Solvants : risques et protection - L'Infirmière Magazine n° 377 du 01/12/2016 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Magazine n° 377 du 01/12/2016

 

FORMATION

ORGANISATION

A.-G.M.  

Les salariés exposés aux solvants doivent faire l’objet de mesures de protection adaptées. Des solutions sont à trouver pour remplacer les produits les plus dangereux.

Les solvants sont utilisés dans de nombreuses activités : métallurgie, nettoyage, chimie et plasturgie, agriculture… Il en existe quelques milliers, dont environ une centaine sont couramment utilisés, soit comme « dégraissant, diluant, décapant, adjuvant, ou encore solvant d’extraction », précise l’Institut national de recherche et de sécurité –, l’INRS (lire aussi p. 54). « Il y a très peu de personnes qui ont comme activité principale la manipulation des solvants. Généralement, c’est un produit annexe ou une aide au processus », précise Cosmin Patrascu, chimiste à l’INRS. Dans la métallurgie par exemple, le solvant est utilisé pour nettoyer la pièce à la fin. En peinture, il permet de diluer la couleur. Et en chimie fine, le solvant peut être un milieu réactionnel. « Une des sources de risque, c’est cette image de produit secondaire, estime Cosmin Patrascu. Il y a souvent une minimisation du risque lié au solvant, car on se concentre davantage sur les risques liés à l’activité principale. »

EFFETS SUR L’ORGANISME

• Le solvant peut pénétrer dans l’organisme par trois voies : respiratoire, cutanée, digestive.

• Les solvants peuvent provoquer des atteintes de la peau ou des muqueuses, des voies respiratoires, du système nerveux, ou encore des atteintes cardiaques liées à des solvants chlorés et fluorés (très rares). Ils peuvent également présenter des risques d’incendie et d’explosion, des réactions dangereuses, notamment à cause de certains mélanges, et des risques pour l’environnement.

MESURES DE PRÉVENTION

Les mesures de prévention reposent sur quatre étapes.

• Évaluation des risques : il faut recenser tous les solvants présents dans l’entreprise et évaluer leurs caractéristiques physico-chimiques, leur danger, les volumes utilisés ou rejetés, etc. Il faut également lister leurs conditions d’utilisation, d’émission, de stockage, de manipulation, ainsi que les conditions et la fréquence d’exposition des salariés (exposition cutanée, respiratoire, risque d’exposition chronique ou accidentelle, efficacité de la ventilation existante, etc.).

• Suppression ou substitution des solvants dangereux : « Il faut essayer de trouver un moyen de ne plus utiliser de produits chimiques, explique Cosmin Patrascu. Par exemple, pour le dégraissage des métaux, on peut employer une technique vibratoire. » De même, on tentera de ne plus utiliser le produit dangereux. Et si ce n’est pas possible, il faut le substituer par un produit moins dangereux. « On identifie les propriétés dont on a besoin pour le solvant et on choisit un autre solvant dans la même classe, un produit moins dangereux ou moins volatile. Le solvant ultime du point de vue de la prévention, c’est l’eau ! », rappelle-t-il. Cette étape est une obligation réglementaire renforcée pour les solvants classés comme cancérogènes, mutagènes ou toxiques pour la reproduction (CMR) avérés (sauf en cas d’impossibilité technique).

• Mesures de protection collective : travail en système clos, systèmes d’encoffrement, captage des polluants au plus près de leur source d’émission, ventilation générale, transfert de solvant par pompe plutôt que transvasement manuel des fûts, entretien régulier et contrôle de l’efficacité des mesures de protection collective… « Si je n’arrive pas à substituer un produit dangereux par un produit moins dangereux, il faut travailler en circuit fermé pour limiter le contact avec l’opérateur », détaille le chimiste. Chez les pétroliers, par exemple, des pompes sont utilisées et tout se fait en circuit fermé pour limiter les risques liés au benzène. Et pour la peinture de carrosserie, des cabines ventilées doivent être mises en place.

• Moyens de protection individuelle : « En dernier recours ou en complément, on utilise des moyens de prévention individuels : masques de protection respiratoire, gants et lunettes de sécurité, tenues de protection, insiste Cosmin Patrascu. Dans une cabine de peinture par exemple, malgré le flux d’air, il peut y avoir des vapeurs, qui peuvent aller dans les voies respiratoires de l’opérateur. Il est donc préférable qu’il porte un masque. » Il faut bien choisir les équipements adaptés en fonction des solvants. L’INRS a conçu des documents, ainsi que le logiciel ProtecPo, pour aider les professionnels au choix des matériaux les mieux adaptés pour la protection cutanée, notamment contre les solvants et les mélanges de solvants. Un autre logiciel, Premedia, permet d’estimer la durée de vie des masques de protection respiratoire, (voir Savoir + p. 54). Des mesures complétées par la prévention et la surveillance médicale. Le médecin du travail fixe la fréquence et la nature des examens, en fonction de l’évaluation des risques et des substances utilisées.