« Les RH, un apport stratégique » - L'Infirmière Magazine n° 378 du 01/01/2017 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Magazine n° 378 du 01/01/2017

 

INTERVIEW MONIQUE ABAD RESPONSABLE DU PROGRAMME RH À L’AGENCE NATIONALE D’APPUI À LA PERFORMANCE DES ÉTABLISSEMENTS DE SANTÉ ET MÉDICO-SOCIAUX (ANAP)

DOSSIER

A. V.  

Monique Abad, elle qui fut infirmière « dans une vie antérieure », insiste pour que les directions des ressources humaines hospitalières intègrent aussi bien l’aspect gestionnaire que stratégique.

L’INFIRMI"RE MAGAZINE : Quelle vision a l’Anap de la GRH hospitalière ?

MONIQUE ABAD : En plus de l’aspect gestion, la GRH hospitalière englobe également l’apport stratégique. Mais certaines directions RH sont encore très orientées sur la gestion et semblent peu investir le champ de la stratégie de l’établissement. Cela peut venir d’un problème de positionnement dans les instances. Il existe par exemple des comités de direction très resserrés où le DRH est absent : il sera donc de fait écarté des prises de décisions. Sans généraliser, nous constatons aussi que certains établissements n’ont pas prévu de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC). Ils n’anticipent pas suffisamment les départs à la retraite ou le besoin de nouvelles ressources, ce qui peut entraîner une dégradation de la qualité de la prise en charge. Mais nous rencontrons heureusement beaucoup d’exemples de DRH pro-actifs qui inscrivent leurs actions dans une orientation plus stratégique.

L’I. M. : Les RH font partie de l’un des axes du programme de travail 2016 de l’Anap. Sur quels domaines se concentre votre activité ?

M. A. : La nouvelle organisation du programme de l’agence en 14 projets a permis de définir un projet RH en tant que tel, en complément des actions menées de manière transversale dans tous les autres projets. C’est donc une première et le sujet RH est encore en cours de cadrage. Nous travaillons sur plusieurs thématiques comme la synchronisation des temps médicaux et non-médicaux, un sujet suggéré il y a quelque temps par un groupe de travail pluridisciplinaire composé de cadres de santé, de médecins, de DRH, de directeurs des affaires médicales et de directeurs de soins qui en ressentaient le besoin. Le but est de mieux organiser la coordination des équipes pour améliorer la qualité des soins et les conditions de travail. Le virage de l’ambulatoire et le raccourcissement des durées de séjours accentuent en effet les contraintes qui pèsent sur le personnel médical, paramédical et les agents administratifs.

L’I. M. : Quelles sont les thématiques sur lesquelles vous allez travailler demain ?

M. A. : Nous envisageons d’élaborer une méthode outillée pour les responsables médicaux. L’organisation médicale mérite, elle aussi, d’être réfléchie et pensée au sein d’un parcours patient. Par exemple comment fait-on pour avoir une offre de consultation qui corresponde aux besoins de la patientèle et qui tous les jours soit bien organisée ? L’autre gros dossier auquel nous nous attachons est la qualité de vie au travail. Nous estimons qu’il est utile de revoir l’organisation de la ligne hiérarchique. Les professionnels de terrain rencontrent parfois une certaine incompréhension face à la multitude de projets qui s’enchaînent, car on ne leur a pas expliqué en amont la logique et la finalité dans lesquels ils s’inscrivent. Par ailleurs, certains cadres peuvent se laisser phagocyter par la gestion médico-économique en accordant trop de temps aux réunions au détriment de l’appui et l’accompagnement des équipes.

L’I. M. : La qualité de vie au travail, c’est l’un des motifs de mécontentement des infirmières qui se sentent peu écoutées. Comment les RH peuvent-elles répondre aux attentes de terrain ?

M. A. : La première force d’écoute des infirmières, c’est leur cadre. Il est important de permettre aux cadres d’avoir cette capacité à se positionner vis-à-vis des équipes en termes d’appui, d’écoute, d’encouragement et de créateurs de liens avec les projets et tout ce que l’on demande aux équipes. Mais la qualité de vie au travail est un sujet extrêmement vaste. Il faut parvenir à faire le tri entre les choses qui posent problème mais sur lesquelles l’établissement ne pourra pas agir comme la question des statuts, et les autres comme l’organisation du travail. La condition est d’avoir au préalable objectivé les difficultés, défini les axes d’amélioration et impliquer les acteurs concernés. Je me souviens de l’expérience d’un DRH qui, en s’attelant à ce qui aurait pu passer pour des sous-sujets, par exemple favoriser des temps informels d’échanges, a réussi à conforter les équipes qui se sont senties bien mieux écoutées et prises en compte.