en tête.

→ La fréquence des allergènes incriminés dans les AA dépend des habitudes alimentaires des patients, donc de leur localisation géographique. Par exemple, en Scandinavie le premier allergène est le poisson alors qu’au Japon, il s’agit du riz.

→ Allergies croisées : le système de défense de l’organisme réagit fortement à des allergènes différents mais se ressemblant au niveau de la structure biochimique. Ainsi, il existe des allergies pollen-aliments (ex. : pollen de bouleau et pomme), aliments-aliments (ex. : lait de vache et de chèvre), latex-aliments (avocat) (lire aussi p. 40).

Facteurs de risque

Certains facteurs sont considérés comme favorables à l’apparition d’AA.

→ Les facteurs génétiques : l’AA apparaît le plus souvent sur un terrain familial allergique. En effet, un grand nombre d’enfants présentant une AA dans les premières années de vie ont au moins un parent de premier degré (parents, fratrie) allergique. Elle n’est pas nécessairement d’ordre alimentaire.

→ Les facteurs environnementaux :

- adjonction de nombreux additifs, mélanges d’aliments et substances dans l’alimentation industrielle ;

- hygiène excessive pratiquée dans les pays industrialisés qui affaiblirait le système immunitaire ;

- environnement chargé en différents allergènes (pollens).

Évolution naturelle de l’AA

L’évolution de cette affection dépend de l’aliment en cause :

- l’allergie aux protéines de lait de vache disparaît dans 90 % des cas vers l’âge de 3-4 ans ;

- la guérison de l’allergie à l’œuf touche 70 % des enfants concernés autour de 5 ans ;

- lorsque l’arachide, les oléagineux, les poissons et/ou les crustacés causent une réaction allergique, celle-ci disparaît beaucoup moins fréquemment(2).

Signes cliniques

L’AA se traduit par des symptômes multiples non spécifiques, mais reproductibles après chaque nouvelle exposition. Lors des allergies IgE médiées, leurs délais d’apparition est souvent court, moins de 2 heures après l’ingestion de l’aliment. Cependant, certaines manifestations peuvent être retardées. Les signes cliniques sont présentés ci-après par ordre de fréquence.

→ Signes cutanéomuqueux

• Manifestation retardée : l’eczéma ou dermatite atopique. C’est la manifestation principale - 80 % des cas avant l’âge de un an(3) - de l’AA chez l’enfant.

• Manifestations immédiates :

- l’urticaire : ce symptôme est caractérisé par la poussée de lésions érythémateuses, œdémateuses, et souvent prurigineuses. Les poussées d’urticaires sont plus fréquentes chez les enfants âgés de plus d’un an ;

- l’angio-œdème : le gonflement du visage, des lèvres, apparaît en général à partir de l’âge d’un an et sa fréquence augmente avec l’âge de l’enfant ;

- l’œdème laryngé : c’est un signe de gravité. Il provoque une difficulté pour respirer ou avaler. Il est plus fréquent chez les enfants de plus de six ans ;

- le syndrome oral (ou syndrome de Lessof) : en mangeant un fruit ou un légume, le palais gratte, les lèvres gonflent, une dysphagie peut apparaître. Ce syndrome est fréquent lorsqu’une allergie aux pollens est associée. Il concerne davantage l’adolescent.

→ Signes digestifs

• Manifestations retardées : RGO (reflux gastro-œsophagien), constipation.

• Manifestations immédiates : nausées, vomissements, diarrhées, douleurs abdominales.

Ces signes sont encore sous-estimés.

→ Signes respiratoires. Les symptômes respiratoires dans les AA sont rarement isolés. On relève l’asthme, plus fréquent entre 3 et 15 ans, la rhinite et la rhino-conjonctivite.

→ Choc anaphylactique : la moitié des chocs anaphylactiques d’origine alimentaire surviennent entre 3 et 15 ans(4). C’est une véritable urgence médicale qui nécessite une prise en charge immédiate (lire ci-contre). En France, les arachides et les fruits à coques en sont les premiers pourvoyeurs.

Le diagnostic

Le dépistage d’une AA nécessite une démarche diagnostique précise et précoce qui se décline en plusieurs étapes.

→ L’interrogatoire clinique :

- antécédents personnels et familiaux d’atopie ;

- description des symptômes actuels, contexte de survenue, délai d’apparition, facteurs favorisants (effort, prise médicamenteuse) ;

- état de santé ;

- environnement ;

- régime ou habitudes alimentaires, aliments suspectés.

Souvent, pour les réactions retardées, l’interrogatoire ne suffit pas à isoler des aliments particuliers, on a donc recours à l’enquête alimentaire par le biais de la tenue d’un journal sur une période d’environ 15 jours. Il faut y noter l’ensemble de ses consommations, conserver les étiquettes correspondantes et décrire les réactions allergiques survenues.

→ L’examen clinique comporte :

- le bilan de l’état staturo-pondéral, comportement ;

- l’examen de l’appareil cardio-pulmonaire ;

- l’examen cutané.

→ Les tests cutanés : ils peuvent être pratiqués chez les enfants dès les premiers mois de vie. Ils doivent être réalisés après une anamnèse, jamais de façon isolée, qui orientera le choix du test à réaliser (lire p. 53). Il faut savoir q’un test cutané positif ne signifie pas forcément allergie, il témoigne d’une sensibilité cutanée qui s’interprètera avec l’anamnèse et éventuellement un bilan biologique complémentaire, des tests d’éviction-réintroduction, des tests de provocation.

→ Les tests sanguins

• Le dosage des IgE totales : elles sont impliquées dans les réactions allergiques, mais leur présence en grande quantité peut être aussi être le témoin d’autres pathologies.

• Le trophatop : il s’agit d’un test de dépistage ou d’orientation groupé utilisant un mélange d’allergènes alimentaires. La réponse est qualitative.

• Le dosage des IgE spécifiques : il permet de déterminer si le sérum contient des anticorps spécifiques de l’allergie et contre quels allergènes ils sont orientés. Comme pour les tests cutanés, des doses élevées d’IgE spécifiques à un allergène montrent qu’il existe une sensibilisation. Il permet aussi de suivre l’évolution de l’allergie à l’aliment et de prévoir éventuellement la sévérité de la réaction par le dosage des anticorps des allergènes majeurs.

→ Les tests de provocation : le principe de ces tests est de reproduire les symptômes de la réaction allergique en mettant le patient en contact avec l’allergène suspecté. Ils doivent être pratiqués sous surveillance médicale dans des centres spécialisés, trop peu nombreux à l’heure actuelle.

• Test de provocation labiale : on met les lèvres en contact avec des aliments pendant 15 minutes afin de vérifier s’il y a manifestation allergique ou pas.

• Test de provocation orale : il permet de confirmer ou d’infirmer le diagnostic d’AA. On le pratique avec des quantités croissantes d’aliment (s) afin de déterminer la quantité qui déclenche les réactions ainsi que le type de symptômes. On peut donc évaluer le risque encouru par la consommation accidentelle de l’aliment, prendre les mesures thérapeutiques nécessaires mais aussi éviter des évictions inutiles.

2. PRISE EN CHARGE

Une bonne coopération et une relation de confiance entre l’allergologue, l’enfant et ses parents sont nécessaires.

Traitement

Le traitement de l’AA comporte le traitement médicamenteux des symptômes, mais repose avant tout sur l’éviction alimentaire. Des traitements curatifs par induction de tolérance orale donnent des résultats encourageants. De plus, un nouveau traitement sous forme de patch contre l’allergie à l’arachide est en cours de développement et semble prometteur.

→ Le régime d’éviction consiste en l’élimination de l’aliment incriminé. Ce traitement préventif, le plus efficace en cas d’AA, est une solution qui semble simple en théorie, mais est difficile à mettre en œuvre. La lecture vigilante des étiquettes alimentaires (voir ci-contre) est de rigueur, car l’allergène est souvent masqué. Dans la majorité des cas, il s’agit plus d’une action raisonnée sur l’environnement alimentaire que d’éviter totalement la consommation de l’aliment.

→ Les traitements médicamenteux des symptômes

• Les antihistaminiques bloquent l’action de l’histamine libérée par les cellules inflammatoires lors de la réaction allergique.

• Les corticoïdes luttent contre l’inflammation générale que provoque le contact avec l’allergène.

• Les broncho-dilatateurs utilisés en cas de manifestations respiratoires, sont administrés par inhalation.

• L’adrénaline est le traitement d’urgence en cas de choc anaphylactique (voir encadré p. 51).

• L’induction de tolérance orale (ITO) est effectuée sous contrôle médical et uniquement après décision de l’allergologue. Il s’agit d’un protocole thérapeutique actuel des AA persistantes qui améliore considérablement la qualité de vie des patients. L’ITO a pour objectif de pouvoir faire consommer l’aliment incriminé en quantité normale et sans réaction. Elle se fait très progressivement, et à des doses très faibles.

Prévention primaire

→ Des précautions pendant la grossesse : il n’est pas recommandé à la femme enceinte de suivre un régime alimentaire pour prévenir les allergies, sauf éventuellement pour l’arachide (des études sont controversées).

→ Le bénéfice de l’allaitement maternel, dans la prévention du développement d’un eczéma a été confirmé. Cependant, le bénéfice sur les signes respiratoires est moins tranché. Toutes les protéines alimentaires ingérées par la mère peuvent passer dans son lait. Cela permettrait à l’enfant allaité de développer une meilleure tolérance aux différents aliments introduits lors de la diversification. Néanmoins, il est également reconnu que ces protéines peuvent induire une sensibilisation chez le nourrisson, voire déclencher des manifestations allergiques pour lesquelles la mère doit adapter son régime alimentaire si elle souhaite poursuivre l’allaitement.

→ S’agissant de la diversification alimentaire, les recommandations ont beaucoup évolué. La Société française de pédiatrie (SFP) et la Société européenne de gastro-entérologie, hépatologie et nutrition pédiatriques (ESPGHAN) recommandent de débuter chez tous les nourrissons la diversification entre 4 et 6 mois, y compris avec les aliments allergisants. Une diversification plus précoce expose à un risque accru d’allergie. Une diversification plus tardive pourrait majorer ce risque et ne permet pas répondre aux besoins nutritionnels du nourrisson.

Éducation thérapeutique

L’éducation thérapeutique du patient (ETP) est un complément indispensable à la prise en charge médicale de l’enfant et de sa famille pour mieux vivre avec cette maladie. En effet, l’enfant est en vigilance permanente et n’a pas le droit à l’erreur. Les parents, quant à eux, sont souvent très angoissés et vivent un quotidien très contraignant. L’objectif de l’ETP est d’acquérir des compétences pour repérer l’allergène, éviter l’accident et savoir le traiter si celui-ci survient.

Le Groupe de réflexion en ETP dans l’allergie alimentaire (Gretaa), s’appuyant sur les recommandations de la Haute autorité de santé (HAS) en matière d’ETP, contribue à structurer la démarche éducative dans l’AA, dans le but d’harmoniser les pratiques. Il a élaboré un référentiel de compétences à acquérir par classe d’âge et propose différents outils éducatifs (images, jeu de l’épicerie, puzzle, metaplan…) pour les apprentissages adaptés à chaque âge. Pour chaque compétence sont définis des objectifs de sécurité(5). Ces derniers sont incontournables : savoir respecter les évictions en toute circonstance, utiliser la trousse d’urgence en fonction des signes et au besoin appeler le Samu, injecter l’adrénaline et prévenir un adulte référent.

L’ETP peut être réalisée en séances collectives (mais ce n’est pas toujours facile de mobiliser les familles), mais également dès la consultation avec l’allergologue qui doit délivrer les informations essentielles dans cet objectif de sécurité. Dans tous les cas, elle est nécessaire face à une qualité de vie largement détériorée par les allergies. Une étude américaine de Sicherer en 2001(6) a montré l’impact émotionnel sur les parents et la limitation des activités familiales. La présence d’une dermatite atopique et le nombre d’évictions alimentaires sont deux facteurs déterminants de la qualité de vie selon cette même étude. La sévérité des symptômes et le type d’aliments, le seuil de réaction le sont également. À noter que le centre européen EuroPrevall a validé des questionnaires de qualité de vie spécifiques pour les Européens, traduits en français qui permettent d’évaluer l’impact de l’AA sur les enfants et leurs parents, disponibles en français et qui peuvent être utilisés en ETP(7).

Vie en collectivité

Le projet d’accueil individualisé (PAI) doit être mis en place pour toute AA. Ce document écrit précise les adaptations à apporter à la vie de l’enfant ou de l’adolescent en collectivité (crèches, écoles, centres de loisirs, etc.). Il permet de bénéficier de traitements médicaux, de régimes alimentaires, d’aménagements spécifiques et de soins d’urgence, nécessités par leur état de santé. Le PAI est élaboré à la demande de la famille, ou avec son accord et sa participation, par le chef d’établissement à partir des besoins thérapeutiques de l’enfant ou l’adolescent. Ces éléments sont précisés dans l’ordonnance signée du médecin qui suit ce dernier dans le cadre de sa pathologie.

1 - D. Moneret-Vautrin, « Épidémiologie de l'allergie alimentaire et prévalence relative des trophallergènes en France ». 41e Journée annuelle de nutrition et de diététique 2001 (Hôtel-Dieu - Université Paris VI).

2 - A. Nemni, A. Grimfeld, J. Just, « L'allergie alimentaire chez l'enfant ». Décision thérapeutique en médecine générale, n° 31, mai 2006.

3 - F. Rancé, E. Bidat, Allergie alimentaire chez l'enfant, Éd. Médecine et hygiène - Médecine et enfance, 2000.

4 - bit.ly/2pzouBH.

5 - Gretaa (bit.ly/2pwxC9).

6 - S.-H. Sicherer, S.-A. Noone, A. Muñoz-Furlong, « The impact of childhood food allergy on quality of life ». Annals of Allergy, Asthma & Immunology, décembre 2001, 87 (6):461-4.

7 - J. Wassenberg, M.-M. Cochard, A. DunnGalvin, B. M. J. de Blok, M. Hofer, P. A. Eigenmann, « Qualité de vie chez l’enfant avec allergie alimentaire : validation de la version française des questionnaires spécifiques de qualité de vie », Revue française d’allergologie, vol. 51 (2011) p. 437-438.

REPÈRES

Le choc anaphylactique

L’anaphylaxie, ou choc anaphylactique, est une urgence médicale grave causée par une réaction allergique immédiate et généralisée pouvant entrainer la mort si l’on n’intervient pas rapidement.

→ Comment reconnaître un choc anaphylactique ?

C’est une réaction soudaine (5 à 20 minutes après l’ingestion d’un aliment) et généralisée. Plusieurs symptômes sont associés. Il débute souvent par une sensation de malaise, avec prurit suivi d’une urticaire, d’une gêne respiratoire, de douleurs abdominales et de vomissements. Parfois une perte de connaissance associée à une chute de la pression artérielle est observée. Chez le tout-petit, c’est la survenue d’une hypotonie et d’une léthargie.

→ L’adrénaline en intramusculaire est le traitement d’urgence en cas de choc anaphylactique en raison de son action sur le cœur et les vaisseaux sanguins, qui conduit au rétablissement d’une circulation sanguine satisfaisante. Elle doit être injectée dès l’apparition de deux symptômes conjoints, signe d’une réaction généralisée. Le délai d’administration de l’adrénaline conditionne le pronostic. L’adrenaline existe sous forme d’auto-injecteur (voie intramusculaire, dans la face antérolatérale de la cuisse) qui est simple d’utilisation. Cette prescription doit s’accompagner d’un apprentissage de la manipulation du stylo auto-injecteur (Anapen, Jext, Epipen) par l’enfant et/ou sa famille ainsi que par tous les tiers intervenants auprès de la personne allergique. Une prescription pour une trousse d’urgence doit comporter deux stylos selon les recommandations de l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM).

LIRE LES ÉTIQUETTES

→ En cas d’allergie connue, les patients doivent lire avec attention les étiquetages des produits industriels. Un apprentissage qui fait partie des séances d’éducation thérapeutique. Selon la réglementation européenne dite Inco, la présence d’allergènes doit figurer sur la liste des ingrédients et être mise en exergue. Ainsi, l’allergène pourra être signalé en gras, en italique ou souligné.

→ À noter que les règles d'étiquetage ne concernent que les ingrédients introduits volontairement par le fabricant dans la recette du produit. Le patient doit aussi prendre en considération les mises en garde comme « peut contenir des traces de » ou « susceptible de contenir des ».

→ L’obligation de mentionner la présence d’allergènes s’applique désormais aux produits préemballés et non emballés. Elle concerne donc les sociétés de restauration collective, établissements scolaires qui doivent dès lors informer les familles, comme tout consommateur, sur les 14 allergènes à déclaration obligatoire susceptibles d’être présents dans les produits de consommation (réglementation Inco 1169/2011).

EN PRATIQUE

Les tests cutanés

Il existe deux types de tests cutanés en allergie alimentaire (AA) choisis en fonction de l’anamnèse.

Les prick-tests

Ils sont utilisés en présence de manifestations immédiates (asthme, urticaire…). Les allergènes sont déposés sur la peau, puis mis au contact de certaines cellules intervenant dans la réaction allergique en enfonçant au travers de la substance une minuscule pointe qui pénètre jusqu’à 1 mm de profondeur.

→ Type de réactifs utilisés : ce sont soit des extraits commerciaux, soit les allergènes natifs, à privilégier. Plus réalistes, ils offrent plus de subtilités (par exemple la distinction entre noisette crue ou grillée). De plus, les réactions systémiques avec les aliments natifs sont rares, de l’ordre de 0,008 %.

→ Type de lancet : ALK ou STG, Stallerpoint ou aiguilles. Elles ont chacune un fonctionnement qu’il faut savoir maîtriser. L’important est de tenir compte de la douleur. Selon les études, la Stallerpoint serait plus douloureuse mais si elle est bien utilisées cela peut, faire moins mal qu’avec une autre lancet.

→ Réalisation : les tests sont effectués sur l’avant-bras ou dans le dos, sur peau saine et sont espacés de 3 cm afin d’éviter que l’un d’eux ne réagisse sur un autre allergène. Attention de ne pas faire saigner (risque de faux positif) mais que le test soit suffisamment pénétrant (risque de faux négatif). L’aiguille doit être changée pour chaque allergène ainsi que le coton d’essuyage. Pour faciliter l’interprétation, on réalise un témoin positif et un témoin négatif.

→ Facteurs de vulnérabilité du résultat :

- sur l’avant-bras, privilégier les zones médianes et éviter les zones proximales et distales ;

- tenir compte de l’âge (plus faible réactivité aux extrêmes de la vie), la pigmentation de la peau, la variation saisonnière (en plein été, espacer plus les allergènes), les possibilités d’allergie cutanée dues aux médicaments (arrêt des histaminiques et psychotropes quelques jours avant le test).

→ La lecture du résultat est effectuée à 15 à 20 mn. Une réaction négative peut exclure une AA. Le test est positif si le diamètre de la papule est supérieur ou égal à 3 mm par rapport au témoin négatif ou à la moitié du témoin positif. En cas de papule irrégulière, on prend la moyenne du plus grand diamètre et de son orthogonale.

Une réaction positive (œdème et érythème à l’endroit de la piqûre, prurit) témoigne d’une simple sensibilisation, les investigations doivent se poursuivre pour confirmer le diagnostic d’AA.

Patch tests

Ils permettent de diagnostiquer l’hypersensibilité retardée (eczéma, troubles digestifs). En pratique, ils sont surtout utilisés pour le lait.

→ Il s’agit de timbres adhésifs sur lesquels sont fixées des cupules contenant les allergènes. Plusieurs types de supports existent dont le Finn Chamber Test (en aluminium) que l’on délaissera pour un bébé en raison du risque de sensibilisation à l’aluminium, au profit de l’IQ-Ultra patch-test.

→ Ces patchs sont placés dans le dos (zone paravertébrale (2/3 supérieur de dos) dans une région exempte d’eczéma.

→ La prise d’antihistaminiques et corticoïdes doit être interrompue une semaine avant la réalisation des tests, et les dermocorticoïdes sur la zone de test deux semaines auparavant.

La lecture est réalisée en général à 48 h, 20 à 30 minutes après leur retrait. Un contrôle de la lecture est effectué à la 72e et 96e heure. Le test est positif en présence de réactions érythémateuses et infiltrées avec prurit.